Tunisie : Rached Ghannouchi sur le fil du rasoir

Peut-on dire que, cette fois-ci, et à la faveur de l’avance enregistrée dans l’enquête à propos de la société Instalingo, l’étau judiciaire se resserre réellement sur Rached Ghannouchi, à moins que, comme souvent, ses auditions par les juges aboutissent à des non-lieux de fait ? (Illustration : le triomphalisme de Rached Ghannouchi contraste clairement avec ses traits fermés).

Il est très tôt de répondre à cette question, mais il semble que le premier juge d’instruction près du tribunal de première instance de Sousse en charge de cette affaire tient des éléments pouvant établir des liens directs entre le président du parti islamiste (ou ses proches, et notamment ses enfants) avec la société installée à Kalaa Kebira et qui alimentait un grand nombre de pages sur les réseaux sociaux chargées de distiller des fausses informations, des mensonges et des rumeurs tendancieuses sur les adversaires politiques du parti Ennahdha.

A terme d’un interrogatoire, hier, jeudi 10 novembre 2022, qui a duré 14 heures, le juge d’instruction a certes décidé de maintenir le suspect en état de liberté, malgré le fait que le parquet lui eut demandé d’émettre un mandat de dépôt à son encontre. Mais, selon le substitut du procureur de la république près le tribunal de première instance de Sousse, Rochdi Ben Romdhane, cité par Mosaïque, le juge d’instruction a aussi décidé une interdiction de voyager à l’encontre du chef islamiste dans l’attente de la suite des investigations et, notamment, des résultats des tests techniques liés aux communications et aux supports numériques. Ce qui laisse sous-entendre que des liens formels sont susceptibles d’être établis entre Ghannouchi et les responsables d’Instalingo et d’alimenter ainsi le dossier d’accusation.

Dans des affaires judiciaires autrement plus graves, comme celles relatives aux assassinats politiques des dirigeants de gauche, Chokri Belaid et Mohamed Brahmi, de l’appareil sécuritaire secret d’Ennahdha ou encore des réseaux d’envoi des jihadistes en Syrie, Ghannouchi a pu s’en tirer, jusque-là, à bon compte, la justice n’étant pas encore parvenue à établir des éléments d’accusation tangibles. Sera-t-il finalement rattrapé par cette affaire autrement moins sensible?

Wait and see…

I. B.     

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