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Trump n’en démord pas : la Chine paiera des réparations

Après une courte accalmie, Donald Trump a de nouveau enfourché son cheval bataille favori : le coronavirus s’est répandu dans le monde en partant de Wuhan. La Chine doit «payer», estime-t-il.

Par Hassen Zenati

L’histoire a gardé en mémoire le cri optimiste de George Clémenceau, le «Père la Victoire», ministre des Finances de la France à la sortie de la première guerre mondiale en juillet 1919 : «l’Allemagne paiera» pour toutes les victimes et les dégâts occasionnés par l’affrontement planétaire. Sur les 132 milliards de marks de réparations fixés par les négociateurs du traité de Versailles, l’Allemagne n’en a payé qu’une toute petite partie, avant de suspendre définitivement ses versements en 1932.

Le président Donald Trump a mis ses pas dans ceux de Clémenceau pour demander à son tour que la Chine paye pour tous les morts que le virus, qu’il s’obstine à qualifier de «chinois», a fait dans le monde (248.000 morts), à commencer par les Etats-Unis (68.000 morts). Combien? Il reste dans le flou, mais lorsqu’une journaliste lui demande si le chiffre annoncé par le magazine allemand ‘‘Bild’’ est bon, il se contente de répondre : «Nous parlons de beaucoup plus d’argent. Nous n’avons pas déterminé le montant final, mais il sera très élevé».

Washington accuse Beijing d’avoir délibérément propagé le virus

Pour le président américain, en effet, il ne fait plus aucun doute, que le Covid-19 est bien parti d’un laboratoire chinois de Wuhan pour se répandre dans le monde. Les Chinois, qu’il avait pourtant félicités au départ pour leur bonne gestion de la pandémie, auraient ensuite caché des données à leurs partenaires au sein de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), ce qui ne leur aurait pas permis de prendre à temps les mesures nécessaires pour le combattre efficacement.

Dans ce discours accusateur, pas un mot sur sa propre attitude de déni de la gravité de la maladie, ni ses hésitations sur la conduite à prendre lorsqu’il est apparu que les choses étaient bien plus sérieuses que le «canular» dont il se gaussait devant la presse. Versant dans les théories franchement complotistes, ses partisans n’hésitent plus à accuser Beijing d’avoir délibérément fabriqué et propagé le virus pour démolir l’économie américaine et empêcher la réélection de leur «idole».

Pour le Secrétaire d’Etat Mike Pompéo, faucon parmi les faucons de l’administration Trump, c’est une évidence biblique que «la Chine est connue pour infecter le monde» et que «ce n’est pas la première fois qu’elle met le monde en danger».

Le réquisitoire implacable ne souffrant aucune nuance, Trump et son entourage ne veulent même pas entendre parler des conclusions de 17 agences américaines de renseignements, que le président avait pourtant chargées d’enquêter sur l’origine du virus, et qui disent unanimes «partager le consensus scientifique», selon lequel le Covid-19 «n’a été ni fabriqué par l’homme, ni génétiquement modifié». Ils préfèrent s’accrocher à leur seule bouée de sauvetage, qui est de dire que ces agences poursuivent leur enquête pour savoir si le virus ne s’est pas échappé accidentellement d’un laboratoire de Wuhan. Même si la rumeur a été déjà écartée à plusieurs reprises par des scientifiques qui pensent que le virus est passé des animaux à l’homme d’une manière naturelle lors de l’élevage, de la chasse ou du transport d’animaux sauvages.

Trump tient en haleine ses électeurs pendant encore six mois

Mais comment faire payer la Chine ? «Il y a plusieurs moyens d’engager sa responsabilité, nous menons une enquête très sérieuse à ce sujet», répond Donald Trump, sans aller plus loin dans ses explications. Parmi ces moyens, des experts de son administration étudieraient la possibilité de priver la Chine de son «immunité souveraine», qui, en droit international, protège les Etats contre toute action juridictionnelle de la part d’un autre Etat.

Le thème des réparations étant très populaire parmi ses partisans, quels que soient les obstacles insurmontables qui s’opposent à leur mise en œuvre, Donald Trump va sans doute continuer à enfoncer le clou avec l’espoir de tenir en haleine pendant encore au moins six mois ses électeurs férus de toute action qui rendrait à l’Amérique sa grandeur, (Make America Great Again), selon l’un des slogans fondateur de sa présidence.

Depuis le début de la semaine le «Barnum» électoral du président américain s’est de nouveau ébranlé à l’assaut de la citadelle démocrate : les gouverneurs des Etats, qui rejettent le dé-confinement dans les conditions précaires actuelles, et son rival pour la présidentielle de novembre, Joe Biden, qu’il dit vouloir «achever» avant le scrutin.

Alors que Trump a profité à fond de la pandémie pour occuper la scène médiatique – une conférence de presse quotidienne à la Maison Blanche – Joe Biden, 78 ans, était, par la force des choses, confiné, n’arrivant pas à placer un seul mot dans le déluge de discours assénés par son rival aux Américains pris de peur en raison de la pandémie, bien sûr, mais aussi d’un chômage galopant : plus de trente millions de nouveaux demandeurs d’emploi en quelques semaines. À ces sinistrés, Trump a promis une année 2021 «formidable».

Joe Biden à la recherche de la «pilule miracle»

Joe Biden reste, pour sa part, à la recherche de la «pilule miracle» qui pourrait enfin doper sa campagne électorale qui bat de l’aile depuis son démarrage. Il pourrait ainsi appeler une femme à partager son ticket pour la vice-présidence, si jamais il est élu. Un pari qu’aucun candidat, Démocrate ou Républicain, n’a jamais gagné jusqu’à présent, mais sur lequel ses «spin doctors» tablent pour donner plus de «pep’s» à sa campagne d’une très grande fadeur. Le pari est risqué en effet face à un Donald Trump qui n’hésitera pas à déployer le riche arsenal sexiste qui enchante ses électeurs, majoritairement misogynes, comme il l’avait fait devant Hilary Clinton, son adversaire lors de la dernière présidentielle, qu’il avait malmenée sans ménagement.

À 78 ans, l’ancien vice-président de Barack Obama va devoir choisir une colistière suffisamment solide et reconnue, qui pourrait prendre les rênes au pied levé en cas de vacance du pouvoir.

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