L’exemple de Jyhen Jouini, une jeune femme créatrice et entrepreneure dure et douce comme de la pierre, illustre les énormes difficultés auxquelles sont confrontés les jeunes entrepreneurs qui prennent leur courage à deux mains et se lancent dans l’aventure de l’auto-emploi.
Par Tarek Kaouache *
Jyhen Jouini est une jeune femme artiste qui s’est lancée le défi depuis quatre ou cinq ans de créer sa propre entreprise dans la production d’artefacts à partir de pierres nobles issues de mines et de carrières désaffectées avec l’appui d’enseignants de l’école des beaux-arts et de géologues de renommée.
Avec l’appui de la Plateforme tunisienne de l’économie sociale et solidaire (Platess), Jyhen a réussi à obtenir un crédit d’environ 47.000 DT auprès de la Banque tunisienne de solidarité (BTS Bank) après 4 longues années de va-et-vient, de paperasse et de démarches sans fin.
Aujourd’hui, Jyhen a monté son atelier à l’Ariana, au nord de Tunis, avec des machines et des outils d’occasion pour la grande majorité et a des marchés à honorer pour pouvoir rembourser son crédit. Seulement, la BTS Bank refuse de lui accorder quelques milliers de dinars (5.000 DT tout au plus) pour qu’elle puisse payer le loyer de son atelier, le salaire du gardien, ses factures de la Steg et de la Sonede…
Ce que produit Jyhen peut servir à des centaines de femmes artisanes pour la production de bijoux de grande qualité mais la BTS refuse de lui accorder un fond de roulement pour l’aider à lancer son activité.
C’est comme si quelqu’un demandait un prêt pour acquérir une voiture et qu’on lui accorde juste ce qu’il faut pour l’acquisition de la carcasse, le temps qu’il fasse ses preuves.
C’est à ce genre de situation kafkaïenne, souvent sans issue, que de nombreux auto-entrepreneurs sont confrontés. Ce qui, on l’imagine, décourage beaucoup d’entre eux qui préfèrent baisser les bras et jeter leur dévolu sur les pouvoirs publics pour exiger des emplois stables avec des salaires fixes. C’est, en tout cas, dans l’esprit de la majorité des jeunes tunisiens et tunisiennes, moins risqué que de se prendre en charge soi-même et de créer sa propre affaire.
À bon entendeur.
* Ingénieur en industries agroalimentaires, consultant en innovation sociale dans les secteurs agricole et agroalimentaire.
Donnez votre avis