Dans sa déclaration faite hier, jeudi 7 octobre 2021, à l’issue de l’audience que lui a accordée le président Kaïs Saïed, Marouane El-Abassi, le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), a affirmé que l’économie tunisienne connaît un début de reprise avec notamment la hausse des exportations vers l’Union européenne. Il va falloir que cette tendance se confirme et de renforce et cela passe par une accélération de la campagne de vaccination contre la Covid-19 pour atteindre le taux de 60% de la population et la normalisation de la vie publique.
Par Amine Ben Gamra *
En Europe, principal partenaire économique de la Tunisie, tous les indicateurs économiques sont actuellement au vert: la confiance atteint des sommets historiques, les carnets de commandes sont pleins et, surtout, les producteurs industriels ont un fort besoin d’importer des intrants en provenance des pays proches. Signe ou conséquence de cette reprise: le renchérissement des prix des matières premières, notamment du pétrole et du gaz.
Les exportateurs tunisiens dans les starting-blocs
Cette forte demande européenne bénéficiera certainement aux exportateurs tunisiens, surtout dans les secteurs de textile, IT, agroalimentaire et d’équipement électronique. Et cette embellie des perspectives à l’export devrait permettre de compenser partiellement les pertes du secteur du tourisme, liées au durcissement des mesures sanitaires pour les voyageurs internationaux. Aussi, faudrait-il saluer le succès des autorités tunisiennes qui ont surmonté les défis logistiques et organisationnels pour assurer un taux de vaccination beaucoup plus élevé qu’en début de l’été (30% de la population ayant reçu, à ce jour, deux doses).
Néanmoins, la situation sanitaire reste fragile et le taux de vaccination actuel est bien trop faible pour atteindre l’immunité collective, dont on pourrait commencer à parler à partir du taux de 60% de vaccinés. Et un durcissement éventuel des mesures sanitaires suite à la recrudescence du variant Delta constituerait un risque baissier pour la reprise. On n’en est heureusement pas encore là…
Dans l’ensemble de l’Europe, on n’attend qu’un léger impact négatif de la propagation du variant Delta d’ici fin 2021. Au total, on attend un effet négatif modéré (de l’ordre de -0,5 point du PIB) de l’impact de ce variant sur la croissance du Vieux continent d’ici la fin de l’année, surtout si les restrictions sanitaires restent légères et localisées, comme elles le sont actuellement.
Gagner la guerre contre le variant Delta
L’expérience du Royaume-Uni a d’ailleurs montré que le variant Delta n’a pas profondément affecté les déplacements des personnes, ni leurs comportements de consommation. En effet, malgré l’augmentation des contaminations, la surmortalité est restée faible dans ce pays, plutôt proche de son niveau de juin 2020. Grâce aux taux élevés de vaccination (environ 50% de la population ayant reçu deux doses de vaccins), le lien entre les nouvelles contaminations liées au variant Delta et l’admission de patients en soins intensifs ainsi que les nouveaux décès liés à la Covid-19 semblent être rompus en Europe. Dans ce contexte, la pression sur les gouvernements pour durcir les restrictions est moindre, ce qui permet de prioriser le soutien de la reprise économique.
En Tunisie, le front de la pandémie connaît également une forte accalmie, avec une baisse considérable du nombre de contaminations et de morts (moins d’une dizaine par jour), mais tout relâchement sur ce front pourrait être fatale pour une reprise encore trop fragile, qui plus est, dans un contexte de crise politique et financière et un gouvernement qui tarde à être constitué.
* Expert comptable, commissaire aux comptes, membre de l’Ordre des experts comptables de Tunisie.
Donnez votre avis