La nouvelle, tombée ce lundi 9 novembre 2020, annonçant le développement par Pfizer et son partenaire BioNtech d’un vaccin efficace à 90% contre la Covid-19, a fait les manchettes de toute la presse de par le monde, suscitant une vague d’optimisme et une lueur d’espoir à la planète tourmentée par cette pandémie. Mais le match n’est pas encore vraiment joué.
Par Dr Abderrahmane Cherfouh *
Ce vaccin tant espéré et attendu depuis l’apparition du coronavirus va nous permettre de sortir de ce long et fatiguant cauchemar qui a trop duré. Pour ce faire et pour que tout cela soit concrétisé sur le terrain, ça doit prendre un certain temps, environ une autre année pour que ce vaccin soit à la portée de nous tous qu’on soit pauvre ou riche.
Il va sans dire que le développement de ce vaccin qui relève du miracle va réjouir tous les êtres humains aux quatre coins de la planète qui peuvent pousser un soupir de soulagement tout en attendant de pouvoir en bénéficier et voir le danger s’éloigner.
Ceci est l’aboutissement de tout un rêve : «Un petit vaccin pour l’homme, un pas de géant pour l’humanité», pour emprunter la phrase mythique de Neil Armstrong quand il a marché pour la première fois sur le sol lunaire.
Nous n’allons pas tous mourir de la Covid-19
Enfin, il était temps ! Nous n’allons pas tous mourir de la Covid-19. Nous l’avons échappé belle! L’heure de l’extinction de la race humaine n’a pas encore sonné. Pas au vingt-et-unième siècle quand même. Nous n’allions pas continuer à rester confinés éternellement chez nous et à compter les morts et le nombre des contaminés à longueur de journée, ni à surveiller les courbes qui montent et descendent au gré des contaminations par le virus qui lui savourait la joie et le bonheur de jouer avec nos nerfs avec délectation. Bientôt, nous allons finir par avoir sa peau, lui qui cherchait à avoir la nôtre. Il y a de quoi pavoiser et de s’enthousiasmer.
De tout temps, l’homme a su faire face aux aléas de la nature et aux dures épreuves de la vie. Il a toujours réussi à faire des miracles, à contourner les obstacles qui se sont dressés devant lui et à pouvoir sortir sa tête de l’eau ne s’avouant jamais vaincu même en laissant parfois des plumes.
Ainsi Pfizer et son partenaire BioNtech ont réussi les premiers à franchir la troisième étape de leur essai avant de pouvoir demander l’homologation de leur vaccin. La production de doses a déjà commencé. Le géant pharmaceutique mondial pense arriver à produire 50 millions de doses de vaccin avant la fin de cette année et 1,3 milliard en 2021. Les premiers à pouvoir être approvisionnés et en bénéficier seront bien-entendu les trois grandes puissances qui ont collaboré et conjugué leurs efforts pour développer ce vaccin à savoir l’Allemagne (BioNtech) les États-Unis (Pfizer) et la Chine (Fosun).
La Tunisie aura besoin de 24 millions de doses
Il y a aussi toute une série de paramètres à prendre en ligne de compte par rapport à ce vaccin qui doit nécessiter l’administration de deux doses espacées de 21 jours. Pour cela il faut constituer un grand stock et une grande réserve en vue de pouvoir vacciner la totalité de la population de tout un pays. À titre d’exemple, il faut 2,8 milliards de doses de vaccin à la Chine pour vacciner toute sa population et 2,4 milliards de doses pour l’Inde. L’Algérie aura besoin de 90 millions de doses de vaccin et pour la Tunisie il faudra 24 millions.
Par ailleurs, un autre grand défi se présente à nous et qu’il faut pouvoir relever avec beaucoup de doigté et d’attention à savoir le transport et la conservation de ce vaccin qui exige une température de -75 C pour ne pas perdre son efficacité, ce qui peut constituer un autre grand inconvénient pour les pays pauvres et à budget limité à l’image du nôtre. Il faut donc se préparer en conséquence et pouvoir disposer d’équipements de pointe et adéquats et avoir un personnel humain bien formé et très qualifié pour éviter tout risque.
Toujours est-il qu’il faut aussi apprendre à tempérer nos ardeurs et à ne pas crier victoire tout de suite. Le chemin est encore long et il est toujours semé d’embuches. Il faut être patient et ne pas baisser la garde. La pandémie est toujours présente dans nos lignes intérieures et redouble même de férocité et de virulence. La deuxième vague bat son plein et continue à nous mener la vie dure. Il faut tenir bon et être conscient du danger que véhicule ce virus. Il faut une discipline de fer, une collaboration et une solidarité à toute épreuve face à ce redoutable ennemi qui continue à faire des dégâts considérables et à hanter nos jours et nos nuits.
En d’autres termes, les recommandations et les mesures prises par les autorités sanitaires du pays ne doivent pas être prises à la légère, au contraire, elles doivent être respectées à la lettre pour essayer autant que faire se peut de limiter les dégâts et pour que les hôpitaux ne soient pas submergés par le nombre élevé de malades contaminés. Le personnel de la santé tous corps confondus qui combat sur le front, et parfois au prix de sa vie, crie son désarroi et n’en peut plus, faute de moyens, à faire face à l’afflux considérable de malades qui eux ont le droit d’être pris en charge et soignés.
Ceci dit, mis à part Pfizer et BioNtech qui ont déjà développé un vaccin, la concurrence fait rage entre les autres laboratoires qui mènent une course effrénée pour créer eux aussi un vaccin. Ils sont à pied d’œuvre depuis l’apparition de cette pandémie et leurs savants et chercheurs travaillent d’arrache-pied, nuit et jour, à l’ombre, loin des feux de la rampe, ne rechignant jamais à la tâche pour arriver à leur fin.
De multiples essais sont en cours pour tester d’autres médicaments, certains sont en voie d’être bientôt finalisés et couronnés de succès, d’après les échos et les messages qui nous parviennent par presse interposée. Cette rude concurrence vers la recherche et le développement d’une multitude de vaccins fera notre bonheur à tous. En ce sens, que plus il y a de vaccins et plus leur coût devient abordable. Mais au-delà de l’enjeu financier qui doit être colossal, la santé n’a pas de prix. Bien entendu, cet aspect financier et cette course vers le gain de la part des laboratoires va donner du grain à moudre à tous les adhérents aux thèses complotistes et conspirationnistes qui vont sauter sur l’occasion pour développer non pas un vaccin mais pour mieux étayer leur thèse qui consiste à accuser les laboratoires d’avoir créé ce coronavirus pour ensuite développer un vaccin et le commercialiser dans le but des s’enrichir sur notre dos.
* Médecin algérien résidant au Canada.
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