En Tunisie, de nombreux hôteliers, qui n’agissent pas en professionnels mais en criminels en col blanc, ne méritent pas les largesses de l’Etat.
Par Abderrazak Lejri*
En réaction à la plainte de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH) contre le député Moncef Sellami pour ses propos jugés accusateurs contre la profession qu’elle est censée représenter, je dis à M. Sellami : «Vous n’avez pas à vous excuser vis-à-vis de la mafia réunie sous le parapluie de la FTH».
Des criminels en cols blancs
Nous savons tous qu’à part quelques professionnels du tourisme et de l’hôtellerie: feu Aziz Miled, Raouf El-Kateb, Abdelhamid Khechine, Chedly Fourati, Mohamed Laamouri, et quelques autres, plus de la moitié des hôteliers sont des intrus et des opportunistes à qui le titre approprié est «tous pourris». Et pour causes…
• Dès qu’ils ont déniché les appuis – notamment politiques d’alors – pour monter un projet touristique, ils trichent pour maquiller en gonflant leur apport en fonds propres y compris en commençant par rançonner les architectes et bureaux d’études par le biais de rétro-commissions.
• Dès la mise en place du chantier de leur unité hôtelière, ils font un deal avec les entreprises pour que, dans la foulée, ils construisent des villas de maître en leurs noms, en détournant une partie des fournitures et travaux financés par les crédits bonifiés des banques notamment de développement.
• Dès les premières années d’exploitation, ils :
– mettent en place une double facturation avec des accords de détournement de devises avec des tours opérateurs (TO) complices;
– squattent à leur profit et leur famille élargie une partie de l’unité au détriment de toute règle de rentabilité car leur déficit comptable est le dernier de leurs soucis;
– ne remboursent pas leurs crédits;
– mettent en place une comptabilité parallèle pour voler le fisc;
– rançonnent systématiquement la majorité les fournisseurs;
– détournent systématiquement au moins 40% des recettes en espèces des points de vente via notamment une tricherie traditionnelle sur les coefficients de doses et les achats parallèles des boissons alcoolisées;
– montent des projets d’extension – alors que l’unité ne satisfait pas l’exigence de taux d’occupation suffisant pour bénéficier de nouveaux crédits sans attendre que les premiers soient remboursés ;
– refont la boucle de tout le cycle de prédation au détriment de l’argent public et de la communauté nationale (occasionnant les milliards de déficit de la BNDT et d’autres banques supportés in fine par le contribuable tunisien) pour assurer une situation de rente indue ad vitam aeternam…
En un mot ils ont agi non en professionnels mais en criminels en cols blancs.
Et ils ont, aujourd’hui, le culot d’oser pleurnicher pour quémander une exemption de leurs cotisations sociales et fiscales, et du paiement de leurs arriérés auprès des banques alors que, s’il y a des victimes collatérales, ce sont leurs employés permanents dont les emplois sont menacés et les artisans mis en situation de faillite car les profiteurs véreux auront assuré leurs arrières pour mille ans.
Halte aux largesses de l’Etat
Les cas les plus édifiants sont ceux des promoteurs de la zone de Hammamet Sud où la majorité des promoteurs (sous le vocable de jeunes promoteurs) n ‘ont aucun lien avec l’hôtellerie ou le tourisme et qui ont profité pour recycler leur argent préalablement détourné dans leur activité dans d’autres secteurs.
D’aucuns appellent à un diagnostic du système or celui-ci est fort connu et a été mis en exergue par d’innombrables études.
Ce qu’attendent les Tunisiens après la révolution – les attaques regrettables du Bardo et de Sousse ayant eu l’avantage d’être révélatrices en mettant à nu un système mafieux – est une révision radicale qui balaye radicalement les intrus et les profiteurs!
Les agriculteurs ont donc raison de monter au créneau pour bénéficier des mêmes largesses de l’Etat car c’est un secteur autrement plus vital et dont dépend notre sécurité alimentaire.
*Informaticien ayant automatisé des dizaines d’unités hôtelières.
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