En plus du glissement continu de la monnaie nationale, le dinar (DT), qui ne profite qu’à nos partenaires étrangers notamment européens avec lesquels nous traitons 75% de nos opérations commerciales, nous assistons présentement en Tunisie à un glissement d’une autre ampleur, celui du PIB.
Par Mohamed Rebai *
Théoriquement, la dévaluation d’une monnaie locale peut aider à «booster» les exportations en vue d’assurer un meilleur équilibre de la balance commerciale. Or comme, on le sait, dans notre pays, la production et l’exportation n’ont pas suivi, comme celles des phosphates et dérivés.
La solution, la meilleure, serait évidemment de réduire les importations superflues. Mais nos décideurs semblent porter des œillères sur ce point et deviennent autistes face à nos remarques et suggestions.
Ceci en ce qui concerne les conséquences du glissement du DT. Mais on doit parler désormais aussi, dans notre pays, d’un autre grave problème, celui du glissement du produit intérieur brut (PIB).
Une fin d’année 2019 difficile se profile à l’horizon
En effet, d’après l’Institut national de la statistique (INS), la croissance du PIB réalisée au premier trimestre 2019 (1,1%) est en glissement de 0,1% par rapport au quatrième trimestre 2018. Le budget de l’Etat table sur une croissance du PIB de 3,1% en 2019. Evidemment, la performance mitigée du premier trimestre de 2019 augure d’une année difficile.
Tout le monde devient fataliste dans ce pays livré à lui-même. On attend l’heure de prière, on attend la pluie, on attend la paie, on attend des sous des bailleurs de fonds et on attend les élections de 2019… pour ne rien faire. Puisque tout est presque à l’arrêt en ce mois ramadan qui s’étire sous le signe de la somnolence et de l’inaction.
Le World Economic Outlook du Fonds monétaire internationale (FMI) est pourtant plus optimiste qu’auparavant en ce qui concerne la Tunisie. Il table sur une croissance de 2,7% pour l’année 2019.
En résumé, les performances de la Tunisie en matière de PIB sont en-deçà des prévisions et, fait nouveau et surprenant, elles sont inférieures à la moyenne mondiale (3,3%), des pays émergents (4,4%) et de l’Afrique subsaharienne (3,5%), sans parler du Rwanda (7,8%) et de l’Ethiopie (8,2%) qui émergent du lot et qui étaient, il y a seulement quelques années, plus misérable que les chutes où ils vivaient.
Les Tunisiens consomment et ne produisent plus grand-chose
Calculé en dollar, le PIB tunisien glisse en moyenne de 1,1%. Il devrait passer de 39,91 milliards de dollars en 2018 à 36,2 milliards en 2019 pour atteindre les 35,15 milliards en 2020. Alors que le PIB par habitant est tombé de 4300 dollars en 2010 à 3420 dollars en 2018.
Que voulez-vous de plus, notre pays est classé 30e parmi les pays les plus misérables de la planète. À ce rythme, on va se faire harakiri nous-mêmes et plus personne ne nous aidera pour sortir notre pays des griffes des carnassiers qui l’ont pris en tenaille.
Qui doit-on remercier pour cette prouesse ? Ceux qui ont gouverné depuis la révolution de 2011, c’est-à-dire la «troïka», la coalition gouvernementale conduite par Ennahdha, qui a dilapidé des milliards de dinars en compensations, primes et salaires pour ses troupes, Nidaa Tounes, qui s’est allié avec le parti islamiste depuis 2015 pour poursuivre la même saignée. Et bien sûr, les Tunisiens qui consomment et ne produisent plus grand-chose, parce qu’ils le travaillent plus.
* Economiste.
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