La chute de la valeur du dinar tunisien face aux devises étrangères et la hausse des prix sur les marchés internationaux ont provoqué des crises dans divers secteurs économiques en Tunisie, notamment l’agriculture. La filière laitière, par exemple, pourrait faire les frais du renchérissement des coûts de production et de la baisse attendue de la production au cours de cette année 2022.
Le directeur du département de la production animale de l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (Utap), Mnaouar Sghairi, cité par Mosaïque, a mis en garde contre la possibilité que la filière laitière connaisse une grave crise au cours de cette année 2022, d’autant plus que les quantités produites pourraient enregistrer une baisse significative pendant la période de pic de la production, attendue entre mars et fin août.
M. Sghairi a aussi alerté sur la possibilité qu’un certain nombre d’éleveurs bovins soient contraints de quitter le secteur. Ce qui provoquerait leur exode vers les grandes villes et constituerait une nouvelle charge économique et sociale pour l’Etat.
Selon lui, la baisse enregistrée actuellement dans la production de lait est sans précédent en Tunisie, qui ne l’avait pas enregistré auparavant durant cette période, généralement caractérisée par une baisse de production.
Le directeur du département de la productions animale de l’Utap a indiqué que l’année en cours pourrait ne pas connaître une crise de surproduction laitière qui nécessiterait le recours au mécanisme du séchage, considérant que la situation de la filière laitière peut être qualifiée aujourd’hui de critique.
M. Sghairi a regretté l’absence à ce jour de réunion de travail entre l’Etat et les acteurs du secteur laitier pour étudier les moyens de prévenir les difficultés pouvant survenir à l’avenir en raison d’une crise de production attendue pour l’année en cours.
M. Sghairi a aussi appelé à subventionner certains aliments et à revoir la politique des prix dans le système laitier, de manière à permettre à l’éleveur de couvrir son coût réel de production, tout en y ajoutant une marge bénéficiaire qui lui permettrait de résister et de survivre, et d’éviter l’effondrement du système de production et de garantir sa pérennité.
M. Sghairi a estimé que le recours à l’importation du lait coûterait à l’Etat pas moins de 2 500 millimes par litre, ce qui représenterait une perte importante pour le pays et un soutien direct aux producteurs étrangers.
Le directeur du Département de la production animale de l’Utap a aussi estimé que la subvention orientée au cycle de production protège l’agriculteur, le consommateur et préserve la décision souveraine de l’État.
M. Sghairi a souligné les difficultés actuelles du système de production laitière en Tunisie, qui traverse actuellement l’une de ses pires périodes pour plusieurs raisons, notamment la sécheresse qui a duré trois ans, et sa coïncidence avec la crise de la production fourragère. et son coût élevé au niveau mondial, compte tenu de l’effondrement de la valeur du dinar tunisien par rapport aux devises étrangères.
M. Sghairi a aussi déclaré que les prix des aliments composés en Tunisie ont connu une hausse sans précédent, car le prix d’une tonne d’aliments a connu, au cours de 2021, une augmentation estimée à 200 dinars, soit 22% par rapport aux niveaux des prix de l’année précédente, alors que le prix du lait est resté stable, puisqu’il est vendu par le producteur autour de 1 140 millimes par litre, à une période où le coût moyen est de 1 520 millimes par litre, ce qui signifie que l’agriculteur essuie une perte par litre de lait produite estimée à 380 millimes.
M. Sghairi a ajouté que cette situation avait conduit l’agriculteur à ne pas respecter les méthodes techniques recommandées pour nourrir les vaches avec les quantités et les aliments nécessaires, tandis qu’un certain nombre d’autres agriculteurs ont vendu leur troupeau et alimenté ainsi la contrebande vers les pays voisins, ce qui a eu pour conséquence d’induire une pénurie importante de lait coïncidant avec la période de baisse de production, entre septembre et février de chaque année.
I. B.
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