La 34e édition des Journées de l’Entreprise, grand messe annuel des entrepreneurs tunisiens, se tiendra les 6 et 7 décembre 2019, à Sousse, sous le thème on ne peut plus actuel, surtout en ces temps de grave crise socio-économique : «L’entreprise & le nouveau rôle de l’Etat».
Par Imed Bahri
Il s’agit, on l’a compris, de redéfinir les rôles des principaux acteurs économiques, publics et privés, de revoir les termes du contrat les unissant et d’exposer leurs attentes réciproques dans une perspective de relance de la machine de production, de création de richesses et d’emploi.
Cette 34e édition revêt un caractère particulier, car elle intervient à un moment charnière, celui de l’inauguration de deux nouveaux mandats exécutif et législatif avec, en arrière-fond, de gros enjeux, notamment sur les plans économique et social, représentant aujourd’hui le plus gros défi pour la transition démocratique tunisienne, en panne d’idées, de propositions et de solutions aux grands problèmes de la nation : chômage endémique, inégalités sociales et régionales, croissance atone, aggravation de l’endettement, creusement des déséquilibres macroéconomiques, essoufflement du modèle de développement…
Sacrifices et bénéfices équitablement répartis
Face à une transition économique qui piétine et menace de provoquer des mouvements sociaux et, leur corollaire, une instabilité politique dont notre pays se passerait volontiers, il s’agit de s’accorder sur les mesures urgentes, les plans de relance et les moyens à mettre en œuvre pour réussir le difficile processus de sortie de crise et, dans ce contexte contraignant, redéfinir les rôles, les missions et les synergies positives pouvant associer toutes les parties prenantes et leur permettre de tirer le meilleur parti d’une relance globale où public et privé jouent une partition harmonieuse et où les sacrifices et les bénéfices sont équitablement répartis.
On comprend dès lors que, pour cette édition, les pouvoirs publics seront plus fortement représentés qu’habituellement, avec la participation du président de la république, Kaïs Saïed, qui prendra la parole lors du panel d’ouverture sur le thème : «Crise politique : pour un Etat efficace». Ce sera pour lui l’occasion d’exposer la vision du rôle qui est le sien pour garantir la stabilité et l’efficacité des institutions publiques et l’implémentation des réformes structurelles annoncées et qui peinent à être mises en route, en raison des résistances de toutes parts et de toutes sortes.
Un seul mot d’ordre : sortir de la crise
M. Saïed aura à ses côtés de prestigieux anciens dirigeants, notamment Ameenah Gurib-Fakim, ancienne présidente (Île Maurice), Abdullah Gül, ancien président (Turquie), Alexis Tsipras, ancien Premier ministre (Grèce), Jean-Pierre Raffarin, ancien Premier ministre (France), qui est également un ami de la Tunisie et un habitué des Journées de l’Entreprise, Beverley Schäfer, vice-présidente du Parlement et ancienne ministre des Opportunités économiques (Afrique du Sud), Dirk Niebel, ancien ministre de l’Economie et du Développement (Allemagne), ou encore Rene Tammist, ancien ministre de l’Entrepreneuriat et de la Technologie d’information (Estonie).
Ces Journées de l’entreprise proposent aux participants, tunisiens et étrangers, responsables institutionnels, experts économiques et financiers, et dirigeants d’entreprises, invités à ses quatre panels, des thèmes liés à l’actualité tunisienne: «Crise économique et rôle de l’Etat»; «Crise sociale : quel modèle d’inclusion adopter ?»; «Crise technologique et transformation digitale de l’Etat» et «Crise des valeurs: vers un Etat régulateur».
La récurrence du terme «crise» renvoie à une urgence pressante et à une volonté partagée de se débarrasser le plus vite possible de ce boulet de fer qui empêche la Tunisie de renouer avec la confiance et de retrouver les ressources nécessaires pour rebondir et réaliser des taux de croissance de 5 à 6%, qui furent les siens entre 1991 et 2008, les seuls susceptibles de graisser la machine de l’investissement, de la production, de l’exportation et de l’emploi.
Un contrat social toujours renouvelé
Autour de Taieb Bayahi, président de l’IACE, on retrouvera, parmi les intervenants, Habib Karaouli, Pdg de Cap Bank (Tunisie), Ferid Belhaj (Banque Mondiale), Paulo Carmona, président du Forum des administrateurs et des manageurs (Portugal), Leila Ben Gacem, entrepreneure sociale (Tunisie), Ghazi El-Biche (CEO, Van Laack, Tunisie), Houbeb Ajmi, directrice générale de l’Université Centrale (Tunisie), Ravindra Adi, président de la Fondation Smart Cities (Inde), Willem Clappaert (IBM), Ghassen Ben Aissa, directeur général de C- Logistic (Tunisie), Nicola Ehlermann, experte en Anti-Corruption (France), sans oublier Wided Bouchamaoui, ancienne présidente de l’Union de l’industrie, du commerce et de l’artisanat, et Houcine El-Abassi, ancien secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail, deux lauréats du Prix Nobel de la paix en 2015, pour leur rôle dans le Dialogue national ayant sorti la Tunisie de la grave crise ayant menacé sa stabilité en 2013 après les assassinats des deux dirigeants politiques Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi.
La présence de ces deux personnalités issues respectivement des mondes jumeaux et complémentaires de l’entrepreneuriat et du travail est d’autant plus utile pour l’intelligence du débat que toute réflexion sur l’économie tunisienne a, aujourd’hui comme hier, une forte connotation sociale mettant en œuvre des enjeux d’inclusion, d’arbitrage et de répartition des ressources, dans le cadre d’un contrat social toujours renouvelé.
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