Selon le Fonds monétaire international (FMI), la Tunisie est confrontée à deux défis immédiats : sauver des vies et des moyens de subsistance jusqu’à ce que la pandémie de la Covid-19 s’atténue, et commencer à ramener les déséquilibres économiques sur une trajectoire durable.
Un plan de réforme crédible et soutenu par la société tunisienne et les partenaires internationaux de développement est essentiel pour contribuer à une croissance durable et inclusive à moyen terme. Les autorités sont ainsi encouragées à continuer de renforcer les filets de protection sociale et à accroître les investissements publics.
Une équipe des services du FMI dirigée par Chris Geiregat a mené une mission à distance du 9 au 18 décembre 2020 et du 4 au 13 janvier 2021 dans le cadre de la consultation de 2020 au titre de l’article IV avec la Tunisie.
À l’issue de la mission, M. Geiregat a fait la déclaration suivante:
«Covid-19 a frappé durement la Tunisie. La mission du FMI tient à exprimer ses condoléances et sa solidarité à tous les Tunisiens touchés par la pandémie et salue ceux qui ont travaillé sans relâche pour sauver la vie de leurs concitoyens.
«Les autorités ont réagi de manière proactive à l’épidémie de Covid-19, en apportant un soutien immédiat au secteur de la santé, aux personnes touchées et aux entreprises. Pourtant, les services du FMI estiment que le PIB réel s’est contracté d’un niveau sans précédent de 8,2% en 2020, entraînant une augmentation de la pauvreté et du chômage. Le déficit du compte courant devrait s’être réduit en réponse à une forte baisse de la demande d’importations et à des envois de fonds résilients, malgré un coup dur sur les exportations et l’effondrement des recettes touristiques.
On estime que le déficit budgétaire s’est creusé pour atteindre 11,5% du PIB, notamment en raison de la baisse des revenus, d’une masse salariale plus élevée et des transferts supplémentaires aux entreprises publiques.
«Les services du FMI s’attendent à ce que la croissance du PIB rebondisse à 3,8% en 2021 alors que les effets de la pandémie commencent à diminuer. Cependant, il existe des risques de baisse considérables autour de cette projection de référence, en particulier compte tenu de l’incertitude quant à la durée et l’intensité de la pandémie et au moment de la vaccination.
«Les services du FMI et les autorités conviennent que la Tunisie est actuellement confrontée au double défi de sauver des vies et des moyens de subsistance jusqu’à ce que la pandémie s’atténue, tout en commençant à ramener les déséquilibres budgétaires et extérieurs sur une trajectoire durable. Ainsi, il est essentiel de prioriser strictement les dépenses de santé et de protection sociale, tout en contrôlant la masse salariale, les subventions énergétiques mal ciblées et les transferts aux entreprises publiques. Le budget 2021 vise à atteindre cet équilibre, le déficit budgétaire devant se réduire à 6,6% du PIB. Cependant, des mesures spécifiques sont nécessaires pour soutenir cet objectif et, en leur absence, le personnel prévoit un déficit plus élevé de plus de 9% du PIB. Le personnel encourage les autorités à continuer de renforcer les filets de sécurité ciblés et à favoriser les investissements publics propices à la croissance.
«Les perspectives à moyen terme et la viabilité de la dette publique dépendent de l’adoption par les autorités d’un plan de réforme crédible et bien communiqué qui bénéficie de la forte adhésion de la société tunisienne et des partenaires internationaux de développement. À cette fin, il serait essentiel d’obtenir le soutien des parties prenantes concernées sur les questions relevant de leur compétence. Un tel «pacte social» pourrait couvrir la masse salariale de la fonction publique (actuellement parmi les plus élevées au monde), la réforme des subventions, le rôle des entreprises publiques dans l’économie, le secteur informel, l’équité fiscale, les réformes anti-corruption et l’environnement des affaires.
«Plusieurs grandes entreprises publiques sont aux prises avec des dettes, ont accumulé des arriérés et bénéficient de garanties gouvernementales, qui présentent toutes des risques fiscaux et financiers. Le FMI salue les efforts des autorités pour commencer à démêler et résoudre certains des arriérés croisés, et encourage les autorités à adopter un plan de réforme à moyen terme qui: (i) «trie» les entreprises publiques en fonction de leur viabilité financière, de leur importance stratégique et de la nature de leurs activités; (ii) centralise leur contrôle dans une seule entité; (iii) renforce la gouvernance d’entreprise; et (iv) améliore la transparence et les rapports financiers.
L’amélioration de la situation financière du système d’assurance sociale réduirait également les risques budgétaires.
«La politique monétaire de la Banque centrale de Tunisie (CBT) a contribué à soutenir le crédit et la liquidité, tandis que l’inflation continuait de baisser. Les services du FMI exhortent les autorités à éviter un futur financement monétaire du gouvernement, car il risque d’annuler les gains réalisés en termes de réduction de l’inflation, pourrait affaiblir le taux de change et les réserves internationales et compromettre la stabilité financière. La politique monétaire devrait continuer à se concentrer sur l’inflation en orientant les taux directeurs, tout en préservant une flexibilité bilatérale du taux de change.
La BCT devrait surveiller de près le secteur financier, car le plein impact de la pandémie sur le secteur financier n’a pas encore été observé.
«Pour accroître le potentiel et une croissance inclusive, il faudra davantage d’initiative et de concurrence du secteur privé, notamment en supprimant les monopoles et autres distorsions. Le personnel se félicite de l’objectif des autorités de couvrir au moins 30% de ses besoins énergétiques grâce aux énergies renouvelables d’ici à 2030, ce qui contribuerait à lutter contre le changement climatique et à diversifier l’approvisionnement énergétique. Les réformes visant à promouvoir la lutte contre la corruption, la bonne gouvernance et la transparence devraient être des thèmes transversaux pour les années à venir.»
Depuis 2013, la Tunisie a bénéficié de deux accords (un accord de confirmation et une facilité de financement élargie) avec le FMI. Le 10 avril 2020, le Conseil d’administration du FMI a approuvé le décaissement d’un instrument de financement rapide pour soutenir la réponse des autorités tunisiennes à la pandémie.
Source : communiqué.
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