La nouvelle loi sur l’investissement présentée aux membres des chambres mixtes de commerce et d’industrie. Un réel vecteur d’impulsion économique.
Par Wajdi Msaed
La nouvelle loi sur l’investissement et ses décrets d’application ont été l’objet, mercredi 26 avril 2017, d’un petit-déjeuner débat organisé par les chambres mixtes de commerce et d’industrie de la Tunisie avec la France, l’Allemagne, l’Italie, la Hollande, la Suisse, la Belgique-Luxembourg, la Grande Bretagne, les Etats Unis et le Japon. C’est dire l’importance capitale que revêt le sujet auprès de tous ces pays, d’où proviennent les principaux investisseurs extérieurs en Tunisie et qui sont dans l’attente de textes clairs et précis pour mieux orienter leurs investissements dans notre pays et participer à la consolidation de sa transition démocratique par un essor économique, tant souhaité en cette période difficile d’incertitudes et de tensions sociales.
Force d’impulsion et vecteur d’alerte
Fouad Lakhoua, président de la Chambre tuniso-française pour le commerce et l’industrie (CTFCI), a indiqué, dans une allocution d’ouverture, que «les huit chambres qui ont initié ce projet entendent poursuivre leurs concertations et leurs échanges sur toutes les questions qui touchent de près ou de loin à l’investissement et à l’environnement des affaires afin d’assumer leur mission en tant que force d’impulsion, de proposition et un vecteur d’alerte pour les pouvoirs publics». Ces derniers doivent être avertis, selon l’expression de M. Lakhoua, «lorsque l’acte d’investir devient plus difficile ou plus complexe et lorsque l’environnement de l’entreprise s’érige en un obstacle à l’initiative ou, tout simplement, à la poursuite normale de l’activité», et brouille ainsi, aux yeux des investisseurs, l’image de la destination Tunisie.
Dans cette optique d’interaction positive, M. Lakhoua annonce la création prochaine d’un conseil des chambres mixtes qui jouerait un rôle d’ interface entre les différents acteurs économiques en Tunisie en vue d’aplanir les difficultés et de faire avancer les choses.
Beaucoup reste à faire
Toutefois, et tout en se félicitant des réformes adoptées et notamment la nouvelle loi sur les investissements, qualifiée d’importante, qui a mis un terme à une longue attente et offert un cadre réglementaire simple et transparent permettant de stimuler l’investissement en Tunisie, le président de la CTFCI a estimé que «dans le contexte actuel, tendu et empreint d’incertitudes, beaucoup reste à faire pour restaurer la confiance des opérateurs qui ne voient pas les choses bouger dans la bonne direction».
M. Lakhoua évoque, dans ce contexte, «à la dégradation de l’environnement de l’entreprise, au laxisme et à la baisse des performances de l’administration, à l’instabilité du cadre fiscal, au grand retard qu’accuse, notamment, le secteur de la logistique du transport, la volatilité du dinar, l’hésitation à appliquer la loi et la persistance des tensions sociales».
Autant de facteurs qui alimentent le doute, « qui commence à doucher les espoirs nés de la conférence internationale Tunisia 2020» et sur lesquels «il faut agir avec célérité et rigueur pour conférer à la nouvelle loi consistance et efficience», a insisté M. Lakhoua.
Mohamed Fadhel Abdelkefi: optimisme, volontarisme, pragmatisme.
De bonnes nouvelles dans la grisaille
Mohamed Fadhel Abdelkefi, ministre du Développement, de l’Investissement et de la Coopération internationale, qui a présidé la séance, a affiché, au contraire, un certain optimisme qu’il a voulu tranquillisant, en annonçant les bonnes nouvelles sur lesquelles il convient de capitaliser en vue de donner de l’élan au milieu des affaires et aider à réamorcer le flux des investissements. Il a révélé, dans ce contexte, le dernier accord avec le FMI pour le décaissement de la seconde tranche du prêt convenu avec la Tunisie en 2016 et le signe positif qu’il donne aux autres bailleurs de fonds, ainsi que la série de réformes économiques adoptées par l’Assemblée et les promesses de la conférence internationale Tunisia 2020.
«Rationnel et optimiste, je le suis effectivement, et j’essaie de l’être le plus longtemps possible», a dit M. Abdelkefi. Tout en reconnaissant que la situation que traverse actuellement le pays est particulièrement compliquée, le ministre a assuré que l’«on peut faire mieux, eu égard à l’amélioration de certains indicateurs, comme ceux relatifs aux investissements directs étrangers (IDE) qui ont augmenté de 18 % au premier trimestre 2017 en comparaison avec la même période de 2016».
«Nous sommes en situation de guerre économique, s’ajoutant à la guerre menée contre le terrorisme qui a nécessité des budgets exceptionnels pour consolider notre arsenal miliaire et sécuritaire», a rappelé M. Abdelkefi, tout en niant l’existence d’une instabilité fiscale. Il s’agit, selon lui, de quelques modifications temporaires apportées au cadre fiscal, demeuré inchangé de 1972 à 2016, qui ont créé un «choc émotionnel» auprès des sociétés off-shore, passées d’une exonération totale à un taux de 10% avec, en sus, une imposition conjoncturelle de 7,5% sur les bénéfices.
Une feuille de route opérationnelle
Surfant sur une vague d’optimisme pragmatique et volontaire, le ministre du Développement, de l’Investissement et de la Coopération internationale a mis en exergue l’effort du gouvernement depuis 2011 pour relever les défis de la relance économique. En effet, a-t-il dit, dans ce contexte, «depuis cette année, des centaines de millions de dinars ont été investis dans les régions intérieures pour lutter contre le déséquilibre de développement et l’instabilité sociale».
«Ce n’est peut-être pas assez, mais on ne peut pas dire que rien n’a été fait et on ne peut pas demander à un gouvernement de tout faire en 8 mois, sachant que c’est le premier à avoir adopté une certaine orthodoxie en matière macro-économique», a encore indiqué le ministre, par allusion aux facilités que se sont accordées, dans ce domaine, les précédents gouvernement, pour calmer la grogne populaire : recrutements massifs dans la fonction publique, augmentations successives des salaires, etc. «C’est compliqué et pénible, mais nous y sommes engagés et notre feuille de route sera opérationnelle à partir du mois de juin prochain», a-t-il assuré.
Tout en se félicitant de la solidarité manifestée par les chambres mixtes envers notre pays, M. Abdelkefi, a lancé aux présents, guise de conclusion: «Vous êtes nos ambassadeurs auprès de vos pays respectifs».
Khalil Laabidi: l’investissement est libre.
Positionner le pays sur les chaines de valeur
Khalil Laabidi, DG de l’Agence de promotion des investissements étrangers (Fipa), promu récemment président de l’Instance tunisienne de l’investissement, a eu la rude tâche de présenter les axes, objectifs et portée de la nouvelle loi de l’investissement, faisant remarquer qu’ils sont en harmonie avec les objectifs du plan 2016-2020, récemment adopté par l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).
En effet, cette loi cible le développement régional, l’emploi et employabilité, et la recherche et développement. Elle vise, en outre, à impulser les exportations et à positionner la Tunisie sur les chaînes de valeurs.
S’agissant de l’accès aux marchés, le nouveau texte stipule que l’investissement est libre et soumet les autorisations à une hiérarchie décentralisée selon la grandeur de l’enveloppe à investir.
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