Confrontés à une montée inquiétante de la violence, les autorités sont obligées de prendre des sanctions exemplaires. Et efficaces.
Par Hassen Mzoughi
Quel triste football tunisien. Il ne se passe pas une semaine sans que des scènes de violence surréalistes ne se déroulent dans nos stades. Comme hier à Kairouan, comme auparavant à Sousse et à Radès. Comme partout dans les arènes sportives. De quoi écœurer plus d’un amoureux du foot. Face à la multiplication des incidents, des solutions doivent être trouvées et vite.
Quand les rencontres à hui-clos et les amendes ne suffisent pas, le retrait de points ou la proclamation d’un match sur tapis vert sont des sanctions possibles et applicables. Et surtout n’attendons pas la Fédération tunisienne de football (FTF) pour décider de mesures efficaces, car ses membres sont souvent animés par des intérêts électoraux.
Les autorités, pour des considérations d’ordre public suprême, doivent aggraver les sanctions contre les fauteurs de trouble dans les stades, qu’ils soient dirigeants, supporters ou joueurs. Quitte à prendre des décisions draconiennes pour l’exemple, comme évincer un joueur international de la sélection en cas de comportement anti sportif. Et pourquoi pas l’empêcher de participer au mondial. Ou alors radier à vie tout joueur ou dirigeant auteur d’un fait grave. Et Dieu qu’il y en a eu depuis le début de l’actuel championnat…
Les clubs responsables de leurs supporters
Les clubs ont une responsabilité civile et morale. Auquel cas ils sont considérés responsables du fait de leurs supporters. Un club local et un club visiteur sont responsables des désordres qui seraient commis par leurs joueurs, leurs dirigeants ou leurs supporters. De même, un club local est tenu d’assurer l’encadrement de ses spectateurs tout comme tout club visiteur au sein de l’enceinte sportive.
En Tunisie, la lutte contre la violence n’est menée que par la police. C’est une approche confuse: la violence dans les stades n’est traitée qu’à travers le prisme du hooliganisme, c’est-à-dire la répression policière. Pour le reste ce n’est que des interdictions de stade et des amendes dérisoires. Jusque-là peu dissuasive et donc sans réel effet.
Cette confusion trahit une méconnaissance du «supportérisme». La définition du hooligan est inexistante en Tunisie. Est-ce le simple violent qu’on retrouve partout dans et en dehors du stade ? Est-ce une appartenance à un groupe, à un club, un parti politique, une passion pour les couleurs ? Le phénomène intègre-t-il également une notion de territoire, un groupe défendant sa ville?
Une logique globale de réforme
Les pouvoirs publics ne font pas la distinction entre les différents types de supporters. Ils les divisent, de façon simpliste, en deux catégories: les pacifiques et les violents. Majdoline Charni, la ministre de la Jeunesse et du Sport, qualifie ces derniers de «terroristes des stades». Il se trouve aussi que l’amalgame est possible entre les deux catégories. Cela crée un double effet pervers. D’une part, les autorités et les médias entretiennent un climat de peur. D’autre part, cet amalgame provoque la marginalisation de nombreux supporters, dont une majorité de non-violents.
La spirale de la violence implique également les forces de l’ordre qui, persuadées d’avoir affaire à des individus dangereux, utilisent parfois des méthodes disproportionnées. Et bonjour les dégâts !
Reflet de la médiocrité de la compétition
La violence c’est surtout le reflet de la médiocrité de la compétition, de la faiblesse de l’arbitrage, de la nonchalance de la FTF, d’une législation moyenâgeuse mais aussi le fait d’un discours extrémiste de la part de dirigeants plus «viragistes» que responsables.
C’est tout le football national qui est en déchéance depuis plusieurs années. La lutte contre la violence dans les stades devrait s’inscrire, avant tout, dans une logique globale de réforme du sport roi en Tunisie. Seule l’amélioration du niveau de cette discipline, que cela soit les instances sportives, le technicien ou le footballeur, la révision des règlements souvent contradictoires pourrait impulser de nouveaux comportements.
C’est toute la gabegie dans laquelle évolue notre football (et autres secteurs de la vie sociale) qui fait que certains développent un «dégoût» qu’ils n’expriment que par la violence.
Le sport c’est sérieux. Il ne faut pas négliger son impact car ne l’oublions pas, les premières agitations contre le régime de Ben Ali ont commencé dans les stades, espace ouvert à toutes les colères possibles.
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