Quels personnages n’invitons-nous pas pour faire de l’audience au mépris de l’intelligence et du bon goût?
Un animateur télé c’est avant tout un savoir-vivre, une culture générale, une rigueur professionnelle, une bonne tenue morale et une attitude respectueuse.
Par Nadya B’chir *
C’est officiel, nos médias ne pourront pas déchoir encore et encore ! Une ostentation d’un savoir-vivre très particulier et clairement un brin suicidaire devient un produit patenté sur nos écran télé et nos postes radio. Cette fois, nul besoin de gaspiller notre alacrité à chercher un coupable, puisqu’il est déjà identifié et tient désormais la place d’un pécheur patenté : le journaliste animateur !
Nous n’évoquerons pas l’ère d’avant le 14 janvier 2011, bien que, certes c’est un registre moins lumineux mais qui, tout bien réfléchis, demeure moins écorché que l’actuel. Encore une fois, le téléspectateur, citoyen de son état, se retrouve à s’acquitter de la rançon foisonnante de la liberté d’expression. Maudite liberté dirions-nous ! Quel est le véritable problème ? A l’image d’un instituteur qui dispense à ses élèves divers enseignements, qui tri sur le volet la discipline et le savoir à prodiguer, et qui reconnaît l’obligation morale à hisser les esprits au-delà de quelconque abrutissement, un journaliste animateur s’attribue le même devoir. Et lorsque nous nous vantons de trôner sur le paysage médiatique car détenteur de la plus haute audience de la place, la responsabilité d’accomplir ce devoir à digne conscience et sincères scrupules se corrobore davantage.
L’inénarrable Amine Gara
Les exemples des journalistes animateurs qui se bombent le torse et affichent une capacité d’un touche-à-tout et pour qui tout fait ventre, se prennent pourtant pour des sommités dans l’univers des médias. Et l’exemple le plus illustrateur dans ce cas de figure est le journaliste animateur Amine Gara qui se charge du fabuleux pensum que celui de crever la paillasse du goût général d’une part et de bigorner les esprits.
Amine Gara anime deux émissions : l’une sur la radio la plus écoutée en Tunisie : Mosaïque FM, et l’autre sur la télévision la plus écoutée : Al Hiwar Ettounssi. C’est vous dire ! En ce qui regarde le contenue de l’émission radiophonique, cela se passerait volontiers de commentaire, car si contenu il y a, il ne peut être jugé que de fluette en consistance. Le concept n’est pas né d’un génie : un rassemblement de pseudo-célébrités dans l’art du comique qui, a longueur de près de deux heures, choisit de pêcher dans les eaux de la bêtise. Ce rassemblement fait de l’écoute, me dirait-on, tant mieux pour les annonceurs, que je répliquerai !
Venons-en à l’autre émission d’Amine Gara, celle qui passe en début de soirée de chaque mercredi. En dépit de la concurrence servie par la nouvelle chaîne Attassia, lancée par Moez Ben Gharbia, Al-Hiwar Ettounsi a gardé le chef de file en la matière, par habitude? Possible! Les téléspectateurs ont eu droit deux semaines de suite à du contenu à vives controverses au regard du sujet traité : l’homosexualité! A ce stade, il existe deux problématiques : les positions empruntées par les invités de l’émission, et celle de l’animateur qui à la fois joue le rôle ô combien spinescent du modérateur. Cela est même le rôle substantiel de l’animateur qui a le devoir de produire un plateau télé équilibré et duquel émane des théories censées, révérencieuses et correctement formulées.
Or, le spectacle que nous offre Amine Gara et particulièrement lorsqu’il s’agit d’un sujet névralgique, se transforme rapidement et de manière subversive à un dialogue de sourds accessoirisé par des affronts à couleurs variées. En toute vérité, il ne devrait pas y avoir de quoi être pantois face à ce désolant ballet de mesquinerie. Chez nous, il est dit : «La chose de sa source ne doit pas étonner» !
Quelles sont les qualifications de cet animateur pour s’autoriser (oui s’autoriser car les capacités doivent être jugées par celui qui les renferme en premier lieu) à endosser pareille responsabilité? Quelle est sa bréviaire en la matière qui régit ses ouvrages et ses manouvres? Quels sont les critères qu’un propriétaire de chaîne de télévision telle qu’Al-Hiwar Ettounsi adopte pour recruter un animateur pour tel ou tel programme? La célébrité, la fausse et tronquée célébrité qui truque les authentiques et irréfragables compétences dans le domaine demeure-t-elle l’unique et prioritaire mesure dans l’affaire?! Combien de temps encore, combien d’abjection et d’avilissement encore le téléspectateur devra-t-il coltiner avant que les propriétaires des chaînes de télévision se rendent compte qu’il n’est pas tolérable de rouler sa bosse ainsi dans le domaine de ce qui est communément appelé le quatrième pouvoir ?!
Le glas de la fin de la médiocrité
Encore une fois, boycotter et zapper ces chaîne de télévisions et ces émissions serait-il LA solution au problème ?! Néanmoins pourquoi faire fuir le téléspectateur qui à son tour chercherait à sanctionner sa télévision pour abus d’audimat ?! Il suffit ! Vous propriétaire des chaînes de télévision, les cloches ont sonné le glas de la fin de la médiocrité. Il est plus que temps de prendre conscience qu’un animateur télé n’est pas qu’un nom célèbre, mais avant tout un savoir-vivre, un savoir-faire, une culture générale, une discipline, une bonne tenue morale, une attitude respectueuse, une matière consistante et fructueuse, une éducation quasi exemplaire, et une expérience non moindre. Oui, il n’est pas exclu qu’il soit périlleux de pouvoir trouver toutes ces qualités chez un animateur, mais il est certain qu’elles existent quelque part. Le tout est de ne pas être un partisan du moindre effort et en cherchant la facilité. La facilité n’a jamais été synonyme de gloire ! Cherchez encore, vous finirez par trouver!
* Journaliste indépendante.
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