Tunisie : Soumoud appelle à sauver la démocratie de la dérive de Saïed

Certes, le président de la république Kaïs Saïed n’entend personne et n’écoute que les échos de sa propre voix, mais ce n’est pas une raison pour ne pas porter à sa connaissance les critiques que lui adressent désormais non pas seulement ses opposants de la première heure, mais ses anciens partisans qui n’acceptent pas sa dérive autoritaire.   

C’est le cas, notamment, de la Coalition Soumoud, formée de personnalités nationales de diverses sensibilités démocratiques et progressistes, qui était parmi ses plus fervents soutiens avant et après son élection en 2019, et qui vient d’annoncer, dans un communiqué publié ce lundi 10 octobre 2022, qu’elle a «abandonné toute forme de soutien au processus du 25-Juillet, suite à la dérive du président par rapport aux revendications exprimées à cette occasion et à ses décisions unilatérales, visant à instaurer un système politique présidentiel bâtard». Et d’appeler, par conséquent, les citoyens à «boycotter les élections législatives, en termes de candidature, de parrainage et de vote.»

La coalition estime que le président de la république cherche à «imposer une approche unilatérale visant à mettre en place par étapes son projet politique personnel, avec un parlement soumis au pouvoir exécutif, tout en étouffant les opposants, en intimidant les journalistes, en portant atteinte aux libertés publiques, et notamment la liberté d’association et d’expression.»

La coalition Soumoud considère que le décret n° 55, relatif à l’amendement de la loi électorale de 2014, est «inconstitutionnel» car il contredit l’article 51 de la constitution du 17 août 2022, qui stipule que l’État œuvre à réaliser la parité dans les instances élues.

Cette nouvelle loi électorale donnera naissance à des élections législatives illégales, et c’est un parlement illégal qui en sortira, estime encore la coalition Soumoud, qui considère que ce décret aggrave le déséquilibre entre les pouvoirs, exclut les partis politiques et de larges segments du peuple tunisien, notamment les femmes, les jeunes, les binationaux, les compétences, et ceux qui ont changé de résidence pour des raisons d’études, professionnelles ou sociales.

Par conséquent, la coalition Soumoud appelle ces catégories de citoyens et tous les Tunisiens à défendre leurs droits constitutionnels, et en particulier «le droit à des élections législatives équitables et démocratiques».

Le communiqué ajoute que le décret n° 54 de 2022, relatif à la lutte contre les délits liés aux systèmes d’information et de communication, a approuvé dans ses articles 17 et 24 de lourdes peines sans commune mesure avec les violations et délits commis, pour porter atteinte à la liberté de presse et d’expression.

Tout exprimant son soutien à tous les mouvements pacifiques rejetant le retour du système de l’islam politique et s’opposant au projet politique personnel que le président cherche à imposer aux Tunisiens et aux Tunisiennes, la Coalition Soumoud appelle les patriotes et les démocrates à assumer leur responsabilité historique, en rejetant toutes les dérives qui menaceraient l’intérêt supérieur du pays. Elle appelle enfin les organisations de la société civile, les partis et les forces nationales et démocratiques à coordonner leurs efforts pour sauver la transition démocratique, en organisant une série de mouvements pacifiques de protestation.

I. B.

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