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L’UGTT continue à refuser de lever le voile sur son financement public

Dans une interview au quotidien francophone ‘‘La Presse’’, le magistrat Imed Hazgui, président de l’Instance nationale de l’accès à l’information (Inai), est revenu dans le détail sur la question du financement de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) et de ses états financiers sur lesquels elle refuse de communiquer.

Avec cette attitude suspecte, qui est aux antipodes de la culture de la transparence itinérante à l’ancrage démocratique, l’UGTT nargue la Loi et préfère se morfondre dans l’opacité.

Nous reproduisons ici les réponses de M. Hazgui aux questions relatives à l’UGTT et à l’utilisation de son financement public qu’elle cherche à entourer de secret.

L’UGTT est soumise aux dispositions de la Loi d’accès à l’information:

«Pour retourner à l’affaire qui concerne la centrale syndicale, c’est une décision qui s’inscrit dans le cadre de la jurisprudence constante de l’Inai et qui consiste à considérer que chaque organisme privé qui reçoit d’une manière directe ou indirecte des subventions et des dons de la part de l’Etat ou de l’argent public est automatiquement soumis aux dispositions de la loi d’accès à l’information. On a appliqué cette jurisprudence aux fédérations et associations sportives.»

Aux origines de la requête présentée à l’Instance:

«Pour cette affaire, il s’agit d’une demande présentée par Imed Daimi en tant que personne physique. Ce dernier a demandé les rapports du commissaire aux comptes sur les états financiers de l’UGTT pendant la période 2010/2017 et le rapport financier de son 23e congrès ainsi que la liste des agents publics mis à sa disposition. C’est une demande simple d’accès à l’information mais la centrale syndicale a considéré qu’elle n’est pas soumise au droit d’accès à l’information. Elle a été très coopérative au niveau de l’instruction et elle a répliqué dans un rapport de 18 pages qu’elle n’est pas concernée par la loi et qu’elle ne perçoit pas de l’argent de l’Etat et elle a donc refusé de donner les informations requises au demandeur.»

Comment l’Etat finance-t-il l’UGTT?

Le magistrat a révélé trois procédés de financement de l’UGTT par l’Etat hormis celui des prélèvements obligatoires sur les salaires des agents publics: «De notre côté, on a mené notre propre instruction qui a démontré que la centrale syndicale a reçu de la part de la ‘‘caisse spéciale de l’Etat’’ (créée par la loi de finances en 1975). C’est un fonds qui est géré par la CNSS et c’est uniquement le président du gouvernement qui décide d’octroyer ces montants (avant c’était le Premier ministre). À mon avis personnel, et en tant que magistrat, c’est une anomalie dans le droit tunisien d’avoir ce genre de caisse parce que cet argent échappe à tout contrôle et n’entre même pas dans le budget de l’Etat.

Il s’est avéré que l’UGTT a reçu différents montants qui ont atteint plus de 20 milliards [de dinars tunisiens] durant la période 2010-2017. L’UGTT reçoit aussi, en application du décret datant de 1997 et modifié en 2002, des subventions de la part de l’Etat. Des agents publics sont également mis à sa disposition. Là aussi je parle d’une autre anomalie qui existe dans le droit tunisien, de cette mise à disposition qui n’a pas été prévue du tout par la loi sur la fonction publique tunisienne. C’est une situation aberrante créée par une circulaire qui date des années soixante-dix et dont ont bénéficié des membres du RCD dissout. Maintenant l’UGTT est parmi les plus grands bénéficiaires de ce procédé.

À notre égard et même à l’égard de la jurisprudence administrative (le Tribunal administratif), la mise à disposition est considérée comme un financement public car il y a de l’argent public et des administrations publiques qui payent les agents qui ne font aucun travail pour le compte de l’Etat et sont mis à la disposition de l’UGTT.»

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