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UBCI va fermer une vingtaine d’agences : Les enjeux d’une décision

L’Union bancaire pour le commerce et l’industrie (UBCI) est le théâtre d’une vive tension entre sa direction générale et ses syndicats de base.

Par Khémaies Krimi

A l’origine de ce malaise social, un programme d’adaptation progressive aux nouvelles technologies de l’industrie bancaire appelée chastement «programme de transformation».

Ce programme prévoit, sur la période 2017-2020, la fermeture d’une vingtaine d’agences et leur fusion avec des agences situées à proximité, perspective à l’origine d’un bras de fer qui risque d’avoir un effet d’entraînement sur tout le secteur bancaire en Tunisie.

Cette nouvelle organisation de l’UBCI, filiale de BNP Paribas, qui – empressons-nous de le signaler – ne prévoit pas un plan social, a pour objectif de favoriser un management de proximité mieux adapté aux besoins de la clientèle et davantage de synergies entre les équipes commerciales. L’ultime but étant l’optimisation de la rentabilité de la banque et la réduction de ses coûts de production.

Concrètement, cette organisation, qui doit être fin prête à la fin décembre 2017, va démarrer à partir du 2 janvier 2018, par la fusion, à Tunis, de l’agence de la rue Hédi Nouira avec celle de l’avenue Habib Bourguiba, au centre-ville de Tunis, suivie par celle de l’agence Bab Souika avec celle de l’avenue de Londres.

Pour le reste de l’année 2018, une liste de 8 fermetures-fusions a été identifiée. Il s’agit de l’agence Montfleury, qui fusionnera avec celle de Carthage, Denden avec Bardo, Fouchana avec M’ghira, Ezzahrouni avec le Bardo, Ennasr 2 avec Ennasr1, Bizerte 1 avec Bizerte 2, Sfax Chihia avec Sfax Téniour et Moknine avec Teboulba. Le reste des fermetures-fusions se fera entre 2019 et 2020.

L’UBCI tient à préciser que ces fusions se feront de la manière la moins contraignante possible pour les clients tandis que les agents des agences fusionnées seront redéployés au sein du réseau de l’établissement bancaire.

Le point de vue des syndicats

Cette nouvelle organisation de l’UBCI n’est pas du goût des syndicats de la banque. Dans un communiqué dont une copie est parvenue à Kapitalis, ces derniers accusent la direction générale de la banque de réduire, avec ces fermetures-fusions, la taille de l’établissement et de ne pas prendre en considération son historique des soixante années depuis sa création.

Les syndicats de base font assumer au partenaire français BNP Paribas la détérioration de la situation sociale et l’appellent à revenir sur les décisions de fermer une vingtaine d’agences, de réduire le nombre du personnel, de ne pas remplacer les fonctionnaires qui partent à la retraite et de supprimer certains postes fonctionnels. Ils mettent en garde contre le recours de la direction générale de l’UBCI aux mécanismes d’emploi précaire (sous-traitance) et attirent l’attention sur des présomptions de corruption au sein de la banque sans donner aucun éclairage sur ces présomptions.

Au final, les syndicats appellent à la mobilisation et à la solidarité du personnel pour faire échouer «ce nouveau programme de transformation».

La banque de demain c’est le digital

Au-delà des positions des uns et des autres, il faut reconnaître que ce télescopage entre syndicats et direction générale de l’UBCI était inévitable pour une raison simple. L’industrie bancaire est en train de connaître une véritable révolution par l’effet de la digitilisation et son corollaire l’open banking et autres.

A titre indicatif, une technologie comme le «Blockchain» permet aujourd’hui de frapper de la monnaie électronique ou monnaie cryptée, de façon décentralisée, par des ordinateurs, contribuant à chiffrer les transactions et à les authentifier de façon irrévocable.

Conséquence: avec de telles technologies, la banque universelle et l’agence bancaire ne sont plus d’actualité. Lors d’un récent séminaire organisé par l’Institut tunisien des études stratégiques (ITES) sur «la Banque de demain», Habib Karoouli, Pdg de CAP Bank, a déclaré que «les banques tunisiennes pour survivre doivent se digitaliser au plus vite et être en rupture avec le modèle de la banque classique». Il a invité les banquiers tunisiens à observer les signes précurseurs de la digitilisation dans le monde. «Dans les pays scandinaves et aux Etats Unis, les agences bancaires ne sont plus d’actualité et celles qui existent ont tendance à fermer. Mieux : dans un pays comme le Kenya, les adeptes du banking mobile est passé de 27 à 40 millions sur une population totale de 48,5 millions d’habitants», a-t-il dit.

Cela pour dire, que BNP Paribas, en sa qualité de banque internationale à l’écoute du progrès et de l’évolution de l’industrie dans laquelle elle évolue, ne peut qu’anticiper sur ces progrès et ces nouvelles technologies pour en tirer le meilleur profit. Elle est en quelque sorte dans la bonne voie.

D’ailleurs, elle n’est pas la seule à le faire en Tunisie. Une banque publique comme la STB, forte de son nouveau bussiness plan, s’apprête à fermer et à fusionner plusieurs de ses agences.

Ainsi, selon nos informations l’agence de la STB à la Gare de Tunis sera fermée et fusionnera, à compter du premier janvier 2018, avec celle de l’avenue Habib Bourguiba.

Le mot d’ordre pour les banques tunisiennes est des plus clair. Elles n’ont d’autre choix que de s’engager pleinement dans le digital (adoption des règlements requis…) et de s’adapter au plus vite pour garder l’initiative. Dans le cas contraire, elles risquent de connaître un système financier parallèle parachuté similaire à l’économie parallèle et de subir les effets négatifs de situations de concentration et de règlements exogènes .

Quant aux syndicats, tant que ces programmes de transformation ou de modernisation ne sont pas assimilés à des plans sociaux, ils ont intérêt à s’adapter à leur tour aux exigences de cette révolution et à s’informer sur les expertises développées à cette fin par les syndicats occidentaux pour s’en accommoder. A bon entendeur.

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