Le Samusocial, en partenariat avec le ministère des Affaires sociales, a présenté aujourd’hui, jeudi 12 décembre 2019, le premier rapport sociodémographique et d’analyse situationnelle des problématiques d’exclusion sur le profil des personnes vivant dans la rue, dans le Grand-Tunis.
Par Yüsra Nemlaghi
Selon ce rapport, 97% des personnes rencontrées par le Samusocial sont de nationalité tunisienne, les autres sont originaires du Maghreb (Maroc et Algérie), d’Afrique subsaharienne et d’Europe.
Pour la plupart, leur vie a basculé suite à la perte d’un emploi ou à des conflits familiaux, notamment le divorce ou le décès du conjoint : la précarité économique et la pauvreté (35%), une situation de famille conflictuelle (25%), la maladie chronique ou la situation de handicap (19%) sont le plus souvent évoquées.
Dans les rues de Tunis, la proportion de femmes rencontrées par le Samusocial est de 26% : les violences physiques et verbales constituent le premier facteur déclencheur de la vie en rue, précise le rapport, en ajoutant que la majorités de celles-ci sont âgées de plus de 49 ans (la moitié des hommes rencontrés ont plus de 51 ans).
La population est caractérisée par l’absence, la rupture ou la perte de liens conjugaux, facteurs significatifs dans le processus d’exclusion sociale : 29% des femmes vivant dans la rue sont divorcées, 14% pour les hommes.
L’étude révèle aussi que plus de 20% des hommes et 32% des femmes ont au moins un enfant, mais avec qui ils ont perdu tout contact, eux même vivant parfois dans la rue ou dans des centres spécifiques.
Le Samusocial du Grand-Tunis, qui a interrogé ces sans-abris, affirme que 46% d’entre eux sont originaires de la région nord-est du pays, 28% du nord-ouest, 10% du centre et 5% du sud-ouest. Ils étaient venus à la capitale pour chercher du travail.
Ils ont été embauchés pour des petits travaux, avant de se retrouver sans ressources, ne pouvant plus payer de loyer. Certains se sont endettés et tout a très vite basculé pour eux : de manière générale, ils ont occupé des emplois peu qualifiés et économiquement précaires.
Quant aux femmes, elles étaient majoritairement dans une situation précaire de dépendance économique (conjoint, parents, frères et soeurs), ajoute le rapport en précisant que 53% étaient cependant professionnellement actives, mais leurs revenus étaient trop faibles et non réguliers (13% femmes de ménage, 3% ouvrières agricoles, 2% couturières, intermittentes, vendeuses ambulantes et marchandes de fruits et légumes, 1% employées dans la fonction publique).
«Si la ville attire par les possibilités qu’elle offre, aussi bien économiques que sociales, elle modifie aussi, voire détruit, le cadre des relations communautaires et familiales préexistant dans les sociétés plus rurales, fondées sur le respect de coutumes traditionnelles : en ville, chacun est étranger à l’autre», expliquent les bénévoles ayant réalisé cette étude, en assurant que la ville participe à la fragilisation de personnes ayant quitté leurs lieux et liens d’appartenance, de personnes déjà précaires ou vulnérables, dont le parcours est marqué par des ruptures de vie, avec leur potentiel traumatique.
On notera que 5 soirs par semaine, une équipe mobile d’aide (Ema) du Samusocial du Grand-Tunis (SSGT) parcourt les rues de Tunis, afin d’aller à la rencontre des sans-abris pour leur donner accès à des soins médico-psychosociaux : «Selon les besoins de chaque personne, la prise en charge peut se poursuivre par l’accompagnement vers d’autres lieux (hébergement, hôpital) ou l’orientation (information sur les services sociaux à contacter, octroi d’une fiche de référencement sanitaire). Un accompagnement social et médical est proposé, de jour, au Centre d’encadrement et d’orientation sociale de Tunis (CEOS), en relais des activités menées la nuit notamment les démarches d’accès aux droits, l’accompagnement pour des consultations médicales et autres besoins».
Notons que cette étude a été élaborée par le Samusocial International dans le cadre du projet «Appui à la création et à la mise œuvre d’un dispositif Samusocial dans l’agglomération du Grand-Tunis», en partenariat avec le ministère des Affaires sociales tunisien qui met en œuvre le dispositif Samusocial du Grand-Tunis.
Elle a également reçu le soutien de la direction de la coopération internationale de l’Etat de Monaco et du service de coopération et d’action culturelle de l’ambassade de France en Tunisie.
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