Nous reproduisons ci-dessous le communiqué de l’organisation Amnesty International, publié le 18 mai 2023, suite à la condamnation de l’ancien président du parlement Rached Ghannouchi à un an de prison.
La décision d’un tribunal tunisien de condamner à la prison Rached Ghannouchi, figure de l’opposition, en vertu de la loi antiterroriste tunisienne, met en évidence une campagne de plus en plus intense contre le plus grand parti du pays, qui s’inscrit dans le cadre d’une campagne de répression contre les dissidents et les critiques présumés du président Kaïs Saïed, a déclaré Amnesty International aujourd’hui.
Le 15 mai, le tribunal antiterroriste tunisien a condamné Ghannouchi, le chef du parti d’opposition Ennahdha, à une peine d’un an de prison et à une amende pour des propos publics tenus lors d’un enterrement l’année dernière.
«Les autorités tunisiennes utilisent de plus en plus des lois répressives aux termes vagues comme prétexte à la répression et pour arrêter, enquêter et, dans certains cas, poursuivre des dissidents et des personnalités de l’opposition. La condamnation de Rached Ghannouchi témoigne d’une répression croissante des droits humains et de l’opposition, ainsi que d’un schéma profondément inquiétant», a déclaré Rawya Rageh, directrice adjointe par intérim d’Amnesty International pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.
«Condamner le chef du plus grand parti du pays sur la base de remarques publiques qu’il a faites il y a un an – simplement en exerçant son droit à la liberté d’expression – est une autre indication des motivations politiques derrière ces poursuites en cours», a-t-elle ajouté.
Le 22 février 2022, Ghannouchi a fait des déclarations lors d’un enterrement dans lesquelles il a salué le défunt comme un «homme courageux» qui ne craignait pas «ni un dirigeant ni un tyran».
Dans une décision du 15 mai, le tribunal antiterroriste tunisien a condamné Ghannouchi sur la base de ces propos, a déclaré l’avocate Zeineb Brahmi, membre du comité de défense juridique de Ghannouchi et chef du bureau juridique d’Ennahdha.
Ghannouchi fait l’objet d’une enquête dans diverses autres affaires pénales, mais il s’agit de la première condamnation contre lui depuis la révolution de 2011.
Le tribunal a condamné Ghannouchi en vertu de l’article 14 de la loi antiterroriste tunisienne de 2015, qui prévoit jusqu’à la prison à vie ou la peine de mort, selon les circonstances exactes, pour des propos incitant à la haine religieuse. Les membres du comité de défense de Ghannouchi affirment qu’ils n(ont pas été informés d’une audience ou d’une condamnation imminente.
Le 18 avril, les autorités ont lancé une perquisition approfondie du siège du parti Ennahdha à Tunis et, selon un communiqué du parti, ont interdit la tenue de réunions dans ses bureaux à travers le pays.
Depuis qu’il a proclamé l’état d’urgence en 2021, le président Saïed a publié des décrets-lois et adopté une constitution qui lui confère une influence sur le pouvoir judiciaire, y compris le pouvoir de révoquer les juges sans préavis. Il a également publié des décrets-lois imposant de lourdes peines de prison sur la base de termes ambigus tels que «fausses nouvelles» et «rumeurs».
L’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et l’article 9 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, tous deux ratifiés par la Tunisie, garantissent le droit à la liberté d’expression.
L’article 9 du PIDCP et l’article 7 de la Charte africaine obligent également les autorités tunisiennes à respecter le droit à un procès équitable.
Communiqué traduit de l’anglais.
Texte original: Amnesty International.
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