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Le poème du dimanche: «Quatrains de Nouara la folle» de Zaynab Laouedj

Zaynab Laouedj.

La poète algérienne, Zaynab Laouedj, est une voix qui compte. Couronnée de nombreux prix littéraires, elle mêle écriture en arabe dialectal et littéral. Portée par la colère et la critique du sort réservé aux femmes. Chantre de l’émancipation de l’être arabe, engagée politiquement dans la société, elle dénonce la terreur et l’oppression, dans le réel et l’imaginaire arabes.

Née en 1954 à Maghnia (Tlemcen), est professeur de littérature arabe en Algérie et en France. Chercheuse au CNRS, elle dirige la maison d’éditions, L’espace libre, qu’elle a fondée.

Parmi ses ouvrages (poésie, en arabe) : O toi, qui parmi nous déteste le soleil, Damas, 1979 ; Je refuse que soient embrigadés les enfants, Damas, 1980; La danseuse du temple, Alger, 2002; Quatrains de Nouara la folle, Alger, 2010; Élégie pour le lecteur de Bagdad, Alger, 2010.

Sais-tu

Que je suis séductrice de lumière

Quand ton visage s’habille

De la langue des saisons

Comme atteinte par la folie du regret

Je me plonge dans le parfum des mères

Brillantes dans le chagrin

Cachées dans les plis de la braise

Vieillie je suis

Dans les veines des grands-mères

Fuyant les juges d’instruction

Défont les ceintures de chasteté

Vous

Qui êtes ancrés

Dans le mensonge et le mensonge

Puis le mensonge et le mensonge

J’ai arraché les jours de force

Je les courtise séductrice éternelle

Comme celle qui aime

La séduction de la joie

Sais-tu toi toujours prêt à partir

Que je suis le témoin de mon enterrement

Je l’ai cerné jusqu’à l’apparition

Jusqu’à me porter dans le départ de mon sang

Sais-tu

Toi qui jaillis

Dans les ciels

Du premier départ

Que j’ai donné la vie

Voiles

Auxquelles j’ai donné l’éclat

Même par en-dessous du linceul

Je traverse à la dérobée ce que tu caches de parole

Je lui tresse les voiles des exils

Mes ailes se renouvellent dans tous les passages et traversées

Même d’outre-terre et de la froidure de la tombe

Je suis

De la descendance des palmiers

De l’orgueil de la terre

Et de l’opulence de l’argile

Soutenue

Par le vacarme du cri

La lamentation les pleurs

Les hurlements des embryons

Je suis

De ce temps handicapé

Ici et là je tâte

Le battement des rêves fragmentés

Je suis celle cachée

Dans la fragrance de l’herbe

La plante de la patience

Logée au cœur de la roche

Je suis la plante sauvage

Attachée aux fièvres des volcans

Je suis l’écho

Quand il n’y a ni voix ni écho

Je m’appuie sur la joie reportée

Qui s’enfante comme le soleil

Même si tu m’enfouis

Dans cette pourriture

Je suis la femme… femme

Du souci je suis enceinte

Des temps… des lieux

Des distances perdues

Extraits de Quatrains de la fleur folle, Ed. L’espace libre, Alger, 2010.

Présentation et traduction de l’arabe par Tahar Bekri

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