Les Tunisiens, dont l’économie s’enfonce dans la crise et a du mal à se remettre de l’instabilité où vit leur pays depuis la révolution de 2010, attendent beaucoup de la stabilisation de la Libye et de la reprise de leurs relations commerciales et économiques avec ce riche pays voisin. Mais leurs attentes sont pour le moment plus grandes que les possibilités réelles offertes.
Par Imed Bahri
La visite officielle effectuée à Tripoli les 22 et 23 mai 2021 par le chef de gouvernement Hichem Mechichi et les discussions qu’il a eues avec son homologue libyen Abdelhamid Dbeibah, ainsi que celles ayant réuni les membres de la délégation l’accompagnant avec leurs homologues locaux, ont permis d’identifier des problèmes en suspens devant être réglés avant de se lancer dans de nouvelles pistes de coopération et d’envisager de nouveaux projets dans divers domaines, notamment l’habitat social, l’infrastructure ou la santé.
Des promesses plus que des réalisations
Les hommes d’affaires tunisiens et libyens, réunis du 23 au 25 mai à Tripoli puis quelques jours après à Djerba, ont certes repris contact, avec en point de mire le marché de la reconstruction de la Libye où la plupart des grandes puissances sont déjà en pole position. «Mais ces retrouvailles n’ont pas abouti aux résultats espérés en termes de signature de contrats», a souligné Africa Intelligence. Et d’ajouter : «Mis à part un contrat de construction de 800 logements à Tripoli signé avec la Société immobilière nationale de Tunisie (SNIT), des promesses ont été échangées concernant la construction de routes et d’autoroutes – en particulier au niveau de la frontière tuniso-libyenne –, l’étude pour l’implantation d’une zone industrielle et le projet de plateforme logistique à Sebha, dans le sud libyen, qui avait déjà été évoqué en mars dernier.»
Certes, des opérateurs tunisiens ont réussi à nouer des contacts utiles avec des Libyens soucieux d’importer leurs produits et les perspectives dans ce domaine sont intéressantes. Des hommes d’affaires tunisiens ont aussi évoqué le problème des projets qu’ils avaient engagé en Libye et qui ont été arrêtés net en 2011, ce qui leur a causé des pertes importantes. Ils ont discuté des moyens de réparer les préjudices, de remettre les projets en question à l’ordre du jour ou de les relancer sur de nouvelles bases. La question des dettes des citoyens libyens accumulées auprès des cliniques tunisiennes a aussi été posée et les responsables des deux pays savent qu’ils doivent assainir la situation avant d’envisager de s’engager dans de nouveaux projets.
Vers une accélération des échanges transfrontaliers
Sans tirer des plans sur la comète ni s’attendre à une forte reprise des relations commerciales et économiques entre la Tunisie et la Libye, la situation dans ce pays étant encore indécise et le gouvernement en place est transitoire et doit organiser des élections avant la fin de l’année avant de céder le témoin à un gouvernement élu, on peut cependant rester positif : la reprise des contacts est en soi une bonne nouvelle, les perspectives entrevues lors des discussions entre les responsables publics et les opérateurs privés sont prometteuses et on peut parier sur une accélération du flux des échanges transfrontaliers, les populations du sud tunisien restant très confiants à ce propos. Et pour cause : les Libyens et les Tunisiens se connaissant bien et s’appréciant mutuellement, ils ont tout à gagner à renouer avec leurs vieilles habitudes, d’autant que le nouveau contexte politique dans les deux pays requiert une plus grande transparence dans les transactions. Une bonne raison pour repartir de bon pied…
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