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Après l’attentat de Sousse: Lettre à mes amis «non musulmans»

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Après l’horreur du massacre de Sousse commis au nom de l’islam, peut-on encore espérer que rien n’est fini entre «musulmans» et «non musulmans».

Dr Lilia Bouguira

Mes amis les «non musulmans» ne nous fuyez pas. Toute la Tunisie est désemparée. Moi aussi, je n’ai pas dormi. Ma nuit s’est émiettée de sons des balles traîtresses qui ont tué lâchement des touristes venus en ami chez moi se reposer.

Vous dire que je suis désolée; je n’y arriverai jamais. L’impuissance et la honte me prennent à la gorge. Je me sens larguée et comme sonnée. Je pense à cet ado de 16 ans qui a perdu, hier, dans ce carnage toute sa famille et je me demande si un jour, à la croisée, de nos routes, saura-t-il pardonner? Saura-t-il au moins comprendre avec le temps que nous, les autres Tunisiens, nous n’y sommes pour rien et que nous ne cautionnons pas cette folie meurtrière?

Cet enfant et tous les autres en innocents citoyens ont bravé les avertissements de leur pays pour venir aider à relever mon pays meurtri par un précèdent Bardo sanguinaire. Sauront-ils un jour analyser pour comprendre que l’enjeu est encore plus grave et que les doigts du diable les ont chargés aujourd’hui mais que, dans un futur proche, ils vont charger sur nous les «musulmans».

J’ai honte pour moi, la mort dans l’âme pour ce qu’a fait cet ignoble qu’une femme comme moi a enfanté pour tuer vos femmes, hommes et enfants.

J’ai honte pour mon peuple ancestral qui a su bien vous offrir l’hospitalité tant prônée.

J’ai honte pour mon gouvernement affaibli ou paralysé qui n’a su vous aménager ses plages et la haute sécurité.

J’ai honte pour nos alliés qui ont encouragé votre visite sans nous prémunir des garanties d’une transition en paix mais qu’ils ont fortement encouragée.

J’ai honte pour nous les Tunisiens de ne pas nous donner les moyens de bien cerner l’abcès et oser exciser dans le vif du sujet.

Il ne s’agit point de gamins que l’on dope au Captagon ni de desperado naïfs mais surtout de dangereux plans pour détruire tout pont entre nous les humains, rendre le fossé injoignable par ces crimes odieux et stériliser nos volontés de rapprochement entre les peuples sans idéologie sectaire.

Nous réduire en nous dressant les uns contre les autres, en nous isolant, en remettant sur le tapis de vieilles guerres de religion pour ne faire toujours profiter que les démons.

Je m’inclinerai aujourd’hui au son de vos messes pour accompagner vos braves morts chez nous et je me signerai d’une résolution universelle : ne jamais baisser les bras et continuer à espérer que rien n’est fini entre nous deux «musulmans» et «non musulmans».

Mes désolations et mes larmes; je vous les offre sans compter.

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