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Les Tunisiens et les élections de 2019 : Face au pire, que faire ?

Les élections législatives et présidentielles de 2019 se profilent à l’horizon et les Tunisiens vont être confrontés à un très difficile dilemme. Il semble, en effet, que pratiquement tous les futurs candidats et leurs partis, soucieux de l’emporter, vont encore faire une alliance avec les islamistes.

Par Rachid Barnat

C’est le cas, semble-t-il, de Machrou Tounes. Ennahdha a par la voix du président du Conseil de la Choura, indiqué clairement qu’il y avait un accord avec Machrou Tounes. Accord dont Mohsen Marzouk nie l’existence dans son communiqué. Mais tout en niant, il indique qu’il sera prêt à gouverner avec tous les partis; ce qui veut dire que la porte reste ouverte aux obscurantistes aussi. Ce que, par ailleurs, le fondateur de ce parti ne s’en cachait pas lors d’un entretien accordé à Meriem Belkadhi sur la chaîne Al Hiwar Ettounsi, quand il présentait son nouveau parti. Une ambiguïté qui augure de nouvelles trahisons que les Tunisiens ne supporteront plus !

Autrement, quelle différence entre Machrou Tounes et Nidaa Tounes, le CPR ou Ettakatol dont les chefs eux aussi avaient juré tous leurs dieux qu’ils ne s’allieraient jamais aux Frères musulmans ?

Est-on vraiment condamné au «fameux consensus» ?

Les Tunisiens doivent-ils se résoudre à demeurer sous la botte des obscurantistes, gouvernés par le «fameux consensus» et à subir l’échec complet de la politique des compromis, menée par les gouvernements successifs dominés par les Frères musulmans pour ne pas fâcher Ghannouchi qui menace, à demi-mot, de recourir à la violence chaque fois qu’il se trouve dans une impasse politique ?

Pourtant les ravages de cette alliance et de ce «consensus», sont depuis longtemps dénoncés; et ce, sur tous les plans: économique, social et sociétal. Les dommages se sont même aggravés avec le départ en très grand nombre des jeunes diplômés, des médecins, des ingénieurs et autres techniciens qualifiés qui n’ont plus les moyens de travailler utilement au pays et qui n’ont plus confiance en l’avenir depuis que la Tunisie est tombée entre les mains des Frères musulmans par la faute d’une classe politique progressiste laxiste terrorisée à l’idée que les Frères musulmans recourent au terrorisme, au point de les croire incontournables et indispensables à la vie politique tunisienne.

Les solutions existent. Il faut juste une volonté et un courage politique pour effectuer les réformes nécessaires qui s’imposent pour sortir le pays du marasme où il se trouve. En premier lieu, il faut en finir avec les partis qui instrumentalisent honteusement la religion en les interdisant tout simplement. Car il n’y aura pas d’avenir pour ce pays tant que les obscurantistes continueront d’instrumentaliser la religion et conserveront le moindre pouvoir.

Ne peut-on pas vraiment vivre sans Ennahdha ?

Comme les politiques, pour de basses raisons d’intérêt personnel, vont continuer à faire les yeux doux aux obscurantistes, aucune confiance ne peut leur être accordée. Leur conduite passée, absolument lamentable, ne permet pas d’espérer une évolution et un ressaisissement salutaire. En réalité, certains sont tombés dans l’idée qu’a diffusée Ennahdha selon laquelle : sans un accord avec elle, ce serait la violence et le chaos !

Par manque de courage politique, beaucoup ont déjà cédé au terrorisme de ce parti. Ils se plient devant la violence politique et la menace des islamistes. Ils agissent avec lâcheté, bradant leurs valeurs si valeurs ils avaient; ce dont beaucoup de tunisiens doutent désormais.

Dès lors, que devra-t-on faire ?

Certains vont argumenter sur le moindre mal; et donc appelleraient pour un vote pour des partis prêts à s’allier à Ennahdha, dont on nous dira qu’ils feront le contrepoids aux obscurantistes. Ce qui est une grave erreur car on a clairement vu dans le passé récent qu’ils ne faisaient strictement aucun contrepoids réel ! Ils permettaient seulement aux obscurantistes de se maintenir et de gagner du temps pour diffuser leur venin dans la société. Ce fut le cas pour Moncef Marzouki et son CPR, ce fut le cas pour Mustapha Ben Jaâfar et son Ettakatol; et c’est le cas de Béji Caïd Essebsi et son Nidaa Tounes; qui, tous furent utilisés par Rached Ghannouchi pour redorer le blason d’un parti honni par une majorité de Tunisiens ne sachant plus comment s’en débarrasser pour tout le mal qu’il a fait au pays, mais qui finiront par être jetés aux oubliettes de l’histoire.

Il serait plus efficace de boycotter complètement et fermement tous les partis qui ont fait dans le passé où qui proposent de faire dans l’avenir une alliance avec les islamistes; quelles que soient les raisons qu’ils invoqueront pour justifier cette alliance contre nature.

Les partis laïcs doivent cesser de servir d’alibi aux islamistes

Tout parti qui ne condamne pas fermement les islamistes et qui n’annonce pas clairement le rejet des Frères musulmans avec une volonté claire d’en finir avec cette lèpre qui gangrène la société tunisienne, il faudra, hélas, s’en passer et choisir plutôt de s’abstenir; en faisant de cette abstention massive un message politique fort pour le pays et pour le monde.

À ceux qui vont s’écrier que c’est la porte largement ouverte à l’islamisme, je répondrai qu’il vaut mieux un islamisme à visage découvert au pouvoir pour répondre de sa politique, qu’un islamisme qui se cache derrière ses alliés et dont il tire les ficelles sans en assumer les responsabilités. Ainsi, lors des élections suivantes, les tunisiens les jugeront sur pièce et les sanctionneront en leur accordant leur confiance ou en les dégageant.

Car quand les peuples perdent confiance en la démocratie, ils tombent souvent dans le populisme des extrémistes. Et la défiance remplaçant la confiance, certains franchissent le pas et votent pour les extrémistes, fussent-ils fascistes !

Si les Tunisiens doivent passer par cette douloureuse expérience, hé bien qu’ils le fassent. Encore faut-il que les partis progressistes cessent de servir d’alibi aux Frères musulmans et les laissent assumer, seuls, leur politique dont les résultats pourraient servir d’électrochoc aux Tunisiens pour les dégager lors des scrutins suivants.

Par ailleurs, à l’heure où l’islamisme et les Frères musulmans sont en très nette perte de vitesse, le monde ne laissera pas les obscurantistes faire ce qu’ils voudraient dans le pays. Il n’y a donc, contrairement à ce que l’on vous dira, aucun risque réel.

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