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Evasion de capitaux : Les planques prisées des Tunisiens

Evasion-fiscale

Le gouvernement ne fait pas grand-chose pour identifier les sites mondiaux dans lesquelles des Tunisiens dissimulent leurs avoirs financiers et actifs patrimoniaux.

Par Mohamed Chawki Abid *

L’encours de la fuite des capitaux de la Tunisie est actuellement évalué à 50 milliards USD**, et les autorités tunisiennes donnent l’impression d’ignorer le volume colossal des capitaux évadés à l’étranger susceptible de consolider les équilibres extérieurs du pays et de reconstituer le matelas de réserves en devises.

Au lieu que les gouvernements post-2011 fassent de la lutte contre la fuite des capitaux l’une de leurs principales priorités de leur politique économique (avec la fraude fiscale estimée à plus de 10 milliards de TND par an), chaque équipe a préféré se montrer indulgente avec les mafias de la délinquance économique, et s’est focalisée sur la quête de ressources extérieures en engageant des démarches anti-souverainistes principalement avec les fonds vautours pour l’injection de dettes toxiques destinées à financer la consommation (titre 1 du budget de l’Etat + déficit courant + service de la dette extérieure).

Il est nécessaire d’identifier les sites mondiaux dans lesquelles les criminels tunisiens dissimulent leurs avoirs financiers et actifs patrimoniaux, provenant de plusieurs sources : fuite de capitaux, surfacturation d’importations, sous-facturation d’exportations, commissions sur marchés publics, blanchiment d’argent sale, trafic de produits illicites, prestations fictives, factures de complaisance, etc.

Pour ce faire, il est judicieux de connaitre les paradis fiscaux qui ne figurent pas dans la liste tunisienne des «zones interdites». C’est là où nous devrions trouver une concentration des délinquants tunisiens, tous crimes confondus. Par exemple, les businessmen tunisiens ne courent pas grand risque avec les Seychelles,  les Iles Maurice et le Bahamas,, trois pays non black-listés en Tunisie.

Signalons que l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) considère comme «paradis fiscal» (États et territoires non coopératifs) tout pays répondant aux trois critères suivants: la taxation sur le capital nulle ou insignifiante; l’absence de transparence; et l’insuffisance de collaboration informationnelle avec les Etats étrangers.

L’OCDE a établi une liste de 45 pays répondant à ces critères, mais les ONG affirment qu’il en existe près d’une centaine. Naturellement, la plupart des pays concernés nient toutefois être un paradis fiscal.

La carte suivante retrace les pays qui figurent sur la plupart des listes noires établies par les organisations internationales (OCDE, GAFI, ONG).

Carte-des-paradis-fiscaux

Qualifiés d’Antimonde, ces paradis sont réputés pour encourager l’évasion fiscale, des règles laxistes ou le contournement des règles, et contribuer à l’augmentation des inégalités dans le monde.

Aujourd’hui, plus de 90 pays ont adopté un standard global d’échange automatique d’information qu’ils mettront en place d’ici 2017 ou 2018. La question qui se pose maintenant c’est quelle est l’état d’avancement de sa mise en œuvre en Tunisie?

* Ingénieur économiste.

** PERI estime à 39 milliards $US le cumul de la fuite de capitaux tunisiens entre 1970 et 2010, dont plus de 87% ont été détournés pendant le règne de Ben Ali. L’actualisation à un taux sans risques de ces capitaux porterait le stock à 45 milliards $US, soit 3 fois sa dette extérieure à fin 2010. Ainsi, et après intégration des évasions colossales tolérées depuis 2011 (au moins 5 milliards $), plutôt que d’être aujourd’hui endetté à 20 milliards $US vis-à-vis de l’étranger, la Tunisie serait un pays «cash rich» à hauteur de plus de 30 milliards $ (50 – 20), déduction faite de sa dette extérieure.

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