Une initiative de dialogue national pour sortir la Tunisie de la crise sera soumise au président de la république, Kaïs Saïed, «puisque sa légitimité lui est conférée par les urnes», a indiqué le bâtonnier de l’Ordre des avocats tunisien, Hatem Mziou.
Dans une déclaration aux médias lors d’un meeting de protestation organisé jeudi 5 janvier 2023, par un groupe d’avocats dans le cadre d’une Journée nationale de la colère, à l’entrée du Palais de justice de Tunis, Me Mziou, qui pilote cette initiative avec le secrétaire général de Union générale tunisienne du travail (UGTT), Noureddine Taboubi, et le président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH), Me Bassem Trifi, a déclaré que les «consultations sur l’initiative de dialogue sont en cours», ajoutant : «Nous ne voulons pas présenter une initiative vouée à l’échec».
Cette initiative doit être globale et inclusive avec de vraies solutions économiques et sociales et pas seulement politiques, a dit Me Mziou. D’où son insistance pour y associer le président de la république, malgré les réserves qu’inspire ce dernier pour son refus de prêter l’oreille à toute position qui ne soit pas conforme aux siennes. D’où aussi la focalisation de ses attaques contre le gouvernement Najla Bouden qu’il accuse de «ne pas se soumettre aux recommandations du chef de l’État en supprimant les subventions», alors que Me Mziou sait pertinemment que les membres du gouvernement ne décident rien tous seuls et qu’ils ne font qu’exécuter les instructions de Kaïs Saïed, lequel détient la totalité des pouvoirs, et plus encore.
Les participants à la Journée nationale de colère ont brandi plusieurs banderoles exprimant le refus par le barreau du décret-loi n°2022-79, portant sur le budget de l’Etat de 2023.
Sur un autre plan, le bâtonnier de l’Ordre des avocats a déclaré que la Tunisie connaît un recul de l’État de droit, de la démocratie, des droits et libertés et de l’appareil judiciaire.
«Les avocats ne peuvent pas fermer les yeux ou rester inactifs, notamment à la lumière de l’ensemble des décrets publiés récemment et du retour aux procès de masse», a-t-il ajouté, en réaffirmant l’engagement du Barreau à s’opposer «aux diverses formes de tyrannie» et à se tenir aux côtés du peuple pour construire un État civil démocratique fondé sur les valeurs de justice sociale, de droits et libertés et d’alternance au pouvoir.
Le décret n° 54, qui porte atteinte aux droits et libertés, ne peut être ni toléré ni accepté, a ajouté Me Mziou, condamnant les procès collectifs d’avocats, de militants politiques et des droits de l’homme et de journalistes. «Les avocats n’ont pas peur de descendre dans la rue ou de reprendre le combat pour défendre un État civil et démocratique où le droit prévaut, dans le cadre d’une justice équitable», a-t-il lancé
Le bâtonnier a aussi noté que les tribunaux attendent toujours le mouvement annuel dans le corps de la magistrature, qui dort encore dans les tiroirs de la présidence de la république. De nombreux palais de justice manquent de procureurs, notamment le tribunal de Tunis, et la cour d’appel reste sans premier président.
Sur un autre plan, Mziou a souligné que la loi de finances 2023 s’apparente à la «Medjba», cet impôt exorbitant et arbitraire qui était à l’origine du soulèvement de 1864, mettant en garde contre les risques graves d’une nouvelle révolution.
Il est possible de se remettre sur les rails et d’éviter le pire, a-t-il cependant indiqué, exhortant les autorités à rectifier le tir, à entreprendre des réformes sérieuses et profondes et à impliquer toutes les couches de la société, y compris les organisations, dans une démarche participative inclusive.
I. B. (avec Tap).
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