L’annonce, hier soir, lundi 13 décembre 2021, dans un discours télévisé diffusé par la chaîne Watania 1, de l’agenda des réformes constitutionnelles et institutionnelles envisagées par le président de la république Kaïs Saïed, suscite des réactions pour le moins mitigées. Si elle est la bienvenue, cette annonce n’en suscite pas moins un certain agacement, et pas seulement parmi les opposants au président, car, comme le pense l’auteur de ces lignes, la Tunisie a déjà perdu beaucoup de temps au cours des dix dernières années et elle ne peut se permettre le luxe d’en perdre encore, alors qu’elle fait face à une situation économique désastreuse et qui requiert des solutions rapides et des reformes profondes et radicales.
Par Chedly Mamoghli
Kaïs Saïed est lent, trop lent. Il se comporte comme s’il avait l’éternité devant lui. Or, notre pays ne peut pas s’offrir le luxe de la lenteur qui lui est préjudiciable. Le temps de la Tunisie et de ses défis économiques et sociaux n’est pas le temps de Kaïs Saïed. Il y a un grave problème de synchronisation et c’est dans ce décalage que réside le problème. C’est le président qui doit se mettre à l’heure de la Tunisie et non le contraire, car son rythme est lent, trop lent.
On n’est pas sorti de l’auberge!
On va passer notre existence dans les réformes et les changements constitutionnels et institutionnels. On va perdre beaucoup de temps précieux à parler d’une nouvelle Constitution. Et, entretemps, nos vies sont sacrifiées, une génération et un pays sont sacrifiées aussi… Quant à l’économie, à l’arrêt depuis plus de dix ans, pourra-t-elle encore attendre ?
La Steg, la Sonede, l’Office des céréales, la Pharmacie centrale et les autres entreprises publiques, en quasi faillite, pourront-elles encore attendre ? Comment va-t-on faire pour que ces entreprises ne fassent pas faillite? Comment va-t-on faire pour ne pas nous retrouver un jour sans eau ni électricité ni gaz ? Comment va-t-on faire pour que l’Office des céréales ne fasse pas faillite lui aussi et qu’on ne se retrouve pas un jour sans pain? Comment feront les gens qui ne trouveront plus leurs médicaments? Pourquoi tout ce temps perdu? Pourquoi ces vies perdues? Pourquoi une génération sacrifiée? Pourquoi un pays à l’arrêt depuis 2011? Pourquoi le laisse-t-on couler? Trop de temps perdu! TROP!
La lenteur est un luxe qu’on ne peut plus s’offrir
Plus de dix ans d’un système islamo-affairiste qui avec sa gestion chaotique a saigné le pays à blanc et maintenant, presque cinq mois sont passés après l’annonce des «mesures exceptionnelles» le 25 juillet avec une lenteur asphyxiante et on va rajouter une année transitoire (si tout se passe comme prévu) et on ne sait pas si tout cela va aboutir à une stabilité ou si on va continuer les aventures qui n’en finissent pas.
On perd trop de temps, le gouvernement qui a vu le jour en octobre aurait pu être mis en place fin juillet ou début août. Quant à la commission chargée d’élaborer les réformes constitutionnelles envisagées, elle aurait pu voir le jour au mois d’août, aurait dû déjà achever ses travaux et on aurait pu organiser le référendum sur ces réformes avant la fin de cette année. Le pays ne peut pas s’offrir le luxe de la lenteur.
* Juriste.
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