Le président de la république Kaïs Saïed a attendu que soit calmée la tempête déclenchée par le récent drame de la migration clandestine à Zarzis pour intervenir enfin sur cette question, en insistant sur la dimension internationale de ce fléau social, comme pour justifier les manquements reprochés à l’Etat tunisien à ce sujet et renvoyer la patate chaude aux pays d’accueil.
Par Imed Bahri
Lors de sa rencontre avec le ministre de l’Intérieur, Taoufik Charfeddine, et le directeur général de la Sûreté nationale, Mourad Saidane, mardi 25 octobre 2022, au palais de Carthage, le président Kaïs Saïed a évoqué, en particulier, le phénomène de la migration irrégulière, qui s’est aggravé dans la période récente et a causé de nombreuses tragédies, dont la plus récente est celle de Zarzis, qui a suscité une forte émotion et une grande polémique dans le pays sur ce qui a été qualifié d’«absence des autorités» ou leur «manque d’engagement dans la recherche des corps des victimes et l’assistance à leurs famille.»
Au-delà des frontières
Lors de la rencontre, le président de la république a indiqué que «ces drames ne se seraient pas produits si leurs causes avaient été éliminées», ce qui sonnerait comme une lapalissade, mais le président a sans doute voulu insister sur les causes socioéconomiques du phénomène, auquel on ne saurait remédier sans une réduction des écarts de développement entre le nord et le sud de la Méditerranée.
C’est que Saïed a voulu dire en ajoutant que «les véritables solutions ne peuvent être trouvées au niveau national» et qu’«au contraire, ce phénomène qui fait des milliers de morts dans de nombreuses régions du monde doit être abordé avec la coopération des pays où vont les migrants parce que les réseaux de trafic de migrants vont au-delà des frontières d’un pays particulier», a encore noté le communiqué de la présidence, qui a insisté sur «le besoin d’efforts concertés, non seulement au niveau national, mais aussi au niveau international».
La coopération internationale en question
On remarquera toutefois au passage que le président de la république, qui souligne souvent la nécessité d’une approche globale du problème de la migration illégale, a finalement tenu à le situer, cette fois, dans un contexte purement sécuritaire en l’évoquant seulement avec les hauts responsables de la sécurité, alors que la question concerne aussi les départements des Affaires sociales et des Affaires étrangères.
C’est pourquoi, un conseil ministériel restreint consacré à la migration illégale et les moyens d’y faire face, et auquel prendraient part tous les départements concernés, serait utile voire urgent pour montrer l’engagement de la Tunisie dans une «approche globale» de ce problème. D’autant que la coopération avec les autres pays concernés par le phénomène, notamment européens, a beaucoup évolué ces dernières années vers une gestion plus concertée, sur les plans aussi bien sécuritaire qu’économique et social, mais il reste beaucoup à faire également avec les pays d’Afrique subsaharienne, grands émetteurs de migrants illégaux qui considèrent la Tunisie comme un pays de transit, où ils gagnent l’argent de la traversée et prennent contact avec les réseaux de trafiquants.
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