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Tunisie-Energie : Risque de fermeture du gazoduc Enrico Mattei

Tracés des gazoducs Galzi (oranger, en projet) et Transmed (en mauve, à renégocier en 2019). 

La Tunisie doit réfléchir d’urgence à son indépendance énergétique, surtout qu’une incertitude plane sur l’avenir du gazoduc algéro-tuniso-italien, qui l’approvisionne en gaz naturel.

Par Khémaies Krimi

En prévision de l’expiration, d’ici septembre 2019, des contrats en vertu desquels le gaz naturel algérien est acheminé vers l’Italie via la Tunisie, Tunis et Rome ont entamé des négociations en vue de prolonger l’exploitation du tronçon du gazoduc algéro-tuniso-italien Transmed, qui traverse le territoire national sur une distance de 400 kms, de la frontière algérienne au village côtier d’El Haouaria (Cap bon).

Dans cette perspective, une réunion, tenue, le 9 février 2018, à Tunis, a groupé le ministre de l’Energie, des Mines et des Energies renouvelables, Khaled Kaddour, et les représentants de l’office des hydrocarbures italien ENI.

À l’ordre du jour de cette réunion : l’examen des moyens de transférer les droits d’exploitation des installations et équipements de ce tronçon de gazoduc à la Tunisie.

Il s’agit de deux tubes de 48 pouces de 122 cm de diamètre, d’une longueur totale de 400 kms et de 2 stations de compression, la dernière est la plus puissante (120 MW) car elle doit fournir la pression nécessaire à la section sous-marine reliant les côtes tunisiennes et italiennes.

Intérêt de l’ENI pour la section tunisienne de Transmed

Selon le communiqué publié à l’issue de cette réunion, la partie italienne a présenté les grandes lignes du programme d’investissement futur que l’ENI compte engager, durant la prochaine décennie, en vue de garantir le transport du gaz dans de bonnes conditions.

Aucune précision n’a toutefois été donnée sur la nature de ce gaz : s’agit-il toujours du gaz naturel algérien ou de gaz de schiste que la Tunisie pourrait éventuellement développer à l’extrême sud du pays ?

Il n’empêche que, dans l’absolu et quel que soit l’angle à travers lequel on peut interpréter ces négociations, le fait de les entamer, à la veille de l’échéance fatidique de 2019, date d’expiration des contrats, constitue une bonne nouvelle pour la Tunisie, d’autant plus qu’elles interviennent après des déclarations peu encourageantes d’officiels italiens et algériens.

D’après ces déclarations, le gazoduc algérien passant par la Tunisie, dénommé Enrico Mattei, n’alimentera plus l’Italie dès que les contrats arrivent à terme en 2019.

Gaz naturel : vers un divorce entre la Sonatrch et l’ENI

Pour mémoire, en avril 2017, le ministre italien du Développement économique, Carlo Calenda, avait déclaré aux médias que l’Italie ne renouvellera pas son contrat d’importation de gaz à long terme (par gazoduc) avec l’Algérie. L’information n’a jamais été démentie par les autorités italiennes.

On apprendra, après cette déclaration, que l’Italie, pour subvenir à ses besoins en gaz naturel (14 milliards de m3), s’est engagée, par des contrats à long terme, avec d’autres producteurs de gaz plus sûrs et moins exposés aux risques de sabotage et de terrorisme. Il s’agit, notamment, des Pays-Bas à partir de 2020 et de la Norvège à compter de 2026.

Il y a lieu de tenir compte également de la concurrence de la Russie et de l’entrée en lice de nouveaux fournisseurs : Iran, bientôt de la Libye et Israël.

Par ailleurs, le gaz algérien est concurrencé par d’autres ressources énergétiques moins chères. Pour preuve, l’exportation de gaz naturel algérien par le biais du gazoduc Transmed a connu depuis 2011 (avènement du printemps arabe et ses corollaires désastreux), une forte baisse en raison de la concurrence de deux autres ressources bon marché: le charbon et le gaz de schiste.

Côté algérien, les autorités énergétiques, particulièrement la Sontrach, partenaire de l’ENI, déçues par l’échec du projet de construction d’un second gazoduc, dénommé Galsi (8 milliards de m3) devant relier directement l’Algérie à l’Italie à travers la Sardaigne, a décidé de réorienter sa politique d’exportation de son gaz naturel.
L’Algérie veut transformer localement son gaz pour avoir plus de valeur ajoutée et accroître ses ressources en devises. Un projet qui aurait irrité les Italiens et accéléré leur décision de changer de fournisseurs.

La Tunisie doit réfléchir à son indépendance énergétique

Par-delà ces nouvelles tendances et évolutions du Transmed, la Tunisie doit réfléchir dans les meilleurs délais à son indépendance énergétique. Car, pour le moment, elle est la plus grande perdante d’une éventuelle fermeture de ce gazoduc.

Faut-il le rappeler, les Tunisiens, en contrepartie de la traversée de son territoire et de l’entretien qu’elle assure sur sa section, reçoit environ 6% du gaz transporté. Cette quote-part assure une part importante de sa propre demande. Le gazoduc Enrico Mattei permettait, également, à la Tunisie de disposer à sa proche frontière ouest d’un fournisseur de gaz naturel utilisé pour faire fonctionner toutes ses centrales électriques.

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