L’argent a plusieurs synonymes en français : blé, flouze, fric, grisbi, oseille, pactole, pépètes, pognon, roupie, brique, caillasse… mais aussi thune, mot issu de «touness» ou Tunis. Et en argot français, un Tunisien se dit un Tunard ou un Tunar. Un Tunar sans thunes, est-ce imaginable ? Impossible n’est pas Tunisien…
Par Abdellaziz Guesmi *
La thune c’est précisément une pièce de cinq francs. «Je suis sûr qu’elle nous prêtera quatre ou cinq tunes de cinq balles» (Vidocq, Mémoire).
Sans une thune, c’est être sans un sou. «Ne plus avoir une thune en poche. Tout un peuple de déchards (…) de petites pauvresses (…) qui trouvent chez elle la pâtée et la thune» (Colette).
Le «grand Coësre», c’est-à-dire le chef de ces brigands à la Cour des Miracles, est surnommé «roi de Thunes». C’est une référence au Roi de Tunis qui n’était pas bien riche et ce titre lui donne une certaine prestance et grandeur. Le «roi de Thunes» est également reconnu comme le prince de l’argot.
On voit l’apparition du mot thunes dès 1628. À cette époque, plus de 30 000 faux mendiants quêtent dans la capitale française. Et quoi de mieux pour attirer regards, pitié et donations que de simuler une infirmité. De retour le soir dans leurs lieux de vie, quartiers souvent mal famés et repoussants, ils peuvent enfin se dépouiller de leurs costumes.
Ainsi disparaissent, dans cette Cour des Miracles, les faux aveugles, faux mutilés ou faux boiteux. «Au Moyen Age, la Cour des Miracles était une cour parisienne abritée par la rue Saint-Sauveur, la rue de la Mortellerie et la rue de la Truanderie. La police ne venait que rarement dans ce quartier délabré et sombre. La Cour logeait des mendiants, des aveugles, des paralysés, des nains et toutes sortes de personnages…».
Sans transition aucune, le Fonds monétaire international (FMI), que les Tunisiens sollicitent depuis deux ans pour un nouveau prêt de 1,9 milliard de dollars, devrait savoir que les Thunards ne veulent pas d’aumône, mais simplement des thunes, en prêt avec intérêts, pour passer un mauvais cap. Et les mauvais caps pour les Tunars, ça n’arrête pas depuis un certain 14 janvier 2011, dont (tiens!) on célèbrera demain le 12e anniversaire.
Honni soit qui mal y pense !
* Proviseur à Grenoble.
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