‘‘Shams Mag’’, cellule d’écoute et un film documentaire sont les nouveaux projets mis en place par l’association Shams pour la défense des homosexuels en Tunisie.
Par Emna Ben Abdallah
Ce sont là autant d’outils dans la lutte contre toute forme de discrimination à l’encontre des LGBT tunisiens.
Au lendemain de sa création, cette association a réussi à attirer le regard de tous. Se donnant pour mission de défendre des droits LGBTQI+ en Tunisie, elle a réussi à interpeller une société présumée conservatrice. Sa persévérance dans la lutte contre l’homophobie a fait de Shams un ennemi pour certains et pour d’autres une source d’inspiration voire d’espoir.
Dans ses apparitions médiatiques ou dans ses publications sur sa page Facebook, Shams Tunisie évoque à chaque fois les humiliations subies par les personnes LGBT et appelle toujours l’Etat tunisien à reconnaître le droit à la différence.
«Avec la médiatisation du sujet, nous avons remarqué le changement d’utilisation de certains termes. Mais ceci ne veut pas dire que la société n’est plus homophobe. L’homophobie existe toujours, ici ou même dans des pays où le mariage pour tous est légal», explique Bouhdid Belhadi, responsable de la communication externe et des relations publiques et internationales et directeur de projet de ‘‘Shams Mag’’.
Sensibiliser les gens à la nécessité d’abolir l’article 230 du code pénal, qui réduit l’homosexualité à la sodomie et punie cette pratique d’une peine allant de 1 à 3 ans d’emprisonnement, est l’un des principaux objectifs de cette association qui, pour arriver à ses fins, a mis en place de nombreux projets dont un nouveau magazine Queer en Tunisie.
« Shams Mag » pour libérer la parole LGBT
L’association Shams Tunisie compte publier prochainement le premier magazine LGBT, qui sera non seulement gratuit, mais aura une version en ligne, qui sera consultable sur le site de l’association, et une autre version papier, qui sera distribuée sur demande.
Le magazine abordera plusieurs thématiques dont l’actualité LGBT à l’échelle nationale, Mena et internationale, un volet consacré à la culture LGBT, un autre à la santé sexuelle, le genre et l’orientation sexuelle, une partie sera dédiée à l’art LGBT et enfin deux interviews exclusives avec d’éminentes personnalités.
Si les jeunes LGBT souhaitent parler de leurs malheurs, de leurs joies ou d’un quelconque autre sujet, la rubrique ‘‘Parole libre’’ leur servira de tribune. L’association offre ainsi la possibilité aux membres de la communauté LGBT de contribuer au combat pour le respect de leur droit à la différence.
En ce qui concerne la première interview, l’association a choisi de donner la parole à Maître Mounir Baatour, président de Shams, qui évoquera les procédures judiciaires à l’encontre des personnes LGBT. Seconde personnalité interviewée, Fatma Ben Saidane, qui n’est pas seulement une grande actrice et comédienne, mais aussi une militante des droits humains, pour l’égalité et la justice pour tous.
«L’interview vise d’une part la sensibilisation à la cause LGBT et au rôle de l’art dans la promotion des droits humains en général et des LGBT en particulier», explique Bouhdid Belhadi, ajoutant à ce propos que «Fatma Ben Saidane appelle au respect de la différence et souhaite voir la société tunisienne évoluer sur la question LGBT».
Autre fait à signaler, l’association a choisi d’évoquer les expériences traumatisantes des personnes LGBT et les conséquences désastreuses de l’article 230 du code pénal. «Nous avons parlé de l’origine, la crédibilité et l’impact de la pratique du test anal, prévu par cet article pour prouver qu’il y a bien eu un rapport anal», précise le directeur du magazine.
Cellule d’écoute pour accompagner les LGBT
Par ailleurs, et pour remédier aux effets psychiques des douloureuses expériences vécues par les LGBT, une cellule d’écoute a aussi été mise en place, au numéro : 36.316.362.
Cette cellule accompagne, assiste, renseigne, informe, réconforte et rassure les personnes LGBT en Tunisie dans leurs souffrances quotidiennes. Ce sont là, on le sait, les missions même que s’assigne Shams Tunisie.
Lancée le 20 mars dernier, journée de la fête de l’indépendance de la Tunisie (le choix de la date est très symbolique), cette cellule travaille 7 jours sur 7, de 14h à 22h30 du lundi à vendredi et de 14h à 20h les weekends.
«Nos bénévoles ont été formés sur deux axes : les techniques de l’écoute et la gestion des crises psychologiques (idées suicidaires, situation de viol, agression, emprisonnement, etc.)», explique Belhadi.
L’écoutant devra aider l’appelant à clarifier ses pensées et le guider à trouver une solution ou une réponse à ses multiples interrogations à propos notamment de l’orientation sexuelle. C’est ainsi, qu’il pourra gérer sa situation de manière individuelle.
Le personnel d’écoute peut orienter l’appelant vers un réseau bien établi en vue d’un suivi psychologique, juridique ou social.
Si un cas extrême se présente, qu’il s’agisse de poursuites judiciaires ou tout autre problème, la personne concernée se verra orientée vers des psychologues ou des juristes pour l’aider à surmonter sa difficulté et assurer le suivi continu de sa situation.
La voix des LGBT persécutés
Une première en Tunisie : le premier film documentaire sur la situation des LGBT Tunisiens, intitulé ‘‘Au pays de la démocratie naissante’’, sera projeté le mardi 28 mars 2017. Il sera ensuite diffusé sur la chaîne Youtube de l’association Shams Tunisie et projeté dans des festivals internationaux et les différents événements de la communauté LGBTQI+.
«Le film contient différents témoignages des personnes LGBT à visage découvert, qui ont été victimes de poursuites judiciaires, d’agression homophobes ou de rejet familial. Ils parlent aussi de leurs états psychologiques. La projection de ce film vise la sensibilisation sur la situation des LGBT et à mobiliser la communauté internationale pour faire avancer leur cause et consolider les bases d’un vrai Etat de droit en Tunisie», a déclaré Belhadi.
Selon Shams Tunisie, ce documentaire va mettre en lumière le vécu difficile des personnes LGBT, dont les droits humains ne sont pas suffisamment consacrés par les législations et les institutions en Tunisie.
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