La Tunisie qui fait face, depuis plusieurs années, aux répercussions des changements climatiques (sécheresse, inondations et incendies), se trouve, aujourd’hui, à la croisée des chemins comme plusieurs pays et doit agir pour éviter l’aggravation de la situation, a indiqué Dina Ranarifidy, spécialiste principale en développement urbain à la Banque Mondiale (BM).
Intervenant au cours d’une conférence consacrée, vendredi 23 février 2024, à la présentation du rapport «Climat et Développement» publié par la BM en novembre 2023, Ranarifidy a souligné que les défis économiques et climatiques ne sont plus indépendants mais plutôt interconnectés. Et de rappeler que le rapport de la BM a fait ressortir trois axes prioritaires qui représentent les principaux défis; à savoir la pénurie d’eau (baisse des ressources en eau/personne de 66% et la chute de la production agricole de 33%), la vulnérabilité côtière et les inondations (pertes terrestres potentielles de 1,6 milliard de dollars…) et la dépendance vis-à-vis des énergies fossiles (augmentation des émissions nettes de 2,7%, soit un coût annuel de 6 milliards de dollars).
Les principaux défis à relever
Pour remédier à la pénurie d’eau, le document de la BM propose notamment la régularisation de la demande en plus de l’amélioration des approches de rationalisation et encourage les décideurs à développer davantage l’utilisation des techniques de dessalement de l’eau de mer en plus de la réutilisation des eaux usées.
Concernant la vulnérabilité côtière, Ranarifidy a rappelé que le rapport propose de renforcer la résilience de ces zones via des investissements dans des systèmes d’alerte précoce permettant de réduire les pertes liées aux catastrophes de 12,4 milliards de dollars par an et la création d’une chaîne de valeur touristique durable et résiliente.
S’agissant de la décarbonisation du secteur énergétique, la responsable a précisé que l’enjeu consiste à assurer en premier lieu la souveraineté énergétique, ajoutant que cette action permettra d’augmenter de 2% la productivité du travail et de développer de 10% l’économie de carburant.
Ces actions favoriseront l’amélioration de la situation macroéconomique, à savoir une croissance de 8,8% du PIB en 2030, une réduction de 78,1% des émissions Gaz à effets de serre (GES) et de 12% de la pauvreté, selon le scénario de la BM pour 2030, a-t-elle conclu.
Pour sa part, la ministre de l’Environnement Leila Chikhaoui a souligné que la Tunisie, bien qu’elle ne contribue qu’à hauteur de 0,007% aux émissions mondiales, reste pleinement engagée dans les efforts de lutte contre les effets des changements climatiques.
Le pays s’est lancé dans cette démarche à travers entre autres la signature de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, la soumission puis l’actualisation de sa contribution déterminée au niveau national (CPDN), ainsi que la stratégie nationale de transition écologique validée, le 3 février 2023, et qui a engagé tous les ministères, a-t-elle rappelé. Et d’ajouter que la Tunisie dispose d’un grand atout en matière d’absorption des émissions de carbone, à savoir les herbiers de posidonie qui poussent dans la mer et qui sont considérés comme des capteurs de carbone 10 fois plus importants qu’un arbre de l’Amazonie.
Elle a souligné dans ce cadre que la Tunisie rend des services éco-systémiques d’où la nécessité de l’appui des partenaires techniques et financiers pour renforcer cette résilience au bénéfice de la planète globalement.
Le coût des adaptations
A noter que les investissements cumulés nécessaires à la Tunisie pour garantir l’adaptation et l’atténuation des effets du changement climatique et la décarbonation du secteur de l’énergie, s’élèveraient à 54 milliards de dollars (environ 168,5 milliards de dinars) à l’horizon 2050, selon le «Rapport national sur le climat et le développement en Tunisie» (CCDR) publié, le 29 novembre 2023, par le Groupe de la Banque mondiale en prélude à la COP28.
Ces investissements se répartissent à raison de 17,055 milliards de dollars (52,8 milliards de dinars) pour remédier à la pénurie en eau, 2,23 milliards de dollars (6,9 milliards de dinars) pour accroître la résilience face à l’élévation du niveau de la mer et aux inondations et 34,67 milliards de dollars (107,3 milliards de dinars) pour assurer la transition énergétique et décarboner le secteur.
D’après Tap.
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