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Pourquoi les Russes ne viendront pas cet été en Tunisie

On n’a rien fait pour garder cette clientèle qui manquera cet été à nos hôteliers. Au contraire, on a fait tout pour la perdre.

Alors qu’elle s’apprêtait à accueillir 650.000 touristes russes pour sauver son secteur touristique de l’effondrement, la Tunisie, sous la pression des Américains, envoie son ministre de la Défense nationale assister à la Conférence de Ramstein, en Allemagne, le 26 avril 2022, et dont le but est de «remuer ciel et terre» pour affaiblir la Russie. Un geste insensé qui ne sert pas les intérêts de notre pays, dans la mesure où le conflit russo-américain ne nous concerne pas directement, que nous sommes un petit pays et que nous avons besoin de garder de bonnes relations avec toutes les parties. Allez parler de souveraineté nationale après ça !

Par Habib Glenza

Le secteur touristique tunisien dispose de plus de 1000 hôtels toutes catégories confondues, dont seuls 300 aujourd’hui destinées à la vente, les autres faisant face à de graves difficultés financières.

En dépit d’une structure hôtelière de choix et de services touristiques variés, le tourisme tunisien n’a pas encore atteint le seuil de la rentabilité en raison du bradage des prix, du diktat des grands TO et du taux moyen de remplissage de la capacité d’hébergement, estimée à plus 250.000, ne dépassant pas les 50%!

En effet les recettes de la saison 2019 sont inférieures à celles de l’année 2010, si l’on prend en considération les valeurs de l’euro en 2010 (1,5 DT) et en 2019 (3,5 DT)

Les touristes russes ne tombent pas du ciel !

Certes, aujourd’hui la situation est beaucoup plus difficile pour le tourisme mondial, en raison de la pandémie de la Covid-19 et du conflit russo-ukrainien. Cependant, il ne faut pas s’attendre à ce que les touristes tombent du ciel.

Alors qu’elle s’apprête à accueillir cette année 650.000 touristes russes pour sauver le secteur touristique de l’effondrement, la Tunisie, sous la pression des Américains, envoie son ministre de la Défense nationale assister à la Conférence de Ramstein qui s’est tenue le 26 avril 2022 et dont le but est de «remuer ciel et terre» pour affaiblir la Russie. Un geste insensé qui ne sert pas les intérêts de la Tunisie dans la mesure où le conflit russo-américain n’est pas notre affaire. En effet, la Tunisie n’appartient pas à l’Organisation du traité de l’atlantique nord (Otan), de même qu’elle n’est pas un fabricant d’armement militaire. En tout cas pas à notre connaissance, sauf si on nous cache des choses !

Ce faux pas fatal va nous coûter assez cher et il restera gravé dans la mémoire des dirigeants russes qui désormais vont traiter la Tunisie de pays «inamical».

Les conséquences de cette politique de dépendance envers l’Occident, qui ne date pas d’hier, font que désormais nous ne pouvons plus compter sur l’aide de la Russie dans les domaines stratégiques comme l’agriculture, l’énergie et le tourisme, vitaux pour notre pays.

Les Turcs et les Italiens remuent ciel et terre pour attirer les Russes

Nos concurrents directs (Egyptiens, Turcs, Italiens), eux, remuent ciel et terre pour ramener les touristes russes. Bien que les deux derniers pays fassent partie de l’Otan et imposent des sanctions à la Russie, ils cherchent quand même à sauver la saison touristique. La Covid-19 et le conflit russo-ukrainien ne les empêchent pas de ramener les touristes russes chez eux, «business is business». La Turquie, elle, n’hésite pas a utiliser le système de paiement russe MIR pour contourner les sanctions imposées à la Russie. Qu’attendons-nous pour faire autant ? Et qu’attend la Banque centrale pour étudier cette éventualité ?

Les géants américains du paiement par carte Mastercard et Visa ont suspendu leurs activités avec la Russie dans le cadre des sanctions américaines contre Vladimir Poutine. La Turquie a cependant trouvé un moyen pour contourner ce blocus. Les touristes russes peuvent accéder à leur argent via le système de paiement russe Mir que la Russie a créé et mis en place en 2014.

Selon la Banque centrale de Russie, les cartes Mir utilisées pour les transferts d’argent sont utilisées dans toute la Russie et dans douze autres pays, dont l’Arménie, le Kirghizistan, le Kazakhstan, la Biélorussie, le Vietnam et Chypre, le nombre de cartes Mir émises dépasse 113 millions. Et ce chiffre va sans doute augmenter dans les prochains mois.

Les paiements en Mir sont désormais acceptés en Turquie par trois banques : Isbank, Ziraat Bankasi et VakifBank. Isbank, faisant référence aux relations commerciales entre les deux pays, les cartes Mir sont acceptées dès 2019. Les banques travaillent à une utilisation plus large de ce système, bien que la banque centrale ukrainienne ait appelé la Turquie à arrêter toutes les transactions utilisant des cartes du système de paiement russe.

Pac Group, l’un des voyagistes les plus importants du marché italien, a constaté une augmentation significative des réservations de vacances en Italie, également parmi les Russes, depuis la mi-avril.

Les Russes envisageant de se rendre à l’ouest doivent donc inclure dans leurs plans de départ un transfert en Serbie ou en Turquie, qui n’ont pas instauré d’interdiction de vol.

Les Russes réservent désormais des voyages en Italie principalement pour mai et juin. Aujourd’hui, la part du lion des réservations est constituée de voyages dans des villes italiennes populaires : Rome, Venise, Florence et Vérone. Les vacances au bord de la mer ont aussi la cote (Rimini, Sicile, Sardaigne), indique un expert de Pac Group, cité par Russian Travel Digest, et d’ajouter que la durée moyenne du voyage est de 3 à 7 nuits, tandis que pour les vacances à la mer et dans les thermes, elle est de 7 à 14 nuits.

Une famille russe de deux adultes et un enfant pour un voyage (vol plus 7 nuitées) dans un bon hôtel en demi-pension coûte la bagatelle de 3 740 euros, soit plus de 13.000 DT! Calculez le manque à gagner pour notre pays !

Les spécialistes de Pac Group rapportent que la grande majorité des touristes se rendant en Italie cette année décident de séjourner dans des hôtels 4-5 étoiles.

Morale de l’histoire : la Tunisie s’engouffre de plus en plus dans les ténèbres du néant, grâce à l’attitude passive de son peuple, à l’inertie de ses responsables politiques et à l’absence d’une politique étrangère proactive et efficace.

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