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Le poème du dimanche : ‘‘Liban, ma rose noire’’ de Tahar Bekri

Né en 1951 à Gabès en Tunisie et résidant à Paris depuis 1976, où il enseigne à l’université de Paris X-Nanterre, Tahar Bekri est un poète tunisien, qui écrit en français et en arabe.

Tahar Bekri a publié une vingtaine d’ouvrages (poésie, essai, livre d’art). Sa poésie, saluée par la critique, est traduite dans différentes langues (russe, anglais, italien, espagnol, turc, etc.). Elle fait l’objet de travaux universitaires.

Son œuvre, marquée par l’exil et l’errance, évoque des traversées de temps et d’espaces continuellement réinventés. Parole intérieure, elle est enracinée dans la mémoire, en quête d’horizons nouveaux, à la croisée de la tradition et de la modernité. Elle se veut avant tout chant fraternel, terre sans frontières.

Tahar Bekri est considéré aujourd’hui comme l’une des voix importantes du Maghreb.

Ils redoublent de férocité
Et crient aux cèdres
Nous sommes les seigneurs de la guerre
Nous fermons la mer le ciel et la terre
Et pissons sur vos prières
Nous mangeons les collines et les montagnes
Nous détournons les fleuves
Volons les lacs les plateaux et les arbres
De chiffres sans nom
Nous remplissons vos cimetières
Nous sommes les nouveaux aigles
Nous aimons les ruines et les décombres
Le sang des chevaux éventrés
Les larmes des murs
Les enfants sous les pierres
Nous sommes les bâtisseurs de vos cauchemars
Coupeurs de routes
Coupeurs de ponts
Démolisseurs d’aéroports
Brûleurs de vos réserves
La farine est notre ennemie
Votre pain poudre pour notre canonnière
Nous mettons l’air à genoux
Le vent à feu et à sang
Nous sommes les ravageurs de centrales hydrauliques
L’eau c’est pour laver vos morts
Nous sommes la nuit de votre détresse
Destructeurs de centrales électriques
Amis des chauves-souris
La cécité guide nos cœurs
Assoiffés de vos linceuls sans cercueils
Nous sommes les rois de la lumière
Nous tuerons la lune s’il le faut
Pour disperser vos cendres
Dans les trous de notre mémoire
Nous prierons Dieu pour ouvrir son Enfer
Croix et croissant pour nourrir nos brasiers
Et nous ferons de vos frontières nos pissotières
La bannière étoilée est notre chandelier
Dans le ciel déchiré par nos mâchoires.

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