Le parti Ennahdha est l’héritier de l’ex-Mouvement de tendance islamique (MTI) qui se réclamait tapageusement du mouvement égyptien des Frères musulmans ou «Ikhwan Mouslimine». Abir Moussi n’a donc pas tort d’appeler les adeptes du parti fondé par Rached Ghannouchi de «khouanjia». Elle appelle un chat un chat…
Par Faik Hanablia
L’un des reproches faits à Abir Moussi, la président du Parti destourien libre (PDL) est de «traiter» les militants du parti Ennahdha de «khouanjia» («frérots» ou Frères musulmans et de ne les appeler qu’ainsi.
Le plus étonnant est que ce reproche n’émane pas tant de concurrents politiques, ce qui ne serait que le jeu normal de la démocratie, que d’animateurs ou de modérateurs de divers de médias à l’occasion d’émissions dont elle est l’hôte.
Au-delà du Frère musulman stricto-sensu, qui n’est que l’une des nombreuses composantes de la nébuleuse islamiste, le terme «khouanji» est ici entendu dans un sens large et vise toute organisation ou structure se réclamant de cette famille, quelle que soit sa dénomination officielle.
Et à moins que cette expression ne soit devenue, en elle-même, insultante, une telle critique envers Abir Moussi a, en effet, de quoi surprendre.
Ne sait-on donc pas, après tout, que les partis appartenant à la grande famille communiste à travers le monde opèrent sous des appellations différentes allant de communistes à révolutionnaires, populaires, ouvriers, en passant par socialistes, du travail ou des travailleurs, voire même démocratiques, sans que leur appartenance idéologique ne fasse de doute.
Qualifier de communiste, par exemple, un parti quelconque, officiellement dénommé ouvrier, constituerait donc une insulte?
La remarque vaut pour les partis d’extrême-droite.
Du Front national français, pardon, Rassemblement national, à la Ligue du Nord italienne, en passant par l’AFD allemande ou le FPO autrichien, sans oublier l’UKIP britannique, peu ignorent de quelle famille politique il s’agit.
Pour en revenir aux Frères musulmans eux-mêmes, c’est-à-dire ce courant politique, originaire d’Egypte, dont l’objectif est d’imposer la charia, soit par la force, soit par la ruse, ceux-ci ne se baptisent pas tous nécessairement ainsi et ont pu apparaître sous des dénominations aussi variées que MSP et FIS (Algérie), Nusra (Syrie), PLJ (Egypte), AKP (Turquie), etc.
Le parti Ennahdha lui-même n’est-il pas l’héritier de l’ex-Mouvement de tendance islamique (MTI) que tout le monde qualifiait de «khouanjia» ? A-t-il cessé de l’être dès lors qu’il a changé de nom ?
En appelant ainsi un chat un chat, Abir Moussi a un double mérite : celui d’attirer l’attention sans relâche, après les avoir identifiés, non seulement sur le bilan désastreux des islamistes mais également sur le danger mortel que constitue l’islam politique et de mettre en garde contre sa banalisation, sa «normalisation», pour utiliser un terme à la mode en ce moment. Et celui de rappeler que l’islamisme dit modéré est un leurre, une imposture destinée à endormir la vigilance des citoyens, le temps de travailler le pays en profondeur, tant il est vrai que le but ultime de tout «khouanji», au-delà des nuances dont nul n’a que faire, est bien d’imposer la charia, de gré ou de force.
Et dès lors, refuser de se compromettre avec lui, de quelque manière que ce soit, à l’instar de certains, loin de constituer un acte d’exclusion, est, bien au contraire, un acte de patriotisme.
* Gérant de portefeuille associé.
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