L’Union européenne (UE) a été mal inspirée en désignant la Tunisie comme «paradis fiscal» et serait ainsi en train de saper son propre combat antiterroriste.
Par Marwan Chahla
C’est ce qu’a rapporté hier, mercredi 3 janvier 2018, le quotidien économique britannique ‘‘The Financial Times’’ (‘FT’), en citant plusieurs analystes qui «s’accordent sur le fait que la désignation, début décembre dernier, de la Tunisie comme étant un des 17 territoires ‘non-coopératifs’ dans la lutte contre l’évasion fiscale cadre mal avec le soutien européen à cet Etat d’Afrique du nord, porte atteinte aux efforts consentis par ce pays dans sa lutte contre le terrorisme, freine l’attraction des investissements étrangers et nuit au traitement des retombées négatives de l’instabilité qui prévaut en Libye voisine.»
Pour Francis Ghilès, chercheur principal associé auprès du Centre de Barcelone pour les affaires internationales (Cidob) que cite le ‘‘FT’’, «punir un pays comme la Tunisie, ainsi que le fait l’Union européenne, traduit mal une politique de voisinage de Bruxelles bien réfléchie.»
Le ‘‘FT’’ rappelle également que, le mois dernier, dans une correspondance qu’il a reçue, Francis Ghilès et un collectif de personnalités du monde des finances et des affaires et d’anciens ministres européens, ont dénoncé «la méconnaissance dont a fait preuve l’UE de la politique de la Tunisie et la menace que cette mauvaise lecture fait peser sur l’appui du bloc européen à la jeune démocratie tunisienne.»
Un haut responsable de l’UE favorable à la Tunisie, dont le ‘‘FT’’ ne révèle pas l’identité, estime que notre pays devra être retiré de cette «liste noire» des paradis fiscaux avant la visite du président Emmanuel Macron, prévue pour le mois prochain.
Selon cette source anonyme, la diplomatie tunisienne proposera à l’UE un ensemble de mesures de rectification qui seront soumises à la réunion de ses ministres des Finances, le 23 janvier prochain, et qui répondront aux préoccupations soulevées auprès de l’UE par les régimes fiscaux de notre pays et ses services financiers.
D’après ce diplomate européen anonyme, le blacklisting de la Tunisie est notamment imputable à «la mauvaise gestion des délais par Tunis»: il explique que, selon les réglementations de l’UE, les régimes fiscaux spéciaux à l’exportation de la Tunisie et ses services financiers ont été, depuis un certain temps déjà, considérés comme des «régimes fiscaux préférentiels dommageables» et l’offre de réforme que notre pays a proposée a été tardive. Ainsi, devrions-nous comprendre, une meilleure préparation de la Tunisie aurait pu lui permettre de figurer sur une «liste grise» de moindre gravité, lui aurait accordé de la latitude pour mettre en œuvre les réformes dont elle a grand besoin et de lancer un signal positif aux investisseurs étrangers.
Ce serait, donc, une simple affaire de réactivité…
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