Tunisie : la relance économique pour éviter la fracture sociale

Dans notre quête d’une relance économique salutaire, nous devons tous adhérer à un principe d’action simple : les politiques publiques doivent être au service des populations, mais tout en préservant les équilibres macro-économiques de l’Etat et en renforçant le rôle social des entreprises, y compris (et surtout) les entreprises privées.

Par Amine Ben Gamra *

L’invasion russe de l’Ukraine a exacerbé les conséquences économiques de la pandémie de Covid-19, une crise venant s’ajouter à une autre, ralentissant la croissance, poussant l’inflation à la hausse, baissant partout le pouvoir d’achat et ravageant des vies humaines précarisées par la crise.

La hausse des prix des denrées alimentaires et de l’énergie pèse lourdement sur les budgets des ménages dans le monde entier. Le durcissement des conditions financières accentue les pressions sur les pays, les entreprises et les familles, déjà très endettés. Pays et entreprises repensent les chaînes d’approvisionnement mondiales dans un contexte de perturbations qui risquent d’être durables.

Des solutions concertées entre les entreprises, les travailleurs et l’État

Il n’existe pas de remède miracle pour pallier les formes les plus destructrices de la fragmentation. Mais en travaillant avec toutes les parties prenantes sur les enjeux urgents qui nous touchent tous, nous pouvons commencer à mettre en place les prémices d’une économie nationale plus forte, plus réactive et plus inclusive. Nous pouvons aussi aller un peu plus loin et plaider en faveur de discussions tripartites, voire de négociations, entre les entreprises, les travailleurs et l’État. 

Tant que les prix des matières premières restent élevés, les salaires réels et/ou les marges bénéficiaires doivent être plus faibles. L’État peut limiter la baisse du revenu réel des travailleurs par le biais de subventions publiques, de transferts sociaux et de réglementations des prix, financés par une combinaison d’impôts sur les plus aisés et de nettoyage de l’énorme quantité d’argent informel blanchi en Tunisie et dans son environnement régional. Ce secteur informel représente, en effet, près de 50% du PIB, privant ainsi le gouvernement de recettes fiscales indispensables au financement du budget de l’Etat et le poussant dans les bras des bailleurs de fonds internationaux pour plus d’endettement, sachant que le taux d’endettement de la Tunisie a dépassé 100% du PIB, contre seulement 35% en 2010.

Des questions urgentes qui transcendent les frontières

Il est indéniable que nous avons tous trop tardé à agir alors que notre tissu économique présentait de graves fissures et s’affaiblissait au fil des ans. Mais si les pays parviennent à s’entendre sur ces questions urgentes qui transcendent les frontières et nous affectent tous à divers degrés, nous pouvons commencer à réduire la fragmentation et à renforcer la coopération. Il y a des raisons pour coopérer et pour espérer trouver des solutions négociées aux problèmes évoqués ci-dessus au double plan intérieur et extérieur, les deux étant interdépendants.

Dans notre quête d’une relance économique salutaire, nous devons tous adhérer à un principe d’action simple : les politiques publiques doivent être au service des populations, mais tout en préservant les équilibres macro-économiques de l’Etat et en renforçant le rôle social des entreprises, y compris (et surtout) les entreprises privées.

* Expert comptable, commissaire aux comptes, membre de l’Ordre des experts comptables de Tunisie.

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