Les potins du cardiologue: facturer des stents en voie d’extinction, est-ce raisonnable ?

Les stents sont des entités dynamiques qui peuvent, au gré des opérations commerciales de fusion acquisition impliquant leurs fabricants, finir par disparaître. Cela ne remet nullement en cause leurs caractéristiques techniques. Ce dont il s’agit ici, c’est  de l’évolution qui voit certaines catégories de stents, qu’on dit nus parce que dépourvus de produits pharmaco-chimiques, finir par devenir obsolètes et disparaître, tout comme l’avaient fait avant eux les dinosaures.

Dr Mounir Hanablia *

Les stents nus sont donc en train de disparaître, disons en voie d’extinction, faute de demande, parce qu’ils ne génèrent plus les bénéfices escomptés médicaux ou commerciaux. Mais comme on le sait, si la santé n’a pas de prix, elle a un coût. Cette situation ne fait pas forcément le bonheur des caisses sociales, toujours à la recherche d’économies budgétaires, et qui doivent avant tout préserver leurs équilibres financiers.

Lors de l’apparition des stents actifs, le remboursement pendant quelques années n’avait été effectué que sur la base accordée aux stents nus. Les patients demandeurs de stents actifs assumaient simplement la différence alors importante des coûts, contrairement à la lettre et à l’esprit des conventions établies avec les établissements prestataires de soins.

Il avait fallu l’intervention de l’Etat  suite à une soudaine prise de conscience consécutive au sauvetage spectaculaire d’un homme politique terrassé par un infarctus du myocarde, pour que tous les patients puissent bénéficier des stents actifs entièrement pris en charge.

Cependant l’explosion de l’utilisation des stents actifs a imposé un supplément important de frais que seules des restrictions rigoureuses dans leur usage pouvaient laisser supporter. Le cas le plus typique concerne les diabétiques coronariens tritronculaires nécessitant l’usage de trois stents actifs.

Dans ce cas précis, le médecin qui remplit la demande de prise en charge voit celle-ci rejetée s’il requiert l’usage de trois stents actifs. Il est donc obligé de mentionner deux stents actifs et un stent nu s’il veut que sa demande soit prise en considération et que l’accord préalable de prise en charge soit concédé à son malade.

Ainsi un «compromis» fonctionnel a été instauré entre les intérêts financiers et les contraintes juridiques des administrations des organismes prestataires de soins ou de couverture médicale d’une part, et les intérêts des patients d’autre part, mais au détriment de la responsabilité médicale du médecin, obligé de prescrire un produit, le stent nu, dont l’usage n’est pas indiqué, et qui peut se retrouver sommé de se justifier face à la Justice, sur des considérations médicales inexistantes.

Mais à la limite, ce compromis qui valait ce qu’il valait a été dépassé par les faits avec la disparition du stent nu, qui n’existe pratiquement plus sur le marché pour les raisons précités. Malgré cela, le médecin souvent prisonnier des mauvaises habitudes qu’on lui impose continue de prescrire le stent nu sur sa demande de remboursement, et le patient de bénéficier de l’accord de remboursement à cet effet. Ceci évidemment est susceptible de soulever à l’avenir un problème pénal, que par les temps qui courent, il convient d’éviter, dans l’intérêt de toutes les parties.

Le plus simple est de réactualiser les conventions liant les organismes prestataires de soins à ceux en assumant les frais, en accord avec les derniers développements de la médecine. Plus qu’un souhait, c’est dans le contexte juridique précité, une urgence.

* Médecin de libre pratique.    

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