Le film tunisien « Sous les figues » d’Erige Sehiri figure dans la compétition officielle des Journées cinématographiques de Carthage (JCC 2022). Un premier long-métrage de fiction de la jeune cinéaste tunisienne qui a sillonné les grands festivals internationaux et qui se place comme l’un des favoris de cette édition des JCC grâce à son originalité, son esthétique et sa véracité.
Par Fawz Benali
Après son remarquable premier long-métrage documentaire « La voie normale » (2018), la jeune cinéaste tunisienne Erige Sehiri signe une première expérience dans la fiction qui a marqué les esprits lors de ses passages dans de grands festivals internationaux à Cannes, à Venise, à Londres, à Toronto …
Erige Sehiri, une étoile montante du cinéma tunisien
« Sous les figues » qui a récemment remporté le Bayard d’or au Festival international du Film francophone de Namur (Belgique), vient de faire sa première tunisienne dans le cadre de la 33e édition des JCC où il est en lice pour le Tanit d’or; il représente aussi la Tunisie dans la course aux Oscars 2023.
Tout comme Kaouther Ben Hania ou Leyla Bouzid, Erige Sehiri fait partie de cette nouvelle génération de réalisatrices tunisiennes qui ne cessent de nous surprendre en bousculant les vieux codes du cinéma tunisien. Avec « Sous les figues », Erige Sehiri est en effet sortie des sentiers battus pour poser un nouveau regard sur la société tunisienne en plantant le décor de son film au milieu d’un champ de figuiers pour suivre une journée typique dans le quotidien d’un groupe d’hommes, de femmes, de jeunes et de moins jeunes durant la récolte estivale.
« Tout a commencé il y a exactement deux ans quand j’ai rencontré ces jeunes filles, ces dames et ces hommes qui cueillaient des cerises à Makthar, en Tunisie. Leurs histoires personnelles m’ont émues. J’ai décidé de changer le film que je préparais à ce moment là et j’ai commencé à écrire Sous les figues « , confie Erige Sehiri qui a choisi l’unité de tempe et de lieu avec un récit qui commence quand un groupe de cueilleurs, entassés les uns sur les autres, prennent la route pour une longue et laborieuse journée de travail sous un soleil écrasant et sous le regard impitoyable de leur chef.
Des acteur amateurs époustouflants
Pour sa première expérience dans la fiction, la réalisatrice a misé sur des acteurs amateurs, ce qui ne leur a pas empêché de briller de justesse sur le grand écran, un choix qui a d’ailleurs servi le film en lui donnant par moment un air de documentaire. Le film qui a été pensé comme un huis-clos à ciel ouvert fait écho à ce sentiment d’étouffement que connaissent beaucoup de jeunes Tunisiens face au manque d’opportunité.
La réalisatrice a su mettre en évidence le jeu d’ombre et de lumière pour faire ressortir tout le potentiel de ces visages solaires, mais aussi et surtout pour soulever des sujets sociétaux alarmants de la société tunisienne, comme la condition des travailleurs agricoles, la précarité, le manque d’horizons pour les jeunes, le poids du patriarcat et le harcèlement sexuel.
Tant de sujets traités avec subtilité dans un film qui n’a toutefois pas manqué d’humour et de tendresse grâce à des dialogues plus vrais que nature où on parle amour, désir, chagrin de cœur et sexualité, le tout sublimé par une mise en scène savamment orchestrée.
« Sous les figues » est un film dont on ne sort pas indifférent. Touchant par sa « simplicité », il témoigne d’un grand savoir-faire et d’un immense talent. Le film est en lice pour le Tanit d’or dans la catégorie des longs-métrages de fiction.
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