Kerkennah, martyrisé depuis quelques jours, retrouve enfin, son calme. Pour combien de temps encore ? Et quelles leçons à tirer d’un pareil drame?
Par Salah El-Gharbi
Selon certaines sources sécuritaires, les émeutes de Kerkennah seraient orchestrées par des « jihadistes», des anciens activistes ayant bénéficié de la loi d’amnistie générale. Ce que cette même source tait, pour des raisons politiques, ce serait l’implication presque ostensible de certaines composantes du monde syndical et politique qui chercheraient à éreinter l’autorité d’un Etat, déjà aux abois.
L’inaction gouvernementale
Même si la tension dans ces îles de Kerkennah est apaisée, il est permis de s’interroger sur les raisons d’une telle crise. D’abord, ces événements trahissent les limites de l’action gouvernementale et son incapacité à ne pas laisser pourrir une situation, et de n’intervenir que lorsque la situation devient ingérable sur le plan sécuritaire. Cette crise montre aussi que les réponses ne sont jamais adaptées à la situation et qu’en faisant des concessions, le gouvernement ne fait qu’alimenter de nouveaux foyers de tension…
En fait, aujourd’hui, plus que jamais, une discussion franche avec les patrons de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) s’impose. La politique de l’évitement à laquelle ont recours les autorités politiques, n’ayant pas donné ses fruits, il s’agit d’adopter un discours plus clair, celui de la vérité et de la pédagogie mais aussi de la fermeté. Il s’agit surtout de ne pas se laisser intimider face au diktat de gens grisés par leur capacité de nuire, et qui chercheraient à mettre à genoux l’Etat.
D’autre part, ces événements constituent un tournant sur le plan médiatique dans la mesure où certains médias osent, même si c’est timidement et à une échelle assez limitée, transgresser certains tabous, en désignant les responsables des agitations. Même si la centrale syndicale est une organisation nationale dont on ne peut que saluer l’histoire, elle reste gérée par des hommes avec leurs ambitions personnelles, leurs présupposés idéologiques…
La rigidité idéologique en question
La «révolution» suppose l’affranchissement de toute forme de sacralité. Aussi, en encensant des individus comme s’ils étaient des «saints», que fait-on sinon les encourager dans leur égarement, en faisant d’eux des êtres arrogants, autosuffisants… Certes le pays a besoin d’un syndicat fort, dynamique, mais c’est dans le respect de la loi.
Enfin, la grande leçon de cette crise profonde, c’est de nous révéler que l’ennemi principal des Tunisiens, c’est la rigidité idéologique d’une partie de ses enfants avec ses deux variantes, ses deux expressions. En effet, deux «mythes» vont compromettre le processus démocratique et gangréner la vie politique du pays – et du monde arabo-musulman d’une manière générale – dans les décennies à venir : le mythe d’un «monde pur» et celui d’un «monde égalitaire».
Ainsi, d’une part, on a les adeptes du premier qui prônent un monde sans alcool, sans mixité, un monde qui prie et où ces gens seraient de véritables mollahs, distribuant les indulgences aux consciences vulnérables, bénissant les mensonges «halal», les magouilles «halal», la bêtise «halel».
D’autre part, on a les «Robin des bois» qui nous promettent une société sans riches, où ces pâles «Che» seraient les puissants «rétributeurs» des bonnes intentions, des belles déclarations, et des idées généreuses.
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