La capacité du gouvernement à faire face au déficit budgétaire endémique dépendra du sérieux qu’il mettra à combattre les excès et les abus en matière de dépenses publiques.
Par Fathi Frini *
En prévision des discussions du projet de la loi des finances 2017 en vue de son adoption par l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) à la fin de l’année en cours, nous vous proposons ces quelques réflexions que nous invitons, instamment, les parties prenantes à en faire bon usage en vue de maîtriser, de juguler, sinon de réduire le déficit endémique du budget de l’Etat. Autant que faire se peut, bien évidemment.
Excès, abus et dépassements en tous genres
Au fait, en deux mots, qu’est-ce qu’une loi de finances? La loi de finances détermine, pour un exercice – une année civile – la nature, le montant et l’affectation des ressources et des charges de l’État, ainsi que l’équilibre budgétaire et financier qui en résulte.
Seulement voilà , là où le bât a toujours blessé, ce serait les excès et les abus dont se rendraient coupables assez souvent les grands commis de l’Etat en n’en faisant pas bon usage ou alors bien peu. Ces derniers n’auraient jamais manqués, à l’occasion, de défrayer la chronique ou de mobiliser les internautes sur les réseaux sociaux, précisément pour les abus et les excès dont, bien des fois, ils se rendraient coupables. Alors que de tels abus et de tels excès ne peuvent et ne doivent guère concerner les dépenses d’équipement ou de fonctionnement, budgétisées dans les règles de l’art propres aux finances publiques, répondant à des critères identifiés ni toutes autres affectations ou dotations dûment gérées par les autorités publiques.
Ce sont bien, toutes autres dépenses, allocations, indemnisations et avantages divers, très souvent insoupçonnés, qu’il nous faut impérativement garder à l’œil, pour mieux les réglementer… Parce que donnant lieu à maints dépassements, dont les règles de gestion font très souvent l’objet de tant de transgressions… Parce que, bien des fois, tout cela échapperait à tout contrôle pourtant toujours requis.
Aussi, la progression des dépenses en tous genres, de ce fait beaucoup plus géométrique qu’arithmétique, entame sérieusement l’argent public, plus généralement la richesse nationale et, partant, notre capacité à faire face au déficit budgétaire devenu, par la force des choses, endémique.
Recours aux nouvelles technologies de l’information
Certes, le progrès technique est un contributeur important des dépenses de l’Etat et des collectivités publiques et locales, pour assurer l’entretien, la maintenance ou la mise à niveau. En ce sens, l’apport, le recours ou l’adoption des nouvelles technologies de l’information serait, plus que nécessaire, pour améliorer le traitement, la prise en charge et la résorption de telles anomalies, incohérences et autres pathologies dans nos finances publiques. Et parce que, ne pouvant être freinées comme il se devait, avec les moyens du bord, somme toute, rudimentaires que précisément les autorités publiques auraient à prendre les choses à bras-le-corps pour y mettre le holà …
Prenons un exemple fort édifiant, le cas des recrutements injustifiés opérés dans la fonction publique, sous le gouvernement de la Troïka, l’ancienne coalition gouvernementale dominée par le parti islamiste Ennahdha qui a gouverné de janvier 2012 à janvier 2014, à en croire les médias nationaux, ce qui n’aurait pas manqué de soulever un tollé général à travers les réseaux sociaux, toujours prompts à se mettre quelque chose sous la dent… Car, les abus et les excès qu’il nous faut combattre, ce sont, en effet, les dépenses inutiles, les engagements inadéquats, qui n’améliorent pas l’état général, qui ne font guère avancer les choses et ne permettent pas de prendre en charge les besoins mal identifiés, voire pas identifiés du tout.
De la juste allocation des ressources disponibles
C’est du côté des choix inadaptés ou non pertinents au regard des politiques entreprises, des cadres légaux, des recommandations opportunes, qu’il nous faut regarder de près, et même de très près, s’il le faut. Mais c’est aussi et surtout à l’organisation de notre système de dépenses publiques qu’il nous faut, à l’occasion, repenser.
De tout temps, en effet, nous relevons un fait majeur se caractérisant par une propension à identifier des besoins, à engager des prestations ou à acquérir des produits plus chers que ceux que justifieraient les recommandations, les prescriptions et autres garde-fous contenus dans la législation relative aux marchés publics.
Nous pouvons, à cet égard, multiplier les exemples à l’infini, là n’est pas notre propos. C’est que la non-pertinence de certains achats, de certaines dépenses – inutiles, superflues ou alors somptuaires – de certains actes faisant appel, pourtant, à la réglementation en matière de marchés publics, ne manqueraient pas de poser la question de la juste allocation des ressources disponibles mais aussi des risques que cela représente pour l’équilibre budgétaire.
Un examen de cas d’espèce, à opérer par qui de droit, au niveau du pouvoir central ou alors sur un échantillon d’établissements répartis dans tout le territoire national montrerait aisément que bien des engagements, des acquisitions ou toutes autres interventions seraient jugées inopportunes sinon non-réglementaires au regard des référentiels et qu’il ne s’agit guère d’une vue de l’esprit ou d’une hypothèse d’école. Et qu’une fois constaté, cela devait relever de qui de droit pour un éventuel rappel à l’ordre ou bien alors à une hypothétique sanction.
Faire face aux nouveaux défis
L’on estime, toutefois, qu’en adoptant à la lettre, qu’en suivant scrupuleusement tout l’arsenal juridique, du reste adéquat et suffisant, pour assurer le respect des obligations, par tout un chacun, face aux nouveaux défis auxquels nous sommes confrontés, avec la rareté ou l’insuffisance des moyens financiers engagés ou des moyens humains mobilisés, l’on réduirait, de la sorte, considérablement, les dépenses publiques; qu’on aurait atténué par voie de conséquence les excès et les abus de tous genres observés habituellement; et, qu’en fin de compte, l’on réduirait au strict nécessaire le recours à l’emprunt sur le marché intérieur, à l’endettement extérieur, et enfin, le diktat de la Banque mondiale et de son compère le FMI.
Ces démarches, quoique initiées depuis déjà quelques années, nécessiteraient un brin de toilette pour, à la fois, davantage de rigueur, de transparence et de contrôle. Elles doivent être poursuivies et amplifiées même, pour assurer la pérennité d’ un système de gestion des deniers publics, par bien des côtés, à revoir et à corriger…
Pour qu’il acquiert plus d’efficience et davantage de consistance afin qui puisse assurer de bonnes performances…
* Juriste.
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