Tel est le titre d’un article du 4 décembre 2019 portant sur une étude de la chercheuse Judith André publié par »The Conversation », qui met en exergue un état des lieux de la consommation de drogue en Tunisie, ses causes et ses effets notamment sur les jeunes, et sur les mesures prises pour contrer le fléau. Extraits.
La jeunesse tunisienne a vécu de plein fouet les bouleversements de la Tunisie post-révolutionnaire: modernisation, liberté d’expression, etc. Symbole d’une liberté nouvellement acquise, l’usage des drogues s’est propagé après la révolution de 2011, et met un terme à la politique répressive de l’ère Ben Ali.
L’article rappelle qu’avant la révolution de 2011, le discours officiel présentait une société civile sans drogue, consommée pratiquement que par les détenus. «Les premières études épidémiologiques n’apparaissent qu’après la révolution: de 2013 à 2017, l’usage du cannabis a été multiplié par 2,5 et celui d’ecstasy par 7. Les consommations se font au grand jour».
Dès l’école primaire, des enfants sniffent de la colle et fument, puis prennent du cannabis et de l’alcool au lycée, et passent à la kétamine, l’ecstasy, l’héroïne et la cocaïne à l’université. La propagation du fléau est principalement attribuée à la porosité des frontières avec la Libye, la multiplication des réseaux de trafic de drogues et de contrebande. «En 2017, les lycéens sont 25% de plus qu’en 2013, à considérer l’accès à la drogue comme très facile». Pour les garçons mais aussi les filles, c’est une échappatoire surtout à la crise économique qui s’est installée dans le pays.
«Jusqu’en 2016, près du tiers de la population carcérale est constitué de personnes condamnées pour consommation ou détention de produits psychoactifs. Depuis 1992, 120.000 personnes ont connu la prison pour un joint. Ces sanctions représentent un coût humain et financier démesuré pour la société (38 millions de dinars par an selon Human Rights Watch), sans qu’une prise en charge adaptée soit proposée, pendant ou après l’incarcération». Aussi, le parlement a adopté le 25 avril 2017 un amendement à la Loi 52 qui permet aux magistrats de prendre en compte les circonstances atténuantes, ce qui leur permet désormais de prononcer des peines plus courtes, des sursis, ou une simple amende.
Par ailleurs, les centres de soins historiquement répressifs étaient gérés jusqu’en 2011 par les administrations pénitentiaires. Ils sont dorénavant pris en charge par le ministère de la Santé, soutenu par les associations telles que la Société tunisienne d’addictologie (Stadd) qui met également l’accent sur le secteur privé, grâce à la création de nouveaux diplômes universitaires en addictologie et le développement de son activité scientifique. Elle réclame au parlement une législation bienveillante et non punitive.
A. M.
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