Bien que l’esclavage ait été aboli en Tunisie depuis 1848, le trafic et l’exploitation des Subsahariens existe encore au pays du jasmin. Jeanne d’Arc, une Ivoirienne, qui aurait été «vendue» à son insu, raconte sa mésaventure.
Par Yüsra Nemlaghi
Fin 2013, la jeune femme a pris contact avec un Nigérien qui l’a aidée à venir en Tunisie, le temps de préparer un dossier de voyage et émigrer légalement en Europe. C’est du moins ce qui a été convenu, mais les choses ne se sont pas déroulés pas comme prévu, raconte Jeanne d’Arc dans une interview accordée jeudi dernier à « Maghreb Voices ».
Une fois en Tunisie, elle a été dirigée vers une maison où elle devait travailler pour une famille tunisienne. Lorsqu’elle a réclamé son salaire, ladite famille lui a répondu qu’elle n’allait pas la payer, car elle avait déjà donné 2.000 dinars tunisiens (DT) à l’intermédiaire.
Jeanne d’Arc s’est dit exploitée par un réseau de traite des êtres humains. «J’ai été vendue sans mon approbation. On vend un être humain pour cette somme d’argent», a-t-elle déploré, en assurant avoir subi plusieurs formes de racisme.
Jeanne d’Arc a finalement fui la famille qui l’a «achetée», après 5 mois de calvaire, pour rejoindre des personnes de sa communauté vivant en Tunisie. Depuis près d’un an, elle travaille dans un salon de coiffure au nord de Tunis avec une de ses compatriote qui a vécu une mésaventure similaire et qui a réussi à se faire une situation pour vivre dignement.
Contacté par Kapitalis, Jonathan Ouya, membre de l’Association des Ivoiriens de Tunisie (AIT), a indiqué que sa compatriote ne cherche pas à faire le buzz en relatant son histoire qui remonte maintenant à 5 ans, mais à apporter un témoignage dans le but d’encourager les Subsahariennes exploitées à fuir et à dénoncer les abus dont elles font l’objet.
«La loi a avancé en Tunisie et nos sœurs doivent porter plainte et ne plus se laisser faire. Le témoignage de Jeanne d’arc, qui vit aujourd’hui en Tunisie, doit les encourager et les pousser à se libérer. Personne n’a le droit d’exploiter un être humain», indique M. Ouya, en précisant que la jeune femme a motivé une demande pour régulariser ses papiers, aidée par le bureau du Haut commissariat des Nations unis à Tunis. On notera que sa demande a été rejeté en 2015 et qu’elle a relancé les procédures pour régulariser sa situation.
La même source a ajouté que son association est en contact permanent avec le Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES), qui lui vient en aide et qui alerte les autorités tunisiennes des abus constatés.
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