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Faut-il sauver le soldat Essid ?

Habib-Essid-et-Beji-Caid-Essebsi

Face aux agitations sociales qui gagnent les régions, le chef du gouvernement Habib Essid fait ce qu’il peut, c’est-à-dire pas grand-chose. Est-il vraiment l’homme de la situation ?

Par Nadya B’Chir *

Un an deux mois et deux semaines que Habib Essid est à la tête du gouvernement tunisien. Deux gouvernements se sont succédé depuis la proclamation de la deuxième république, épilogue des élections législatives de 2014. Nombreuses contractions à mystérieuse effluve à quelques endroits, diverses hypothèses et théories nourrissant maints scénarios ont fini par conduire à la nomination de ce commis de l’Etat au poste au chef de gouvernement.

Un homme à contre-emploi

Au regard de certains observateurs avisés de la place politique publique, ce dénouement a fait retomber quelques illusions comme un soufflé. Et pour cause ! La phase actuelle est tout du moins arachnéenne et est enceinte de défis majeurs qui engagent le pays sur la voie de la transition démocratique et le passage à l’ère du développement et de l’émergence. De ce fait, l’homme qui devrait occuper le siège du chef, un chef de guerre résolument, devra disposer d’un profil aux notoires caractéristiques d’une main de fer dans un gant de velours.

Or, deux gouvernements plus tard, M. Essid n’a de cesse de collectionner les difficultés lui flanquant du mésaise à profusion. Des difficultés faisant foyer à l’instabilité politique et économique, cependant, jugées insuffisantes pour déclencher une alerte au plus haut niveau afin d’affronter les choses en face: l’actuel chef de gouvernement n’est pas l’homme de la situation !

Les tribulations se succèdent et ne se ressemblent pas, des opérations à caractère terroriste à celles à caractère social-économique ponctué en profondeur par le politique. Aucune stratégie efficiente dressant le lit d’une gestion de crise fait d’armes autant sur le plan fonctionnel et pratique que sur le plan de la communication. Un gouvernement qui tourne, dans une importante fraction de sa manœuvre, selon un régime fondé sur la réaction et non sur l’action. Il a fallu que la région de Ben Guerdane soit frappée par une opération terroriste pour que M. Essid et les autres membres de son gouvernement s’y déplacent et ordonnent une batterie de mesures au profit d’une population paumée et laissée pour compte des années durant. Et cela n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. Voyez comment le gouvernement Essid gère la crise de Petrofac et de l’ire des habitants de l’île de Kerkennah, à quel moment a-t-il pris conscience de la vulnérabilité et de l’urgence de la situation et de quelle manière s’est-il saisi de l’affaire?!

Il est scrupuleusement exclu d’accabler Habib Essid ou de soumettre au doute ses compétences en tant qu’homme de l’administration publique, sérieux et doté d’un sens aigu de la responsabilité. Néanmoins, l’heure n’est guère à la complaisance et à la courtoisie de comptoir, l’homme n’est pas à sa place et s’y abstenir n’est que tenir tête à l’avancement du train économique du pays.

Le paysage politique a emprunté nouvelles allures depuis la scission du parti Nidaa Tounes, qui a perdu sa première place au parlement au profit d’Ennahdha. Ce changement a conduit, dans ses sillons, à l’affaiblissement de la position du président de la république dans sa relation avec le chef du gouvernement tout comme l’aveulissement de la coalition au pouvoir. Plus que jamais, le gouvernement Essid est en perdition de boussole, indiquant avec précision l’orientation à emprunter, quoi de plus attendu lorsque même une feuille de route, apportant dans ses lignes les réponses nécessaires aux attentes du pays en pareille période, fait défaut. L’instauration des grandes réformes dans le domaine économique pour amorcer une relance à ce titre tient lieu de l’une des ces réponses qu’il faudra larguer sur une autoroute au vue de son caractère urgent.

Le besoin d’un Etat fort

L’heure n’est plus aux laïus à grands fracas et à émotions dressant les poils du citoyen qui demeurent en attente désespérée de voir enfin les choses changer. Le pays a besoin d’un Etat fort, solide, qui frappe pour faire mal et non pas pour faire peur ! Cet Etat fort et solide a besoin d’un chef qui saura frapper pour faire mal sans accorder considération aucune aux slogans illusoires et périmés usés par les politiques en l’occurrence, désireux de faire écho à toute voix, même désabusée !

Les partis formant la coalition au pouvoir devraient freiner leur appétit gourmand du pouvoir et du «aller plus haut» et œuvrer pour la mise en place d’un nouveau remaniement à plus haute distinction, pour cette fois. Evidemment, cela va sans dire que les partis de la coalition devront œuvrer sous l’égide d’un large consensus réuni au sein du parlement, en l’occurrence, et érigé sur l’intérêt général en et les résignations.

Le bout du tunnel s’éloigne davantage chaque difficulté encore plus, et le gouvernement actuel piloté par Habib Essid donne l’air de se battre contre des moulins à vent ! Le chef de l’Etat, Béji Caïd Essebsi ne serait pas contre un éventuel amendement de la constitution pour un cran de prérogatives de plus, encore une tentative quasi «chimérique» pour pousser la roue vers l’avant ! Toutefois l’espoir demeure quelque peu vif, à ce juste titre, dans la manœuvre du président de la république. Les électeurs ne l’ont-ils pas élu car étant nantis de confiance en ses aptitudes de visionnaire doublé d’un sage sachant intervenir quand il le faut et comme il le faut ?! A vos marques monsieur le président !

* Journaliste indépendante.

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