Gros plan : ‘‘Saffeh Nabeul’’ ou le périple criminel d’un tueur en série

C’est dans une salle archicomble que s’est déroulée vendredi dernier au cinéma le Colisée  l’avant-première du film ‘‘Saffeh Nabeul’’ ou ‘‘Even God Won’t Forgive’’, qui sort en salle aujourd’hui, mercredi 21 décembre 2022.

Par Samir Messali

Enfin un film tunisien qui sort des sentiers battus, et un film d’auteur de surcroît, cher aux cinéastes tunisiens, même s’il est souvent boudé par une large partie du public. Espérons que ce ne sera pas le cas pour celui-ci, qui traite d’un sujet à forte portée émotionnelle et à résonnance sociale.

C’est aussi un film d’un  genre presque inconnu du cinéma tunisien, celui du film criminel. Genre où le producteur, Majdi  Housseini, et le réalisateur, Karim Berrhouma, ont choisi de nous présenter une histoire inspirée de la fameuse affaire du tueur en série de la fin des années 80, celle de Naceur Damergi plus connu sous le nom de Saffeh Nabeul, le dernier condamné à mort qui a vu sa condamnation exécutée en Tunisie au milieu des années 1990, avant que la peine de mort ne fasse l’objet d’un moratoire officiel.

Le profil psychologique d’un tueur

L’histoire du film tourne autour des assassinats en série de pas moins de 13 enfants commis par Naceur, magistralement interprété par Ahmed Landolsi, dont le réalisateur a réussi, au fil des scènes, à brosser le portrait psychologique à travers ses relations avec un père qu’il n’a presque pas connu, une mère soumise et maltraitée et un beau-père violent.

Naceur Damergi.

Parallèlement à la présentation du profil du tueur et de l’horreur de ses crimes, le film a réussi à  dénoncer les mauvaises conditions carcérales dans les prisons tunisiennes et aussi les pratiques policières violentes lors des enquêtes  criminelles. Cependant, cette dénonciation a pris le pas sur le déroulement de l’enquête criminelle, qui est une composante importante dans ce genre de film.

De même, le film a omis de décrire la psychose suscitée sur la population par une affaire qui a quand même défrayé la chronique en son temps et qui a suscité l’angoisse et la peur chez les habitants de la région du Cap Bon, mais pas seulement.

Plaidoyer contre la peine de mort

Le film a été aussi l’occasion de dénoncer l’atrocité de la peine de mort, peine d’un autre temps que Naceur a été le dernier à subir en Tunisie. On peut apprécier ou pas un tel plaidoyer qui, dans tout film, ne doit pas prendre le pas sur le récit ni casser le rythme de la narration.    

Pour une première expérience d’un long métrage tant pour le réalisateur que pour le producteur, on peut dire que le film est une réussite sachant qu’il n’a pas bénéficié de subvention de la part du ministère des Affaires culturelles. D’ailleurs, le film aurait été mieux réussi s’il avait bénéficié de moyens plus importants. Cela ne l’a pas empêché de remporter le Prix spécial du jury au dernier Festival du film francophone du Caire, alors que beaucoup de films subventionnés n’ont pas eu cet honneur. Un film à voir absolument notamment pour les amateurs du genre, mais il faut signaler qu’il s’agit d’un film pour adulte parce qu’il contient des scènes assez violentes.

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