Le minimum de décence pour M. Marzouki serait de faire son mea culpa pour toutes les bourdes qu'il a commises, de présenter sa démission et de laisser sa place à un homme capable d'honorer cette lourde et honorable tâche. Mais il préfère transformer Carthage en champ de ruines...
Par Tarak Arfaoui
En grand homme d'Etat, notre cher président provisoire de la république, aussi provisoire soit-il, semble tout mettre en oeuvre pour entrer dans le gotha des hommes célèbres de ce monde tel cet illustre sénateur romain, Caton l'ancien, dont la célèbre exclamation «Carthago Delenda est» (Il faut détruire Carthage ) semble avoir été ressuscitée deux millénaires plus tard par l'actuel locataire de Carthage dont l'une de ses maigres prérogatives semble de tout mettre en oeuvre pour détruire cette vénérable institution qu'est Carthage, fief de la présidence de la république.
Un président inutile et dispendieux
Après son accession, inespérée, à la présidence et tout auréolé de son aura de grand démocrate, de grand opposant à la dictature de Zaba, et de militant acharné des droits de l'homme, Moncef Marzouki a réussi l'exploit en si peu de temps de se discréditer totalement au regard de ses électeurs (moins d'une dizaine de milliers, faut il le rappeler?), de ses alliés de la Troika, de ses proches collaborateurs et de la société civile, en alignant une série invraisemblable de bourdes en tout genre, de décisions ridicules, d'initiatives irréfléchies révélant au grand jour la totale inconsistance du personnage et son incapacité à occuper la plus haute fonction à la tête de l'Etat.
Avec heureusement très peu de prérogatives mais un salaire équivalent à 100 le Smig, un budget présidentiel dépassant largement celui de Zaba, jugé à l'époque exorbitant et encore en augmentation de 15% cette année, avec des escapades à l'étranger tout aussi inutiles et coûteuses les unes et les autres (5 fois plus que son prédécesseur en 3 ans d'exercice seulement!) dans un avion privé dont le budget de fonctionnement coûte 4 millions de dinars par an au contribuable, notre cher président trouve le moyen de vilipender ses compatriotes à l'étranger, de semer le zizanie dans la classe politique tunisienne, et de se distinguer continuellement par ses initiatives incongrues frisant le ridicule.
Clownerie, démagogie et inconscience
Comme au temps de Zaba, où les bouches se sont cousues pendant deux décennies devant les graves dérives du pouvoir qui ont abouti à la situation dramatique qu'on a connue, il serait aussi criminel d'occulter les élucubrations du président Marzouki, qu'il serait fastidieux d'énumérer ici, en se cachant derrière cette sempiternelle légitimité qu'il n'a d'ailleurs pas, ou derrière cette invariable litanie des exigences de la concorde nationale, ce fameux «tawafeq» (consensus) qui a mené le pays vers la banqueroute.
De clownerie en ineptie, les Tunisiens ont commencé par se lasser du grand cirque qui se joue actuellement à Carthage.
La dernière dérive a pris la forme du fameux ''Livre noir'' tiré des archives de la présidence et édité par les services présidentiels est certainement la bourde de trop qui fera sortir M. Marzouki par la petite porte de l'Histoire.
Le minium de décence pour M. Marzouki, s'il a encore un peu de lucidité, et les Tunisiens lui en seraient très reconnaissant, serait de faire un grand mea culpa en présentant sa démission et en laissant sa place à qui de droit pour occuper cette lourde et honorable tâche qu'est la présidence de la république sans clownerie ni démagogie ni inconscience.
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