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La convention sur la Zleca pourrait être adoptée dans les délais !

La convention de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zleca), rejetée par l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) faute de quorum, pourrait être examinée de nouveau, dans les délais requis pour peu que le président de l’ARP, Rached Ghannouchi, exerce ses prérogatives prévues par le règlement intérieur du parlement.

Par Khémaies Krimi

En effet, selon ce règlement, Ghannouchi est habilité à convoquer une séance plénière pour débattre une seconde fois du projet de loi relatif à la convention, qui a été ratifié, au niveau gouvernemental, le 21 mars 2018, à Kigali (Rwanda), et l’adopter à une majorité acceptable. L’adoption de cette convention permettra à la Tunisie d’être au rendez du lancement opérationnel de cet accord, en juillet 2020, au Tchad. Ce rendez-vous sera précédé de la tenue, en mai prochain, en Afrique du sud, d’un sommet extraordinaire de l’Union africaine consacré à ce dossier.

Possibilité d’être au rendez-vous de juillet 2020 au Tchad

L’enjeu réside dans le fait que la première commission de la Zleca, qui tiendra sa réunion en juillet 2020, sera consacrée au libre échange intra-africain des services, principal créneau dans lequel la Tunisie détient des avantages compétitifs certains. Il s’agit, particulièrement, des TIC, de l’enseignement supérieur, du tourisme médical, de la formation paramédicale, des bureaux d’études et des travaux publics.

Par-delà cette possibilité de rattrapage, il faut reconnaître que ce rejet qualifié de «crime contre les intérêts du peuple tunisien» et d’«acte irresponsable de la part des députés», a permis aux médias de s’informer sur les circonstances malheureuses dans lesquelles cette convention a été négociée et présentée au parlement.

Ce document de 75 pages, du moins tel qu’il est disponible sur le net, a été présenté en quatre feuillets aux députés, ce qui ne leur a pas permis de s’informer de manière exhaustive sur la démarche suivie pour négocier et mettre au point cette convention.

Abstraction faite de l’inadmissibilité de l’absence, le jour de l’examen de cette convention, d’un grand nombre de députés, notamment ceux appartenant aux partis qui soutiennent le gouvernement Elyès Fakhfakh, il faut reconnaître que les députés de l’opposition, qui se sont abstenus ou se sont opposés à cette convention, sont dans leur droit.

Les détracteurs des conventions de libre échange n’ont pas toujours tort

Ces derniers estiment qu’ils doutent de l’efficience de ces conventions d’autant plus que les accords de libre échange antérieurs conclus aux niveaux multilaléral (OMC), régional (Union européenne) et bilatéral (zone de libre échange avec la Turquie) ont été catastrophiques pour la Tunisie.

Ils ont été pour la plupart à l’origine, non seulement, de l’aggravation du déficit courant estimé, actuellement, à plus de 17 milliards de dinars contre 8 milliards de dinars en 2010 mais également de la déstructuration du tissu industriel du pays avec la fermeture de milliers de PME tunisiennes. La filière textile-habillement a perdu à elle seule 1000 entreprises sur la période 2007-2019, et ce, selon des statistiques officielles.

Cette situation calamiteuse a été générée, en grande partie, par l’incompétence des négociateurs tunisiens. Ces derniers ont négocié ces accords sans prévoir, en amont, des stratégies industrielles et agricoles devant permettre aux opérateurs et prestataires de services tunisiens de tenir la concurrence et de s’imposer à l’international.

À titre indicatif, l’asymétrie de l’accord de libre échange conclu avec l’Union européenne pour les produits manufacturés s’est traduite par un manque à gagner de moins de 2% de croissance pour la Tunisie.

Idem pour la convention de libre échange avec la Turquie, la Tunisie qui ne produit pas des produits manufacturés compétitifs s’est trouvé dans l’obligation de subir le diktat des opérateurs turcs et de voir son marché inondé, par l’effet du dumping, par des produits turcs.

Là aussi, le résultat est le même : le déficit commercial s’est aggravé avec ce pays tandis que des centaines d’entreprises locales ont été amenées à passer la clef sous la porte.

Pour les députés opposés à cette convention, la Tunisie pourrait se trouver dans la même situation avec la Zleca. Ils estiment qu’en l’absence de stratégies claires en matière d’internationalisation des entreprises tunisiennes et de conquête de marchés extérieurs, le marché tunisien pourrait être envahi, au nom du libre échange, cette fois-ci intra-africain, par des produits provenant de pays plus compétitifs, comme l’Afrique du Sud, l’Egypte, le Maroc…

La Tunisie à la 4e place en Afrique en matière de tourisme médical

Pour ne citer qu’un seul exemple de compétitivité des pays africains concurrents à la Tunisie en matière de tourisme médical, un pays comme l’Egypte a investi, en prévision de l’opérationnalité effective de la Zleca, 1,2 milliard de dollars pour la construction d’une cité dédiée au tourisme médical. Cette cité sera localisée dans la ville de Badr City, au nord-est du Caire.

Par contre, en Tunisie, destinations confirmée de tourisme médical, aucun projet d’envergure ne pointe à l’horizon. Mêmes les cliniques existantes ne sont pas pour l’écrasante majorité accréditées. Le dernier Indice du tourisme médical (MTI), indice composite calculé sur la base de la qualité des prestations, l’innovation, les délais, les prix, la proximité et la permissivité, classe la Tunisie à la 4e place en Afrique après l’Afrique du Sud, l’Egypte, le Maroc et à la 36e place dans le monde sur un total de 41 pays listés.

Autrement dit, la Tunisie est peu accessible aux patients africains. Et lorsqu’elle en attire, c’est tout juste de petits marchés, les gros marchés comme le Nigeria, la République démocratique du Congo, le Soudan, le Gabon lui échappent presque totalement.

Pis, la mobilité entre Tunis et les capitales africaines laisse à désirer. Le transporteur public, Tunisair, après avoir pris des initiatives pour densifier, en 2019, son réseau de dessertes sur le continent en Afrique, a été obligé pour des raisons de difficultés financières, de supprimer, fin mai 2019, des dizaines de vols réguliers sur l’Afrique.

Ainsi, les avantages que les hommes d’affaires partisans de la Zleca et les ministres complices miroitent (réduction des droits de douane, un marché de 1,2 milliard de personnes, représentant un PIB de 2.500 milliards de dollars) ne sont en fait que des subversions pour mouiller un marché tunisien fragile qui ne produit rien ou presque de compétitif à l’international.

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