Selon une récente enquête sur les offres et demande d’emplois en Tunisie, 145.000 postes sont non pourvus et 75.000 sur la liste d’attente.
Par Wajdi Msaed
Les grandes lignes de l’enquête, réalisée par l’Institut arabe des chefs d’entreprises (IACE), ont été présentés lors d’un point de presse, lundi, à la Maison de l’Entreprise, siège de l’IACE, aux Berges du Lac de Tunis, par Faiçal Derbel, vice-président, en présence des membres du bureau directeur conduits par le président Ahmed Bouzguenda.
Paradoxe du marché de l’emploi
«Ce qui est impressionnant dans les résultats de cette enquête, c’est que, contrairement au phénomène normal du chômage, on compte, sur les 270.000 demandes d’emploi potentiels révélées, il existe 145.000 postes non pourvus», a conclu M. Derbal, soulignant ce paradoxe récurrent du marché de l’emploi en Tunisie.
«C’est une première partie d’un long travail se rapportant principalement aux recrutements potentiels, aux opportunités et aux contraintes de l’insertion des jeunes diplômés», a expliqué M. Derbel, en précisant que les deux composantes de l’enquête sont les entreprises et les diplômés.
L’enquête a porté sur un échantillon de 403 entreprises, tous secteurs confondus (agriculture non comprise), employant 6 salariés et plus, et 10.300 diplômés ayant obtenu leurs diplômes (LMD et Iset) entre 2010 et 2015.
La méthodologie adoptée avec les entreprises a été le questionnaire face-to-face. S’agissant des diplômés, les enquêteurs ont eu recours au formulaire en ligne facilement partagé sur les réseaux sociaux, d’autant que «les instituts d’origine ne disposent d’aucune base de données sur leurs étudiants, exception faite des noms et prénom et numéros de la carte d’identité nationale», a souligné M. Derbel.
La refonte escomptée du système éducatif
Les résultats de l’enquête ont dégagé des conclusions qui appellent à une refonte très approfondie de notre système éducatif en vue d’une meilleure adéquation avec le marché de l’emploi et des besoins réels de l’appareil de production représenté par l’entreprise.
En effet, outre les 145.000 postes d’emploi non pourvus, l’enquête relève 45.000 postes en voie de destruction et 75.000 postes à créer au cours des deux années 2016-2017.
Les demandes répartis par secteur d’activité laissent ressortir une forte demande dans les industries de process, qui opèrent dans la transformation des matières premières (35.000 sur les 145.000).
La demande du secteur de la médecine et assimilés se limite à 3.819 postes, le besoin se faisant sentir dans la catégorie des ouvriers qualifiés.
Pour les cadres administratifs, comptables et financiers, la demande, qui ne dépasse guère 2.934 postes, n’est pas significative, estime le conférencier, qui appelle à revoir la tendance en matière d’orientation des jeunes vers ces disciplines.
Quatre spécialités sont principalement recherchées par les entreprises : la maîtrise de l’outil informatique et la capacité de travailler en ligne; la maîtrise des langues, qui devient nécessaire à l’intégration dans l’entreprise; la capacité d’initiative et la créativité combinée à la maîtrise de la langue anglaise.
La perte de parts de marchés
Les difficultés rencontrées par les entreprises résident, notamment, dans les délais d’attente pour dénicher le profil recherché, aggravées par la répartition régionale des candidats à l’emploi. Près de 60% de ceux-ci ne répondent pas aux critères de compétence, surtout en matière de communication et d’expression aussi bien orale qu’écrite.
Walid Belhaj Amor, vice-président de l’IACE, a évoqué ce qu’il qualifie d’«abandon de recrutement», un problème majeur qui fait perdre aux entreprises des parts de marché. En effet, les entreprises qui cherchent à se développer davantage, abandonnent la course au recrutement quand elles ne trouvent pas le profil approprié pour lancer un nouveau produit ou promouvoir un service de pointe. «Les délais d’attente du profil recherché peuvent atteindre jusqu’à 36 mois dans l’industrie du cuir et chaussures», a révélé Faiçal Derbel.
Notons que ce rapport, dans sa première partie comptant une centaine de pages, a été mis en ligne sur le site web de l’IACE, alors que la 2e partie sera rendue publique au courant du mois d’août prochain.
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