Des archéologues tunisiens et américains ont fait de nouvelles découvertes dans ce site antique encore méconnu situé dans le sud-est de la Tunisie.
Par Naceur Bouabid*
Le site de Zian est à 9 km à l’ouest du centre-ville de Zarzis et correspond à la ville antique de Zita. Ses vestiges apparents s’étendent sur plus de 40 ha. Interrogé sur le contexte de sa découverte et sur l’historique des fouilles, Ali Drine, maître de recherches à l’Institut national du patrimoine (INP), précise : «L’un des premiers explorateurs à visiter le site en 1846 fut l’Allemand Barth qui identifia des statues jetées les unes sur les autres, des murs en ruines, des pierres en grands appareils, des fragments d’architecture… Ce site fut visité également par divers explorateurs dont E. Pellissier, V. Guerin en 1860… En janvier 1884, S. Reinach et E. Babelon y entreprirent des fouilles dans le forum et réussirent à déblayer le portique et le pavage de cette place publique. Ils découvrirent aussi de belles statues en marbre, des inscriptions latines ainsi que de nombreux éléments d’architecture qui ornaient ce beau monument.»
Reprise des fouilles sur le site
L’intérêt commun porté à cette ville antique et la conviction partagée quant à son importance et à la nécessité de sa mise en valeur dans la perspective de son exploitation sur les plans scientifique et culturel étaient à l’origine de la conclusion de l’accord de coopération établi entre le ministère de la Culture, l’INP et l’Université américaine de Californie, applicable sur trois années (2013-2015) et axé tant sur la recherche archéologique et ethnographique sur le site de Zian et dans son territoire, que sur la formation de jeunes conservateurs et étudiants tunisiens et américains dans le domaine du patrimoine.
C’est dans ce contexte que s’inscrit la mission de fouilles menée par une équipe tuniso-américaine. Mobilisée durant tout le mois d’août dernier pour reprendre sans relâche et sous des températures caniculaires les fouilles entamées l’année dernière à la même période, dans les mêmes conditions et dans le cadre de ce même accord.
Etudiants et conservateurs s’initiant aux sondages stratigraphiques sous la supervision de Sami Ben Tahar, archéologue et chargé de recherches au sein de l’INP.
Ces recherches dans les vestiges enfouis des temps immémoriaux, placées sous la direction de Ali Drine, maître de recherché à l’INP, et Brett Kaufman de l’Université de Californie, ont débuté en 2013 par des prospections autour du site de Zian et par des enquêtes ethnographiques sur les métiers traditionnels à Zarzis et les traditions orales (contes, récits imaginaires) se rapportant au site antique. Elles ont vu la participation des universitaires des deux pays ainsi que des techniciens spécialistes dans les analyses et le traitement d’objets en bronze, des ossements, des matériaux de construction (mortier-liants…). L’occasion était aussi pour les étudiants et les conservateurs du patrimoine de s’initier aux sondages, aux fouilles et aussi à la gestion des sites archéologiques et des collections recueillies lors de ces travaux.
Le site n’aurait pas dévoilé tous ses secrets
Ces deux missions de travaux archéologiques menées consécutivement en 2014 et en 2015 conformément aux termes de l’accord ont permis de déblayer une partie du grand monument qu’est le forum, dont le portique et le capitole.
En outre, les sondages entrepris dans le tophet, découvert par Ali Drine en 1993 et considéré comme étant le plus important témoignage de la présence punique dans la région des emporia, ont été couronnés par la découverte de centaines de stèles votives et des urnes cinéraires conservées actuellement dans les réserves du musée de Zarzis.
Le site dévoile ses secrets : l’angle sud-ouest du portique du forum déblayé.
En parallèle, un sondage stratigraphique a été entrepris, le but étant de déterminer les différentes phases relatives à l’occupation humaine du sol dans l’histoire du site.
Outre les missions de prospections, d’enquêtes ethnographiques et de fouilles archéologiques menées à terme dans les délais prévus, un ouvrage sera incessamment publié pour rendre compte des résultats des travaux archéologiques et ethnographiques de terrain entrepris sur ce site
Sans l’avènement de cet accord et des travaux archéologiques qui en ont découlé, le site n’aurait pas dévoilé tous ces secrets que des compétences tunisiennes et américaines sont parvenues à dégager en si peu de temps. Il va sans dire que d’autres trésors enfouis sont encore dedans, et il est à espérer que de pareils projets de fouilles se reproduiront sans trop tarder pour donner aux spécialistes de reprendre les recherches à même de leur permettre de déblayer les carrés du site visités, fouillés et qu’ils ont dû par nécessité remblayer à la fin de l’actuelle mission, et de découvrir d’autres secrets et trésors encore sous terre.
* Président de l’Association pour la sauvegarde de l’île de Djerba (Assidje).
Illustration : Mekki Oudi, l’universitaire, avec l’étudiante à l’œuvre sur les vestiges de l’angle sud-ouest du portique du forum déblayé.
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