Samedi 15 juin 2024, à Paris et dans plusieurs villes de France, des centaines de milliers de Français ont manifesté contre l’extrême droite, en réponse à l’appel d’un large front uni de syndicats, d’associations et de la coalition de gauche du Nouveau Front populaire (NFP), l’alliance des partis de gauche pour les élections législatives anticipées.
Reportage de Abdellatif Ben Salem
Dans le cortège, beaucoup de slogans appelaient à faire barrage au Rassemblement national (RN), qui a remporté les dernières élections européennes et qui frappe désormais aux portes du pouvoir.
À Paris, la manifestation partie de la place de la République vers Nation a rassemblé 250 000 personnes selon les organisateurs, 75 000 selon la préfecture de police. Au total, la CGT, principale partie organisatrice, a dénombré 640 000 manifestants au sein de 182 rassemblements en France.
Les manifestants, sous le double choc d’une dissolution de l’Assemblée nationale prononcée au moment où l’extrême droite progresse jusque dans les villes, les manifestants étaient accueillis par les élus et les candidats du tout nouveau Front, qui, malgré les fossés séparant parfois ses composantes, est parvenu à présenter des candidats uniques dans chacune des 577 circonscriptions en moins d’une semaine pour les scrutins des 30 juin et 7 juillet.
Reconstruction de la gauche
«Je ne veux pas vivre dans une France raciste et fasciste», a lancé une jeune manifestante originaire de Martinique. «Nos ancêtres ont connu l’esclavage, c’est une évidence de défiler contre l’extrême droite aujourd’hui», explique son père. «Emmanuel Macron n’a jamais été un rempart à l’extrême droite, il en est le tremplin», se désole une étudiante. «C’est bien de manifester CONTRE l’extrême droite, mais je suis aussi venue manifester POUR la gauche !», dira une militante de gauche de 80 ans, qui se dit «convaincue qu’une reconstruction de la gauche est possible et nécessaire».
«À mon niveau, j’ai réuni une dizaine de listes de procurations, et je mets en contact ceux qui ne peuvent pas voter avec ceux qui le peuvent», dit Amine, père de famille de 37 ans, qui cherche à mobiliser un maximum de ses proches pour voter pour la liste du NFP. Au-delà des tensions internes, l’engagement des militants de gauche pour les élections législatives demeure intact. À l’instar d’Amine, qui croit dur au succès du NFP. «En multipliant nos efforts, je suis sûr que nous réussirons !», dit-il, avec conviction. Lui et sa famille veulent vivre dans un pays où leurs enfants pourront «grandir dans un climat de fraternité et sans discrimination».
Après la dissolution de l’Assemblée nationale par Macron, le spectre d’une victoire du RN aux élections législatives et de l’accession de la nouvelle coqueluche de l’extrême droite Jordan Bardella à Matignon galvanise les manifestants anti-RN. Sur des banderoles, de nombreux messages s’adressent à lui : «Ça va Barder là !» ou encore «Bardella, casse-toi, l’Europe n’est pas à toi!».
Avec 33% des intentions de vote, le RN est pressenti pour arriver nettement en tête au premier tour des législatives le 30 juin, devant le NFP (25%) et la majorité présidentielle (20%), selon un sondage Opinionway.