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Le vaccin contre le Covid-19, où en est-on ?

Indépendamment de la recherche sur des médicaments capables de neutraliser le Covid-19, dont le grand flop du Remdesivir, un médicament au départ très prometteur, signe malheureusement le caractère aléatoire, la mise au point d’un vaccin demeure évidemment un objectif prioritaire de la recherche sur le Sars-Cov-2, car il éviterait la survenue de la maladie qui serait ainsi éradiquée comme l’avaient été d’autres, telles la variole.

Par Dr Mounir Hanablia *

La course vers la mise au point d’un vaccin a donc déjà commencé avec les enjeux énormes en perspective et le caractère peu mutagène stable du virus ne peut que l’encourager; d’ici la mise au point éventuelle d’un vaccin, de nouvelles souches n’auraient pas le temps de proliférer, contrairement au virus de la grippe.

Le facteur clé de la recherche est donc bien-sûr le temps; l’urgence est de sortir de la pandémie actuelle en raison des pertes sévères en vies humaines qu’elle continue d’occasionner, et de la dépression économique globale qui en a résulté à l’échelle mondiale.

La course contre la montre pour la fabrication d’un vaccin

Dans l’élaboration d’un vaccin, l’objectif est d’obtenir chez l’individu la production d’anti-corps suffisamment efficaces pour protéger l’organisme lors de la mise en contact avec le virus. Une première possibilité est d’utiliser pour cela des virus atténués, c’est-à-dire qui sont vivants mais qui ont perdu leur effet pathogène nocif.

Le problème du vaccin à virus atténué est bien sûr son innocuité; on n’est jamais sûr au départ que le virus affaibli le soit suffisamment pour ne pas entraîner d’effets nocifs, et seule l’inoculation à l’animal puis l’être humain le prouveraient. Et dans la course contre la montre engagée en période de pandémie, cette solution constituerait donc un facteur supplémentaire de pertes.

La seconde possibilité est l’utilisation de morceaux de virus capables d’induire une réponse immunitaire spécifique et efficace lors de contacts ultérieurs. Habituellement on utilise pour cela des morceaux de capside, c’est-à-dire la coque protéique enveloppant le virus. Dans le cas du Covid-19, les spicules de l’enveloppe protéique extérieure permettant l’arrimage du virus sur la cellule humaine constituent la cible de la recherche de choix sur le vaccin.

Les voies empruntées par la recherche pour la production de vaccin sont actuellement au nombre de 4, par l’usage de l’information génétique, qu’elle soit sous forme d’ADN, ou d’ARN :

1- le vaccin à ARN utilisé par la compagnie de biotechnologie américaine, Moderna, fournissant directement l’information génétique aux cellules humaines (musculaires) pour la fabrication de la protéine des spicules virales contre lesquelles l’organisme fabrique les anticorps;

2- le vaccin de Cansino Biologics, société de biotechnologie chinoise, qui utilise pour délivrer l’ARN viral aux cellules humaines des virus incapables de se répliquer, dont l’innocuité sur l’être humain a déjà été testée auparavant, en particulier lors de l’épidémie à Ebola;

3- le vaccin à ADN utilisé par la compagnie américaine Inovio, où l’information pour la fabrication de la protéine des spicules virales, contre lesquelles l’immunisation se produit, est fournie à partir des noyaux des cellules humaines;

4- les vaccins inoculant directement des spicules des cellules virales dans l’organisme pour stimuler la fabrication des anti-corps. C’est la méthode des laboratoires Sanofi et Glaxo Kline Smith et qui utilise aussi des adjuvants de la stimulation immunitaire. Cette méthode a déjà été utilisée avec succès dans l’épidémie à Ebola.

L’opportunité du respect des règles méthodologiques habituelles

Il faut bien-sûr à cet effet signaler la remarquable collaboration entre les laboratoires universitaires, et ceux des grands groupes pharmaceutiques.

Certaines de ces recherches en sont déjà à la phase des essais cliniques, car l’urgence de la situation soulève des problèmes liés à l’opportunité du respect des règles habituelles méthodologiques et éthiques. En effet, celle-ci peut imposer l’utilisation directe du vaccin sans passer par contraintes d’expérimentation habituellement requises.

Il est bien évident que dans cette course à la production du vaccin dont les enjeux financiers sont énormes, les laboratoires de recherche qui possèdent un temps d’avance sur leurs concurrents sont bien ceux qui disposent d’un matériel déjà expérimenté lors de précédentes épidémies. Mais ceci ne constitue pas forcément un gage de sécurité, ainsi que l’avait prouvé en 2009 le vaccin de la grippe ayant occasionné des cas de narcolepsie.

Et d’autre part, comme l’immunité met en jeu deux mécanismes, l’humorale par la fabrication des anti-corps , et la cellulaire par la destruction des cellules infectées par les T lymphocytes, la stimulation de ces derniers ne peut pas être ignorée dans la perspective de l’optimisation de l’efficacité du vaccin, et nécessite aussi une phase d’expérimentation, d’autant que par le passé, pour d’autres virus, les adjuvants aux vaccins censés l’obtenir ont posé problème, et ont même contribué à susciter auprès du public des rumeurs et à mettre en échec des campagnes de vaccination, en particulier en France (H1N1) en 2009.

Le problème de la disponibilité large du vaccin

Evidemment il est très peu probable qu’avec toutes les répercussions qu’a entraînées l’actuelle pandémie au Covid-19, il se trouve encore des personnes pour refuser la perspective d’un vaccin qui aurait autant l’avantage de les protéger, que de leur faire quitter les contraintes du confinement et de leur permettre un retour à leurs activités normales.

Mais c’est le problème de la disponibilité large du vaccin qui risque de faire problème, les pays les plus puissants s’en réservant bien entendu le prime usage d’abord pour leurs propres populations.

Dans le cas où un vaccin finissait par être découvert, ce qui malgré tous les espoirs, n’est toujours pas le cas actuellement, et dans la perspective de sa production industrielle, si jamais il devenait disponible, il faudrait donc s’attendre à ce que les pays sous-développés n’en disposent que plusieurs mois après le début de sa mise en production.

Ce serait un autre reflet de l’injustice de l’ordre international, et de sa pérennisation, que les nations qui aient le plus contribué à la propagation du virus, soient celles-là mêmes qui s’en prémuniraient les premières. Mais il demeure tout de même douteux que, dans le cas où la recherche sur le vaccin n’aboutisse pas, la solution du président Trump, celle de s’injecter du gel antiseptique dans les veines, soit la bonne.

* Cardiologue, Gammarth, La Marsa.

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