Début 2017, les Tunisiens ont quitté le Gabon en quarts de finale de la Coupe d’Afrique des nations. Dix mois plus tard, ils sont qualifiés pour la Coupe du monde 2018.
Par Hassen Mzoughi
Egypte, Maroc, Nigeria, Sénégal et Tunisie : les cinq représentants de l’Afrique à phase finale de la Coupe du monde de football en Russie (14 juin 2018-15 juillet 2018) ne constituent pas une surprise, car, au coup d’envoi des éliminatoires, ils faisaient partie des candidats sérieux à la qualification.
Ces heureux élus ont rendez-vous le 1er décembre prochain à Moscou avec le tirage au sort final de la compétition.
La confiance revient
La Tunisie avait pris la main sur le Groupe A dans son mano a mano avec la République démocratique du Congo (RDC), le 1er septembre à Tunis puis le 5 septembre à Kinshasa. En cinq jours, elle a empoché 4 points qui allaient s’avérer déterminants dans le décompte final. Menés en match retour 2-0 jusqu’à la 77e, les Tunisiens sont revenus de nulle part pour repartir avec le point du match nul (2-2), après l’avoir emporté à domicile 2:1. «Notre équipe a la force mentale nécessaire pour surmonter ces moments difficiles», avait alors souligné Youssef Msakni, l’un des grands artisans du retour de la Tunisie au premier plan.
Cette campagne mondiale démarre face à la Libye à Alger. Et déjà un premier match que les Tunisiens gagnent à la peine. Ce ne sera pas le dernier.
Malgré un nul frustrant face à la Libye à Radès, les Tunisiens se sont qualifiés pour la Russie.
Henry Kasperczak parti, Nabil Maaloul a commencé son mandat à l’occasion d’un match charnière contre l’Égypte en juin 2017 comptant pour les éliminatoires de la CAN 2019. La victoire, encore une fois dure à obtenir (1-0), a été déterminante pour la suite. C’était le vrai déclic qui a rendu la confiance au groupe avant d’attaquer les deux rendez-vous cruciaux face à la RDC. Ce succès face aux coéquipiers de Mohamed Salah a surtout rétabli la communion avec le public tunisien.
Youssef Msakni retrouve son niveau
Si elle n’est pas géniale, la formation tunisienne fait preuve cependant d’une solidité remarquable (4 buts encaissés en 6 matches de groupe) et d’une efficacité redoutable (11 buts en autant de matches dont 8 face à la RDC et la Guinée).
L’Etat d’esprit est de toujours marquer et surtout de ne jamais paniquer quand le vent tourne. Comme elle l’a montré de façon implacable devant les Léopards déchaînés. Une balle en cloche de Youssef Msakni a permis à Anice Badri de sauver une situation compromise à 10 minutes de la fin. Puis lors de son second déplacement suivant, le 7 octobre à Conakry où elle n’avait jamais gagné. Les Tunisiens ont évolué dans un environnement hostile, mais Youssef Msakni va donner un nouvel élan à la sélection grâce à un hat-trik et une passe décisive pour Mohamed Amine Ben Amor.
Le milieu de terrain tunisien, devenu plus libre dans le jeu avec Nabil Maaloul, a retrouvé son niveau et joué un rôle déterminant dans les 4 points pris à l’extérieur contre la RDC et la Guinée. Aidé par la grinta des 3 joueurs du milieu de terrain, Ferjani Sassi, Ghailene Chaalali, et Mohamed Amine Ben Amor qui ont permis à l’équipe d’aller de l’avant et lui ont apporté ce qui lui manquait en équilibre et en rigueur.
Le public a toujours été au rendez-vous pour soutenir les Aigles de Carthage.
La Tunisie ne pouvait pas rater l’aubaine
Ce jour-là, la Tunisie eut un pied et trois orteils en Russie. Avant de clôturer son parcours par un nul vierge hier, samedi 11 novembre 2017, à Rades, devant la Libye, suffisant pour la qualification.
Au final, 14 points ramassés sur 18 possibles, 4 succès et 2 nuls.
Dans un groupe où elle est restée invaincue chez ses deux adversaires les plus coriaces, la Tunisie ne pouvait pas rater l’aubaine, la chance aidant, il faut le reconnaître.
Depuis quelques années, la Tunisie a retrouvé un nouveau visage. Non qualifiée pour l’Afrique du Sud en 2010 et Brésil en 2014, elle a vu arriver une nouvelle génération dès 2014 avec Rami Bedoui, Wahbi Khazri, Syam Ben Youssef, Ali Maaloul, Hamdi Naguez, Hamza Mathlouthi, Yassine Meriah, Zied Boughattas, Ferjani Sassi, Mohamed Ali Moncer, Taha Yassine Khenissi, Naim Sliti, puis Anice Badri, Ghailene Chaalali, qui ont rejoint Aymen Mathlouthi, Farouk Ben Mustapha, Moez Ben Cherifia et Youssef Msakni. Ce dernier a, rappelons-le, disputé sa première Coupe d’Afrique des nations à seulement 19 ans en 2010.
A l’image de Ferjani Sassi, la nouvelle génération a du caractère et de l’ambition.
La qualification et après !
Ce groupe a progressé ensemble depuis les catégories jeunes et il a confirmé son potentiel en allant défier ses adversaires dans leur fief. Il ne peut toutefois pas se suffire d’un tel «succès».
Certes la qualification est bonne à prendre – elle est normale au vu des moyens consentis par les pouvoirs publics et les qualités des joueurs ainsi que la fragilité de leurs adversaires – mais il faut éviter l’autosatisfaction qui débouche toujours sur un triomphalisme primaire, des primes à gogo et des cérémonies bling bling… sans lendemain.
La Tunisie fêtera l’année prochaine le 40e anniversaire de sa première participation à la coupe du monde. Mais elle n’a obtenu qu’une seule victoire en 1978 et n’a jamais franchi le premier tour en 4 participations. Cette 5e qualification ne doit pas être comme les précédentes, sans lendemain, sans un véritable challenge de progression.
La Coupe du monde n’est pas une récompense. C’est une compétition à prendre au sérieux. On n’y va pas pour marquer une présence. On n’y va pas pour prendre une place mais pour laisser une trace.
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